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Légionnaire toujours...

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1919-1939 : le recrutement des légionnaires allemands

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CAIRN.INFO : Chercher, repérer, avancer.

 

Alors que la Grande Guerre n’est pas encore achevée, la revue L’Illustration perçoit déjà que le conflit a profondément modifié la physionomie d’un des corps les plus singuliers de l’armée française. « Quoi qu’il en ait été de l’ancienne Légion, celle de Madagascar et du Tonkin, celle du Dahomey et du Maroc, la guerre l’a renouvelée, transformée de fond en comble » [1][1] L’Illustration, n° 3905, 5 janvier 1918, p. 8.. Indubitablement, « la vieille Légion est morte dans les tranchées du nord de la France » [2][2] Douglas Porch, La Légion étrangère, 1831-1962, Paris,.... Ainsi, la nécessité de disposer d’effectifs toujours plus importants a-t-elle imposé une organisation différente du recrutement et des statuts des légionnaires, notamment par le recours aux engagements pour la durée de la guerre [3][3] Le concept de l’engagement volontaire pour la durée.... Enfin, la création d’unités résultant de la multiplication des théâtres d’opérations de cette guerre mondiale procure à la Légion étrangère des « identités » multiples. À la fin des hostilités, il n’y a plus une mais des Légions étrangères qu’il est nécessaire de fédérer pour retrouver un véritable esprit légionnaire. « Seule compte la Légion et non le régiment […]. Le bloc légionnaire doit former un corps incomparable, dont l’esprit, l’esprit légionnaire, est et doit demeurer unique » [4][4] Colonel Maire, Nouveaux souvenirs sur la Légion étrangère,.... Malgré la gloire acquise, la Légion sort terriblement affaiblie de cette grande épreuve qui l’a désorganisée et modifiée [5][5] Notamment par le régiment de marche de la Légion étrangère.... Dans le contexte difficile de l’après-guerre puis de l’entre-deux-guerres, il s’agit de donner naissance puis d’assurer la pérennité d’une « troisième Légion », « la jeune Légion » comme l’appellent les contemporains par opposition à la « vieille Légion » d’avant-guerre [6][6] La première Légion est celle de 1831-1835, qui a été....

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Dès le début du xxe siècle, dans le contexte particulier de la rivalité coloniale avec la France, l’Allemagne mène des campagnes contre la Légion étrangère. Cette dernière contrarie d’autant plus ses plans qu’elle enrôle ses ressortissants [7][7] Gaston Moch, La Question de la Légion étrangère, éd. Bibliothèque-Charpentier,.... En septembre 1908, l’affaire de Casablanca occasionne une très vive tension en totale disproportion avec l’événement [8][8] Le 25 septembre 1908, cinq légionnaires déserteurs.... L’exaspération est à son comble. Elle augmente encore en décembre lorsque quarante légionnaires allemands de la compagnie d’instruction du 2e régiment étranger tentent de déserter en arrêtant le train se rendant à Aïn-Sefra [9][9] SHD/DAT, 3H259, note 5 du lieutenant-colonel Maurel.... « Après quelques moments d’accalmie […] la campagne contre la Légion reprend avec plus d’intensité » [10][10] Hubert Jacques, L’Allemagne et la Légion, éd. Libraire.... Elle s’amplifie jusqu’à la déclaration de guerre. « Dans le numéro de décembre 1913 de la revue Hochland, Heinrich Poh exprime une opinion fort répandue en Allemagne, en disant que la seule existence de la Légion étrangère peut à l’occasion fournir l’étincelle qui mettrait le feu aux poudres » [11][11] Gaston Moch, op. cit., p. 5. L’auteur de cet article.... À la même époque, Maurice Paléologue, ambassadeur de France à Berlin, confie à Aristide Briand que l’Allemagne possède deux motifs pour brusquer une agression : le Maroc et le « recrutement de la Légion étrangère où viennent s’enrôler beaucoup de soldats allemands. Les feuilles pangermanistes accusent les Français de favoriser la désertion dans les rangs de l’armée allemande, pour faire payer leurs conquêtes par du sang allemand » [12][12] Maurice Paléologue, Au quai d’Orsay à la veille de.... Ainsi, l’Allemagne est-elle fortement sensibilisée à la question de la Légion, et possède-t-elle une bonne expérience dans la lutte contre cette dernière.

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Malgré sa capitulation, l’abdication du Kaiser et la partition de son territoire, l’Allemagne n’est finalement pas anéantie. Paradoxalement, « loin de détruire ou seulement d’ébranler l’unité allemande, les traités de 1919 la confirmèrent » [13][13] Jacques Bainville, Histoire de deux peuples, continuée.... Le traité de Versailles ne réconcilie pas les peuples. La paix entre la France et l’Allemagne n’est qu’apparente. Les rivalités demeurent. Si la Grande Guerre a effectivement transformé la plus chère troupe de Lyautey, a-t-elle également modifié les relations entre la Légion étrangère et l’Allemagne ?

Certes, l’entre-deux-guerres est, par définition, une période de « non guerre » donc de paix, mais la Légion étrangère n’est-elle pas à nouveau un casus belli avec l’Allemagne ? L’étude du recrutement des légionnaires allemands semble pouvoir apporter un élément de réponse à cette interrogation.

De 1919 à 1932, la Légion étrangère est le théâtre d’une « drôle de paix » (I). Entre recherches de légionnaires et hostilités déclarées, les deux ennemis d’hier se retrouvent à nouveau face à face. Ensuite, avec la radicalisation du régime politique d’outre-Rhin, la Légion étrangère représente « un défi permanent » (II). Malgré les initiatives françaises, la persécution des légionnaires par le Reich n’est pas sans conséquence sur le recrutement « de cette belle troupe que les Allemands n’aiment pas mais admirent » [14][14] Colonel Maire, op. cit., p. 210..

 

I - Une drôle de paix (1919-1932)

A - Le recours au contingent allemand

L’inquiétante crise des effectifs

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Alors que le traité de paix n’est pas encore signé, les engagés volontaires pour la durée de la guerre sont démobilisés. En quelques mois, la Légion étrangère retrouve ses effectifs d’avant le conflit et même légèrement moins [15][15] Selon les estimations, il y aurait environ 12 000 légionnaires.... Or, il y a un régiment de plus à fournir en effectifs : le rmle qui a été l’objet de toutes les attentions durant la Grande Guerre. Maintenant que l’heure est à la démobilisation, ce régiment voit ses effectifs diminuer « considérablement » [16][16] SHD/DAT, 7N144, note 1838-1/11, 25 janvier 1919. Cette.... À la fin de l’année 1919, le régiment ne se compose plus que « de huit cent vingt-huit hommes dont deux cent vingt en cours d’instruction » [17][17] SHD/DAT, 7N381, rapport du lieutenant-colonel Rollet.... Le glorieux régiment n’est plus qu’un bataillon.

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Au Maroc, la situation de la Légion demeure aussi alarmante. Le théâtre n’a pas été prioritaire. Très peu de renforts lui ont été octroyés depuis plus de quatre ans. De plus, la « démobilisation fera-t-elle perdre deux mille hommes à la Légion étrangère qui, ajoutés au déficit actuel […] feront tomber l’effectif global des quatre bataillons à mille deux cent cinquante-trois hommes soit, en défalquant absents et mitrailleurs, une moyenne de quarante hommes par compagnie » [18][18] SHD/DAT, 6N112, télégramme 44, 17 janvier 1919.. Selon Lyautey, la Légion menacerait même de disparaître [19][19] SHD/DAT, 6N112, télégramme 2080, 21 avril 1919.. La situation ne s’améliore pas. « Les dépôts d’Algérie n’ont pu envoyer au Maroc que des renforts tout à fait insignifiants » [20][20] SHD/DAT, 3H95, télégramme 3867 bg, 17 juillet 1919.

La principale conséquence des sous-effectifs est une réduction notable de la capacité opérationnelle de la Légion. Les bataillons n’ont plus les moyens de manœuvrer parce qu’ils ne peuvent pas aligner le nombre de fusils suffisant, aussi sont-ils frappés d’immobilité [21][21] SHD/DAT, 3H259, note sur le recrutement de la Légion.... « En raison de la pénurie d’effectif à la Légion étrangère, les bataillons […] stationnés au Maroc sont réorganisés » [22][22] SHD/DAT, 3H259, note de service 3125, 27 décembre .... Entre deux et trois compagnies y sont mises en sommeil [23][23] Ibid.. Comme les autres « unités d’infanterie française », la Légion étrangère n’est plus constituée « que de simples centres d’instruction et de dépôts de cadres et spécialistes » [24][24] SHD/DAT, 6N112, télégramme 54 du commissaire résident.... Il est pourtant nécessaire qu’elle retrouve rapidement sa capacité opérationnelle. L’œuvre qui reste à accomplir au Maroc repose essentiellement sur son emploi [25][25] SHD/DAT, 3H95, note 347 du général Cottez, commandant.... La Légion étrangère doit être reconstruite en toute urgence.

Les possibilités de recrutement outre-Rhin

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Dans ce contexte difficile, plusieurs solutions sont envisagées pour permettre une renaissance rapide de ce corps prestigieux. Tout d’abord, la section Afrique de l’état-major des armées propose d’y incorporer les condamnés militaires au titre d’un engagement spécial [26][26] SHD/DAT, 7N381, bordereau d’envoi 9455-1/11, 8 novembre.... Cette disposition intéressante à court terme serait une catastrophe à long terme. Aussi, l’idée est-elle abandonnée. La deuxième possibilité consiste à amalgamer les légionnaires dans des unités indigènes, ou d’utiliser les compétences particulières des individus au sein des états-majors. Ces nouveaux emplois modifieraient complètement la Légion, ce qui paraît tout à fait inopportun et impolitique. De plus, ils ne permettraient pas aux légionnaires de rester une troupe soudée puisque ces derniers évolueraient dans des cadres différents. Ces hypothèses irréalisables sont finalement abandonnées.

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D’ailleurs, les perspectives du recrutement ne semblent pas nécessiter de telles dispositions. Le Résident général pense « qu’il devrait être facile de trouver un recrutement illimité d’Austro-Allemands attirés […] parmi le personnel de guerre ou des volontaires des pays occupés » [27][27] SHD/DAT, 6N112, télégramme 380/CMC, 18 novembre 19.... Quelques jours plus tard, Lyautey insiste à nouveau pour reconstituer la Légion « par un très large appel aux Allemands et aux Autrichiens parce qu’il lui semble que la situation intérieure de ces pays et la démobilisation de leur armée devrait pouvoir faciliter de nombreux et immédiats engagements volontaires » [28][28] SHD/DAT, 6N112, télégramme 6/cmc, 25 janvier 1919.. Des dispositions législatives et ministérielles sont donc prises pour faciliter les engagements. Le 18 avril 1919, une nouvelle loi abroge celle du 5 août 1915. Elle permet à tous les étrangers de pouvoir contracter un engagement de cinq ans selon les dispositions d’avant-guerre [29][29] La loi du 5 août 1915 interdit l’engagement à la Légion.... Enfin, la section Afrique de l’état-major des armées contacte le ministère de l’Intérieur qui s’engage à faciliter l’entrée en France des gens dépourvus de passeport, mais voulant s’engager [30][30] SHD/DAT, 8N42, lettre 1911-1/11 du ministre de la Guerre....

Au début de 1920, les engagements « prennent une très sérieuse importance » [31][31] DHPLE, 1-FP/C22, note 497/cm du ministère de la Guerre.... En septembre, « le moment est proche où les unités de Légion en service au Maroc auront atteint leur effectif normal » [32][32] SHD/DAT, 3H365, note 4100-9/11 de la section d’Afrique.... En fait, il y a déjà deux mille légionnaires de plus que les prévisions de juillet 1919 [33][33] Il y a alors 5 500 légionnaires au Maroc, alors que.... Durant cette période d’engagements massifs, le recrutement germanique est prépondérant. Le triple phénomène démobilisation, crise économique et crise politique rend effectives les perspectives d’enrôlement dans les pays ex-ennemis. Le général commandant les troupes d’occupation dans le Palatinat écrit même au lieutenant-colonel Rollet que « les sujets badois, wurtembourgeois et palatins rappliquent en masse » [34][34] DHPLE, 1-FP/C22, lettre manuscrite, 19 janvier 192.... Le nombre des candidats qui se présentent spontanément à l’armée du Rhin « dépasse un millier par mois, c’est-à-dire que les provinces rhénanes fournissent à la Légion étrangère un contingent supérieur » à celui qu’il est possible d’incorporer [35][35] SHD/DAT, 3H259, note 54209-9/11 du ministre de la Guerre.... Aussi, le ministre de la Guerre demande-t-il que le nombre d’engagements de ces volontaires soit limité à environ cinq cents par mois. Le flux dépasse les prévisions du commandement français qui est surpris de « cette affluence anormale de sujets allemands » [36][36] SHD/DAT, 3H259, note 20415/S du général de division.... Au total, il semble effectivement que la Légion retrouve la situation d’avant-guerre, c’est-à-dire que « la majorité des engagés est d’origine ou d’attache allemande » [37][37] DHPLE, 1-FP/C22, note 8892 du lieutenant-colonel Rollet....

B - Rivalité autour des engagements

La malédiction du candidat et du légionnaire

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Dans l’immédiat après-guerre, les difficultés économiques et politiques de l’Allemagne estompent le problème que la Légion étrangère pose à une partie de l’opinion publique. Il n’en est donc plus qu’épisodiquement question. Les quelques « recrudescences de propagande contre la Légion » sont en fait très limitées aussi bien dans le temps et dans l’espace que dans les revendications abordées voire le vocabulaire utilisé [38][38] SHD/DAT, 3H259, lettre du lieutenant-colonel Rollet.... En des temps diplomatiquement complexes, le gouvernement du Reich se positionne prudemment. « Il interdit notamment la production du film sur “la honte noire”, et d’un autre film contre la Légion étrangère » [39][39] MAE, carton Z 417, note pour la direction des affaires.... À partir du milieu des années 1920, l’action contre la Légion étrangère se développe. La conclusion des accords de Locarno permet aux autorités allemandes de « consacrer leur attention à la question de la Légion étrangère » [40][40] SHD/DAT, 7N22054 (1), renseignement 9649, 24 mars 1930..... Entre 1926 et 1927, les parutions et productions sont de plus en plus nombreuses, mais obtiennent encore assez peu d’écho. À partir de janvier 1928, voire dès décembre 1927, ce n’est plus le cas. La Légion est un thème traité « en boucle » par la presse [41][41] SHD/SHM, 1BB3.22, compte rendu trimestriel de renseignement.... Le but est « d’entretenir l’agitation plus que de fournir une peinture exacte de la situation des Allemands enrôlés dans cette troupe » [42][42] SHD/SHM, 1BB3.22, compte rendu trimestriel de renseignement.... En fait la Légion est un exutoire [43][43] SHD/SHM, 1BB8.239, compte rendu trimestriel de renseignement.... Les attaques sont aussi des prétextes pour discréditer les institutions internationales et bien sûr le traité de Versailles.

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L’action des pouvoirs publics allemands ne se limite pas à l’orchestration de campagnes dans la presse. Pour être vraiment dissuasif, l’accès à la Légion doit être difficile. Une véritable traque est organisée contre les candidats. Facilement reconnus en zone frontière par leurs tenues dépenaillées, ces derniers « sont le plus souvent “passés à tabac”, incarcérés pendant trois ou quatre jours, relâchés et mis en route vers l’intérieur » [44][44] Ibid.. Entre les autorités allemandes et les candidats s’organise alors une partie de cache-cache à laquelle la France n’est pas étrangère. Cependant, elle ne peut opposer qu’une vigilance active ainsi qu’une connaissance des bons et des mauvais itinéraires. En fonction des informations données par les centres d’hébergement et l’armée du Rhin, les militaires français parviennent à déterminer les axes par lesquels les candidats n’arrivent pas à destination. Dès que cela est nécessaire, les officiers chargés des mises en route sont convoqués à Mayence pour y recevoir des instructions « exclusivement verbales » [45][45] La fréquence de la réunion des officiers d’information.... Ensuite, ils conseillent en conséquence les postulants à l’engagement sur les routes et sur les meilleurs points de franchissement [46][46] Ibid. « C’est ainsi que dans le courant de novembre.... Les autorités allemandes effectuent aussi des contrôles à l’entrée du territoire. Les anciens légionnaires sont rapidement identifiés, car ils sont renvoyés dans leurs foyers avec un costume civil identique et connu des policiers [47][47] SHD/DAT, 7N2590, note 1366/am de l’attaché militaire.... Cette reconnaissance est le point de départ de tracasseries. Ainsi, des directives sont-elles finalement données pour indiquer aux légionnaires libérés les itinéraires et points de franchissement les plus sûrs [48][48] SHD/DAT, 7N22128 (3), renseignement 4396-scr-2/11,.... La nécessité d’une telle disposition laisse présager que les anciens légionnaires ont la vie difficile en Allemagne.

En effet, l’ancien légionnaire a un sort peu enviable lorsqu’il rentre au pays. À partir de 1928, « les Allemands décident de poursuivre pour haute trahison les anciens légionnaires qui ont servi à la Légion étrangère pendant la Grande Guerre » [49][49] SHD/DAT, 7N22122 (1), renseignement 185/z-sdo au sujet.... Indéniablement, l’objectif est de faire prendre conscience aux citoyens que, « du fait de son entrée à la Légion, tout Allemand devient traître à sa patrie » [50][50] SHD/DAT, 7N22054 (1), Deutsche Wehr, 4 septembre 1.... Vue sous cet aspect, la lutte contre les légionnaires devient l’affaire de chaque citoyen qui se doit de dénoncer les suspects « dans les gares, aux guichets et sur les quais » [51][51] SHD/DAT, 7N992 (1) supplément, note sur les modifications.... Ainsi, « la gendarmerie […] fait appel à l’aide de la population pour seconder l’autorité dans sa lutte contre la Légion étrangère » [52][52] SHD/DAT, 7N20254 (1), renseignement 642-scr-2/11, 10 février.... Une fois découvert, l’ancien légionnaire est l’objet de tracasseries de la part des services de police mais aussi de la société qui se montre impitoyable envers les postulants ou les anciens légionnaires. Ils sont « traités comme ils le méritent », c’est-à-dire sans douceur ni compassion [53][53] SHD/DAT, 7N22054 (1), Deutsche Wehr, 4 septembre 1.... Dans ce contexte, il est facile de comprendre que la réadaptation du légionnaire est difficile. Il a du mal à vivre de nouveau en Allemagne. Beaucoup n’ont pas de domicile. Ils pérégrinent de villes en villes dans lesquelles ils font de courts séjours et vivent de mendicité [54][54] SHD/DAT, 7N22122 (1), renseignement 6673-scr-2/11,.... Leur instabilité entraîne leur indigence, ce qui explique en partie la multiplication des « témoignages de rue » [55][55] SHD/SHM, compte rendu de renseignement concernant la... et la nécessité pour ceux qui n’ont pas droit à une pension « de vendre des livrets contre la Légion » [56][56] SHD/DAT, 7N22054 (2), rapport du chef d’escadron Lano....

Contre-attaque de l’institution

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Le premier contact du candidat avec l’institution est primordial, car il lui donne un préjugé favorable ou non. Il convient donc de ménager le futur légionnaire [57][57] SHD/DAT, 7N992 supplément, note 1235-9/11 de la section.... Or, de l’avis du chef de bataillon Augier, « du bureau de recrutement où il s’engage jusqu’au dépôt du régiment, l’odyssée du légionnaire est dépourvue de charme […] ballotté de villes en dépôts où il ne trouve que réceptions sinon hostiles, du moins indifférentes […] il regrette l’engagement souscrit, et bientôt cherche à recouvrer sa liberté » [58][58] SHD/DAT, 3H259, rapport du chef de bataillon Augier,.... Le volontaire a besoin d’un meilleur accueil pour être persuadé qu’il fait le bon choix. Ceci est d’autant plus important que les inaptes refoulés contribuent aussi à la propagande. Leur impression peut influencer de futurs candidats. Cependant, la Légion ne s’occupe pas vraiment de son propre recrutement. Ainsi, n’est-il pas choquant que ce soit un lieutenant du 30e dragons qui soit responsable du centre de Metz ? Il se trouve être l’un des premiers contacts entre le candidat et une institution qu’il ne représente pas. Il paraîtrait donc normal que des officiers de Légion commandent les centres. « La prise en main des volontaires, dès leur arrivée au bureau de recrutement » par la Légion est un sujet particulièrement cher au colonel Rollet [59][59] Pierre Soulié, Paul-Frédéric Rollet, père de la Légion,....

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En juin 1928, il obtient satisfaction [60][60] SHD/DAT, 7N2348, note sur les modifications à apporter.... Il est « installé en France et en Algérie, sous l’autorité directe du colonel commandant le 1er régiment étranger, des barrages successifs de spécialistes, médecins et officiers de Légion ne laissant passer que des candidats susceptibles de faire physiquement et moralement d’excellents légionnaires » [61][61] SHD/DAT, 7N992 supplément, note 1235-9/11 de la section.... Très rapidement, il semble opportun de regrouper les centres de rassemblement du recrutement germanique en un seul. Le lieu doit combiner plusieurs atouts : être aussi près que possible du front d’engagement ; permettre de surveiller tout en étant à l’abri lui-même des indiscrétions ou agissements hostiles ; offrir un casernement suffisamment confortable et disposer d’un médecin et d’un hôpital. Enfin, la voie ferrée doit être facile d’accès aussi bien pour l’arrivée des engagés que pour leur départ sur Marseille. Finalement, Toul répond le mieux à ces exigences. Bientôt, ils sont plusieurs milliers d’Allemands à passer par ce dépôt avant de rejoindre Marseille puis l’Afrique. La réorganisation de la chaîne de recrutement germanique permet d’être plus performant. Faut-il encore que l’institution parvienne à toujours attirer les ressortissants d’outre-Rhin.

Des brochures et des tracts sont édités par le commandement « pour la propagande en faveur de la Légion étrangère » [62][62] SHD/DAT, 7N928 (1) supplément, note 2473 du bureau.... Diffusés « par les voies et moyens habituels », ces documents sont transmis à l’ambassade de Berlin pour être adressés aux divers consulats français en Allemagne [63][63] SHD/DAT, 7N928 (1) supplément, note 2820 du ministre.... À charge pour eux de les faire distribuer aux candidats potentiels. Traduits en anglais, en suédois et en espagnol, les prospectus sont également diffusés dans les pays où la propagande allemande est particulièrement nocive et active. Ces publications présentent la Légion « sous un jour pittoresque — et d’ailleurs véridique — de nature à frapper l’imagination » [64][64] SHD/DAT, 7N928 (1) supplément, projet de note accompagnant.... Ils rappellent les statuts qui régissent l’institution et la vie quotidienne du légionnaire. La qualité de la vie du légionnaire est estimée en fonction de la solde et des autres avantages financiers [65][65] SHD/DAT, 7N928 (1) supplément, « Le Légionnaire à la.... Indubitablement, l’amélioration des conditions de vie des légionnaires contribue à contrer l’argumentaire de la propagande hostile à la Légion [66][66] SHD/DAT, 7N989 (5) supplément, note 456-scr-2/11 de.... « La vraie propagande est donc fonction des avantages accordés aux militaires de la Légion étrangère en ce qui concerne la solde, les permissions, l’habillement, le confort et la bonne tenue du casernement » [67][67] SHD/DAT, 7N989 (5) supplément, bordereau 1036-9/11.... Les évolutions de la vie et des conditions du légionnaire établissent de façon certaine une distinction entre la « vieille » et la « jeune » Légion [68][68] Cooper, Douze ans à la Légion étrangère, éd. Payot,.... En effet, « le traitement des légionnaires est humanisé. Par exemple, les anciennes punitions, dont la sévérité était si redoutée, sont remplacées par les punitions régulières de l’armée ordinaire » [69][69] Prince Aage de Danemark, Mes souvenirs de la Légion.... Les coopératives, bibliothèques et cinémas spécialement mis en place pour les légionnaires sont activement fréquentés, « principalement dans les détachements du Sud où la plupart des localités n’offrent aux militaires aucune ressource ou distraction » [70][70] DHPLE, 1-FP/C26, rapport sur l’état d’esprit du 1er régiment.... Bien que la vie du légionnaire soit rendue moins difficile, elle ne fait pas pour autant perdre à l’institution une partie de son rayonnement, et son image excite toujours autant la curiosité du monde extérieur [71][71] Pierre Mac Orlan, Légionnaires, Éd. du Capitole, 1930,.... En fait, la Légion s’adapte aux circonstances, aux sociétés et aux aspirations des jeunes qui viennent s’engager.

C - Un recrutement durable

Inefficacité des campagnes d’outre-Rhin

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L’observateur constate une contradiction logique entre les appréciations française et allemande. Les Français soulignent « l’efficacité des mesures prises par les autorités allemandes pour empêcher leurs ressortissants de prendre du service à la Légion » [72][72] SHD/DAT, 9N960 (1) supplément, note 3121-9/11 de la.... De leur côté, les Allemands ne cessent de « constater que le nombre des enrôlements à la Légion étrangère ne diminue pas » [73][73] SHD/DAT, 7N2664 (3), note VI 5212 du ministère de l’Intérieur.... Ils regrettent ainsi que « l’œuvre de la propagande contre la Légion, entreprise par les autorités et par la presse, n’ait pas obtenu de grands résultats » [74][74] SHD/DAT, 7N22122 (3), renseignement 5304-scr-2/11,.... Il semble que « les résultats désirés ne sont pas atteints » [75][75] SHD/DAT, 7N22054 (1), Hagener Zeitung, 31 mars 193.... La lutte que mène l’Allemagne est effectivement un échec. L’État ne parvient pas à tarir les engagements ; il continue à fournir à la Légion les ressortissants dont elle a besoin.

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Le mauvais accueil en Allemagne transforme l’ancien légionnaire en propagandiste d’un eldorado. « Il n’est pas rare qu’il y revienne accompagné de parents, de frères ou de camarades. On cite l’exemple de l’un d’eux, ex-caporal, se présentant suivi de six compatriotes » [76][76] SHD/DAT, 7N992 supplément, note sur les modifications.... La propagande et les mauvais traitements réservés aux légionnaires favorisent le rengagement des anciens. Les campagnes de propagande se substituent aux anciens. Elles excitent la curiosité des individus qui n’ont pas spontanément de contact avec la Légion. Finalement, elles « appellent l’attention » sur l’institution [77][77] SHD/DAT, 7N992 (1) supplément, note 3232bis-9/11, 25 novembre....

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Malgré l’image négative qui lui est donnée, la Légion fascine et « fait germer le goût d’aventure » [78][78] SHD/DAT, 7N22054 (1), Mainzer Anzeiger, 10 août 19.... Ainsi, les actions entreprises rendent-elles finalement peu de services [79][79] SHD/DAT, 7N22054 (1), lettre de Wilhlem Marx au légionnaire.... Elles suscitent des vocations et « provoquent des candidatures » [80][80] SHD/DAT, 7N992 (1) supplément, note 3232bis-9/11, 25 novembre.... En fait, « quiconque prononce le nom de Légion, en Allemagne surtout, travaille pour elle » [81][81] Capitaine Poirmeur, Notre vieille Légion, éd. Berger-Levraut,.... Paradoxalement, les actions entreprises par les autorités allemandes produisent finalement l’effet inverse à celui recherché. Incontestablement, « les moyens de propagande ont renforcé l’exil vers la Légion » [82][82] SHD/DAT, 7N12054 (1), Pirmasenser Zeitung, 29 janvier.... L’échec des campagnes résulte aussi de leur manque de crédibilité. La population n’est pas dupe. L’homme de la rue ne pense pas que l’existence « soit si terrible » à la Légion où les soldats sont même peut-être plus heureux qu’à la Reichswehr [83][83] SHD/DAT, 7N22122 (3), lettre de M. Anton Giersen à.... Il paraît alors « qu’on exagère fortement du côté allemand […]. Nous savons exactement quelle est la vie d’un légionnaire en France, ils ne peuvent plus continuer à mentir et nous voulons étaler la vérité » [84][84] SHD/DAT, 7N22125, lettre de M. Pfennig à son fils,.... D’ailleurs, lorsque Heinz Weil-Bernard fait part du désir de s’engager, son professeur lui rappelle les atrocités commises contre les légionnaires. Mais, faisant preuve de bon sens, le jeune homme lui rétorque que « les Français ne peuvent pas faire la guerre avec des légionnaires ensevelis ou évanouis » [85][85] Heinz Weil-Bernard, Contre-moi de la tyrannie…, Nouvelles....

Évolution du recrutement germanique

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Entre 1920 et 1923, l’arrivée des jeunes Allemands est vécue dans les unités comme une invasion [86][86] Georges Manue, Têtes brûlées, éd. La Nouvelle Société.... Ils représentent presque 49 % des recrues [87][87] SHD/DAT, 7N2314, note 1987-9/11 de la section d’études.... Cette arrivée massive est d’autant plus fortement ressentie que les autres contingents sont numériquement nombreux mais individuellement faiblement représentés. Les ressortissants allemands semblent encore plus présents, car sont considérés comme Allemands tous ceux qui en parlent la langue. « L’Allemand » est alors employé comme un terme générique qui demeure finalement assez flou [88][88] SHD/DAT, 3H697, note du colonel Rollet commandant le.... Ainsi, s’il est certain que « c’est l’Allemagne qui fournit le plus de soldats », et dans une proportion importante, il est également vrai que leur nombre varie selon les définitions données à « l’Allemand » [89][89] Pierre Mac Orlan, Légionnaires, Éd. du Capitole, 1930,....

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Nous ne disposons pas de beaucoup de données numériques. Toutefois, entre 1924 et 1927, l’évolution du recrutement du centre de Metz permet de montrer que l’affluence des Allemands s’inscrit dans la durée [90][90] SHD/DAT, 7N992 supplément, note sur les modifications.... Durant ces quatre années, il y aurait eu presque 50 % de recrues allemandes. Inévitablement, leur présence ne diminue pas dans les unités [91][91] DHPLE, 1-FP/C23, rapport du capitaine Deschamps, commandant.... De 1924 à 1926, la proportion d’Allemands oscille entre 43 % et 55 %. Il semble toutefois que la Légion ait atteint sa capacité maximum d’intégration des sujets allemands. Elle cherche à diversifier son recrutement dès 1926 [92][92] SHD/DAT, 7N2348 (1), note 172/ES du 1er bureau de l’état-major.... En 1927, la répartition des nationalités à l’engagement change puisque les Allemands ne représentent plus que 39 % des recrues. Cette année marque donc probablement une rupture. Dès lors, le recrutement germanique reste toujours indispensable mais moins essentiel. Il demeure le réservoir de la Légion étrangère mais aussi, finalement, une variable d’ajustement puisqu’il y est fait plus ou moins appel selon les besoins.

En 1929, le contingent allemand est encore largement le plus nombreux. Il représente 40 % des engagements [93][93] DHPLE, 1 FP/C24, rapport du sil pour l’année 1929.. Toutefois, cette proportion doit être relativisée par ceux qui quittent l’institution. En valeur absolue, le gain n’est que de trois cent quatre-vingts hommes. De plus, l’arrivée en quantité importante de sujets francophones et italiens réduit la prédominance allemande [94][94] Ibid. Cette année-là, de nombreux francophones (30 %).... L’année suivante, le phénomène devient plus sensible. « Les Allemands sont toujours en majorité mais […] il y aurait plutôt diminution, en ce qui les concerne, sur les effectifs de l’année dernière » [95][95] SHD/DAT, 7N1011 supplément, rapport du sil pour l’.... En 1931, alors que le recrutement est le plus important depuis le début des années 1920, les Allemands n’ont jamais été aussi peu admis. Ils ne sont que 23 % des engagés volontaires [96][96] SHD/DAT, 7N1011 supplément, rapport du sil pour l’.... Enfin, durant la grande restriction de 1932, ils constituent encore l’apport le plus important, mais représentent 25 % de l’effectif total. Ainsi, se forme-t-il finalement une régulation involontaire. Les Allemands évitent d’envoyer les candidats que la Légion ne peut assurément pas engager, non pas parce qu’elle n’en a pas besoin, mais parce que le maintien de son équilibre le lui « interdit » [97][97] Souvenons-nous qu’en 1920, le ministre de la Guerre.... Le souci d’une meilleure répartition entre les nationalités porte ses fruits. En 1932, elle est même déclarée satisfaisante [98][98] Ibid.. Le changement de régime en Allemagne remet-il en cause cet « équilibre » ?

II - Le défi permanent (1933-1939)

A - La stratégie des nazis

Politisation de la lutte

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Durant le premier trimestre 1933, la propagande contre la Légion étrangère ne diffère pas fondamentalement de celle entreprise depuis l’évacuation des territoires occupés et le début de la crise économique. Toutefois, le message devient plus politique. L’arrivée d’Hitler au pouvoir est l’occasion de lancer « un appel au gouvernement de relèvement national actuel pour le conjurer d’étudier dès maintenant la recrudescence de racolage pour la Légion » [99][99] SHD/DAT, 7N22054 (2), L’Ami du peuple, 12 mai 1933..... Les nazis convaincus adjurent de prendre des mesures radicales pour empêcher les Allemands d’entrer à la Légion [100][100] Ibid.. Leur sentiment est que la responsabilité du service des Allemands à la Légion « incombe indirectement mais en grande partie aux gouvernements qui se sont succédés jusqu’à ce jour et qui ont omis de mettre en garde les enfants des écoles contre les méthodes de racolage » [101][101] SHD/DAT, 7N22054 (2), renseignement 17003 du 29 mars.... Les arguments politiques destinés à émouvoir le gouvernement touchent surtout la nécessité de tarir le recrutement de la Légion [102][102] SHD/DAT, 7N2591, note 273/am de l’attaché militaire.... Non seulement « l’Allemagne n’a aucune raison de faire cadeau à la France de sa jeunesse », mais en « éliminant la Légion, on ébranlerait du même coup tout l’empire colonial français, étant donné que les troupes indigènes sont peu sûres et que, dans leurs rangs, les émeutes seraient de plus en plus fréquentes. L’Allemagne […] a donc un double intérêt à empêcher que la France ne recrute pour sa Légion étrangère des mercenaires allemands » [103][103] SHD/DAT, 7N22054 (2), renseignement de presse 40/Pr..... La lutte contre la Légion s’inscrit dans la stratégie globale du nouveau gouvernement.

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Assez rapidement après sa création, le Geheime Staatspolitisches Amt, une nouvelle entité de la police d’État, élabore une stratégie pour prévenir les enrôlements [104][104] Le Geheime Staatspolitische Amt est plus connu sous.... Dès le mois de mai 1933, elle propose une série de mesures dont « la perte de la nationalité pour les légionnaires allemands et l’interdiction d’échanger de la correspondance entre les parents des légionnaires et ces derniers » [105][105] SHD/DAT, 7N22128 (2), renseignement 3443-scr-2/11,.... La presse allemande accorde une grande publicité à ces mesures qu’elle annonce à diverses reprises [106][106] SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour.... L’objectif est assez habile. Il s’agit de ne pas effrayer les légionnaires susceptibles de rentrer en leur assurant qu’ils ne seront pas inquiétés sans pour autant augmenter le nombre de candidats. Ainsi, les anciens légionnaires ne seront « ni punis ni expulsés et conserveront leur nationalité […]. Cette immunité ne doit cependant pas constituer un attrait de plus en faveur de la Légion étrangère. Il est à supposer qu’à l’avenir, le gouvernement allemand prendra des mesures pour barrer de plus en plus la route de la Légion étrangère aux jeunes Allemands » [107][107] SHD/DAT, 7N22054 (2), Der Tag, 1er octobre 1933..

En juillet 1933, les différentes associations et ligues sont regroupées au sein du nsdap qui est proclamé parti unique. Aussi, en octobre 1933, le Volkischer Beobachter annonce-t-il que les principales ligues de protection contre la Légion se sont fusionnées en une seule association. Elle a pris le nom de « Ligue de combat contre la Légion étrangère française ». « Elle s’est placée sous la direction du parti national-socialiste » [108][108] SHD/DAT, 7N22054 (2), renseignement 6865-scr-2/11,.... Il est donc désormais évident que la lutte est directement orchestrée par l’État qui verse des subsides importants pour la propagande [109][109] SHD/DAT, 7N22122 (1), renseignement 7548-scr-2/11,.... La mainmise des autorités allemandes sur les associations d’anciens légionnaires se traduit par l’interdiction de celles qui ne rentrent pas dans le rang. Ainsi, en Saxe, la section locale de la Schutzverband gegen die französische Fremdenlegion qui n’a pas rejoint la nouvelle association est dissoute, interdite, et ses biens sont saisis [110][110] SHD/DAT, 7N22054 (2), Berliner Börsen Zeitung, 21 décembre....

Entre amnésie et activisme

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En 1934, les campagnes se poursuivent encore, mais avec moins d’insistance que l’année précédente. Le moment semble opportun pour faire le silence autour de la Légion. À partir de 1935, date qui correspond au rétablissement du service militaire en Allemagne, « les directives données par la police d’État paraissent pouvoir se résumer ainsi : ne plus parler de la Légion étrangère, même pas en mal » [111][111] SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour.... À partir de 1937, une légère inflexion se fait sentir. Des journalistes allemands, « en quête d’articles et de renseignements sur la Légion », séjournent au Maroc [112][112] SHD/DAT, 7N22128 (2), renseignement 2062-bsle au chef.... La réserve à l’encontre de la Légion s’estompe au fur et à mesure que le peuple allemand, à force de propagande, est convaincu de sa « résurrection […] le traité de Versailles par lequel il fut soumis à l’esclavage pendant quatorze ans gît à terre en lambeaux. Chaque année apporte de nouveaux exploits dus à la témérité et à la bravoure du Führer » [113][113] SHD/DAT, 7N22100 (1), renseignement 218-bsle à la scr,.... Désormais, les campagnes peuvent reprendre. La population est apte à comprendre que « la présence de citoyens allemands à la Légion étrangère sert des intérêts qui sont étrangers au peuple allemand et heurte de ce fait l’opinion populaire. L’enrôlement à la Légion étrangère ou le fait d’y demeurer nuit à la puissance de la défense nationale et à celle du travail du peuple, ce que rien ne peut excuser ni effacer » [114][114] SHD/DAT, 7N22100 (1). Ce paragraphe, probablement rédigé....

Ennemis déclarés du Reich, les légionnaires sont mis au ban de la société en trois étapes. La première remonte au rétablissement du service militaire. L’article 140 de la loi du 28 juin 1935 transforme le légionnaire en hors-la-loi puisqu’il doit nécessairement quitter sans autorisation le territoire du Reich. L’infraction « est punie d’une peine […] cette peine entraîne, en outre, la perte de l’aptitude à exercer une fonction publique pour une durée de une à cinq années […] la tentative est passible de sanctions » [115][115] SHD/DAT, 7N22054 (2), note 5890-2-scr-ema, extrait.... Le second temps se déroule juste après l’Anchluss, en avril 1938. Il concerne les légionnaires en service qui doivent faire allégeance au régime [116][116] Il est évident que la loi dont il est bientôt question.... La loi sur la déclaration de résidence des Allemands à l’étranger oblige tous les citoyens, y compris les anciens ressortissants autrichiens, à se présenter personnellement ou, en cas d’empêchement, à écrire au consulat général d’Allemagne du lieu de résidence, pour y faire leur déclaration. Les modalités d’application sont assez difficiles pour les légionnaires qui se coupent de facto de la communauté allemande. La perte de la nationalité est la troisième étape du processus de leur bannissement. Le 22 février 1939, le ministre de l’Intérieur du Reich décide « que la nationalité allemande sera retirée à tout Allemand qui, en pleine possession de ses facultés mentales, se sera engagé dans la Légion étrangère ou aura contracté une prolongation d’engagement. Il en sera de même pour les anciens légionnaires rentrés en Allemagne qui se rendront à l’étranger en dépit de la défense qui leur aura été faite » [117][117] SHD/DAT, 7N22100 (1), renseignement de presse du 23 février.... La loi a désormais le mérite d’être claire, même si le retrait de la nationalité ne s’applique pas à tous les légionnaires en service. Ne sont concernés que « les ressortissants allemands qui désormais contracteront un engagement dans la Légion […] ou qui, servant déjà dans la Légion, contracteront un rengagement » [118][118] SHD/DAT, 7N22122 (2), analyse de presse 31326 au sujet.... Les Allemands qui se sont engagés ou rengagés avant le 22 février 1939 et qui continuent d’accomplir leur service ne sont donc pas visés par la loi [119][119] SHD/DAT, 2R45, note 34119HC/SUR/SAT du chef du service....

B - La Légion contre-attaque

Faciliter les engagements

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Les autorités françaises peuvent difficilement mener des actions sur le territoire du Reich pour inciter les jeunes Allemands à venir s’engager. Ce n’est qu’une fois la frontière franchie qu’elles peuvent leur faciliter la tâche. Au printemps 1937, une réflexion est conduite par la préfecture de la Moselle qui, dans le cadre du contrôle des étrangers, souhaite assurer un meilleur suivi des candidats à la Légion. L’acheminement des ressortissants allemands franchissant clandestinement la frontière et qui demandent à contracter un engagement n’est pas satisfaisant. Aussi le cabinet de la préfecture propose-t-il deux mesures. La première vise à favoriser le recrutement en faisant accompagner les candidats par la gendarmerie jusqu’au centre d’hébergement. La seconde proposition a pour objectif une meilleure coordination dans la procédure de remise à la vie civile des candidats non admis [120][120] SHD/DAT, 7N22106 (2), note du cabinet du préfet de.... Si tous les acteurs conviennent de la nécessité de cette mesure, personne ne semble vraiment disposé à assurer le convoiement. Après de nombreuses tergiversations, l’escorte est finalement dévolue aux commissaires spéciaux. En fin de compte, ces mesures sont assez limitées. En effet, ce n’est que dans la région militaire dont l’état-major est à Nancy que, du 1er novembre 1937 au 1er février 1938, des dispositions sont prises pour mieux contrôler l’entrée des étrangers, et finalement faciliter le recrutement des candidats allemands [121][121] SHD/DAT, 7N22106 (2), note 2186 du général de division....

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La France semble prête à payer le prix nécessaire pour s’assurer un recrutement de ressortissants allemands. En effet, cette mesure occasionne des frais importants puisqu’elle nécessite de rembourser les déplacements des escortes. Toutefois, « il est à constater que, depuis le jour où cette mesure a été appliquée, le nombre des engagés allemands a diminué fortement. D’une moyenne de cinquante par mois, l’effectif est passé à trente-cinq depuis qu’on accompagne les candidats. Est-ce un effet de cette mesure ? » [122][122] SHD/DAT, 7N22106 (2), rapport 10/S du capitaine Perrossier... Cette expérience est momentanément abandonnée.

Néanmoins, d’autres mesures sont prises pour favoriser l’arrivée des Allemands à la Légion. Le candidat bénéficie de conditions exceptionnelles qui l’autorisent à rentrer en France assez facilement. En effet, un décret-loi du 2 mai 1938 sur la police des étrangers prescrit que ces derniers ne sont admis à pénétrer sur le territoire national que s’ils sont munis des documents exigés par les conventions internationales. « Or en raison des mesures prises par certaines puissances, notamment l’Allemagne, pour s’opposer à l’engagement de leurs ressortissants dans la Légion étrangère, de nombreux candidats désirant servir dans les régiments étrangers ne peuvent pénétrer en France que clandestinement » [123][123] SHD/DAT, 3H236, note 2065-9/ema du ministre de la Défense.... Ainsi, le ministère de l’Intérieur prend les dispositions nécessaires pour que les Allemands en situation irrégulière et désirant s’engager à la Légion ne soient pas refoulés. Munis d’un sauf-conduit, ils sont dirigés sur le poste de gendarmerie le plus proche [124][124] SHD/DAT, 3H236, note D-18 du ministre de l’Intérieur.... Le recrutement allemand est donc l’objet d’une attention particulière qui n’est pas vraiment remise en cause jusqu’à la déclaration de guerre.

Du recrutement à la solidarité

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Les différentes actions entreprises par l’Allemagne font comprendre aux autorités françaises que pour recruter, il n’est plus suffisant d’assurer un service acceptable aux légionnaires, mais qu’il faut aussi prendre en considération « l’après Légion ». Les légionnaires libérés sont souvent, sans s’en douter, les meilleurs agents de recrutement. Encore liés à leur régiment par un attachement qu’une bonne libération renforce, conscients et reconnaissants des soins qui leur ont été donnés même après le service, ils ne manquent pas de manifester autour d’eux leur fierté et leur satisfaction d’avoir servi à la Légion [125][125] SHD/DAT, 7N2348 (3), document émanant du sil intitulé,.... Parfois, lorsque les difficultés de la vie civile sont trop pénibles, si la libération n’a pas été vécue comme une ultime brimade, l’ancien revient, car il se souvient des bons moments passés à la Légion [126][126] DHPLE, 1-F.P./C.24, rapport du sil pour l’année 1929,.... Aussi, à partir du début des années 1930, la libération est-elle l’objet d’une grande attention [127][127] SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour.... « Il faut donner au libéré la certitude que la Légion ne le rejette pas comme un instrument qui a bien servi mais qui est devenu inutile ; il ne faut pas qu’il ait l’impression, en quittant le dépôt de Marseille, qu’une lourde porte se renferme derrière lui » [128][128] SHD/DAT, 7N2348 (3), document émanant du sil intitulé,.... Dès lors, plusieurs organisations d’entraide et diverses dispositions sont mises en place. Malgré les aléas, les légionnaires bénéficient de structures qui « ne les oublient pas […] et où ils peuvent obtenir une aide matérielle qui facilite l’accomplissement des formalités multiples et complexes que nécessite leur retour à la vie civile » [129][129] Idem..

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En d’autres termes, « on ne cesse pas d’être légionnaire au moment où l’on quitte l’uniforme. On le reste jusqu’à la mort » [130][130] Georges Manue, Têtes brûlées, op. cit., p. 247.. Celui qui passe à la Légion conserve à jamais son empreinte. Logiquement, les anciens se regroupent dans des associations qui remplissent plusieurs missions dont l’entraide et la solidarité sont les plus importantes. En outre, les différentes organisations d’anciens légionnaires cherchent à défendre les intérêts de leurs membres. Sous l’impulsion énergique du général Rollet, elles défendent les légionnaires pour leur faciliter l’octroi du droit de résidence qui conditionne l’accès au marché de l’emploi.

La solidarité Légion s’exerce aussi envers les légionnaires libérés qui ne peuvent pas travailler à cause d’une inaptitude, d’une réforme, ou encore auprès des anciens qui sont isolés, sans maison ni famille. Dès 1932, il est évoqué la possibilité d’offrir un abri et une existence convenable aux retraités et réformés dans une maison de retraite [131][131] SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour.... Une fois encore, le général Rollet est au cœur du projet. C’est lui d’ailleurs qui signe le règlement intérieur de la maison de retraite du légionnaire située à Auriol [132][132] SHD/DAT, 7N1009 (3) supplément, lettre d’Élie Rambaud.... Le général inaugure le domaine le 8 juillet 1934 [133][133] SHD/DAT, 7N1009 (3) supplément, programme de l’inauguration..... Dès l’ouverture du centre, une quinzaine d’anciens légionnaires y sont admis [134][134] SHD/DAT, 7N1009 (3) supplément, note 69 du capitaine.... Par la suite, la maison de retraite diversifie son « offre » en accueillant ponctuellement quelques légionnaires récemment libérés. Ces « jeunes anciens » ne sont pas destinés à rester, mais à être placés dans des emplois de la région [135][135] SHD/DAT, 7N1009 (3) supplément, lettre de M. Rambaud.... De leur côté, les trente-cinq à quarante pensionnaires ne restent pas oisifs. Ils travaillent la terre [136][136] SHD/DAT, 7N1009 (3) supplément, lettre et reportage.... Le centre se développe, s’embellit et prospère. De nouveaux terrains sont acquis, et la presse écrite s’intéresse à l’œuvre [137][137] La Légion étrangère, revue mensuelle illustrée. Militaire.... Être légionnaire n’est plus seulement un statut mais aussi un « état ». Toutefois, ces mesures sont-elles suffisantes pour maintenir le recrutement germanique ?

Le recrutement allemand en chiffres [138][138] SHD/DAT, 7N1011 supplément et 9N79 supplément, rapports...

C - Évolution du contingent germanique

Tarissement du recrutement

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Durant les deux années qui suivent l’avènement d’Hitler, le nombre de ressortissants allemands engagés à la Légion étrangère subit une très forte baisse. En 1933, c’est environ la moitié de l’effectif de 1932 qui est admis. En raison du sureffectif et de la crise économique qui impose des sacrifices budgétaires, la Légion recrute très peu [139][139] SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour.... Cependant, les chiffres sont trompeurs. En proportion, le recrutement allemand augmente très sensiblement. Après les fléchissements de 1931 et 1932 durant lesquels leur proportion est tombée à 23 %, les années 1933 et 1934 sont meilleures [140][140] SHD/DAT, 7N4041 (2), rapport 900/srd du colonel Azan.... Le pourcentage des engagés volontaires allemands remonte à 37 %. Si on y ajoute les Autrichiens et les Hongrois, le recrutement « germanique » s’élève même à 42 % [141][141] Il s’agit du « groupe 2 » établi par le sil.. Durant ces deux années, la faiblesse numérique du recrutement permet d’entreprendre une « sélection effective» [142][142] DHPLE, 1 fp/C27, rapport 101 du sil, p. 6, mars 19.... La forte représentation germanique s’explique par les qualités militaires de ce contingent qui fait toujours « la meilleure impression » [143][143] SHD/DAT, 9N123 (1), extrait du rapport annuel du sil....

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Entre 1935 et 1936, la situation est exactement inverse à celle des deux années précédentes. Les engagés allemands sont plus nombreux en effectif, mais baissent considérablement en proportion. Leur représentation chute aux environs de 20 %. Le nombre des engagés volontaires de nationalité allemande ou autrichienne ne croît pas proportionnellement à l’augmentation générale des engagements. En 1937, les facilités accordées par le Reich à ses ressortissants pour se rendre à l’exposition universelle permettent quelques engagements. Toutefois, « les tableaux des effectifs et des nationalités montrent une diminution notable des pays qui, autrefois, procuraient le plus de monde, en particulier l’élément allemand » [144][144] SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour.... Désormais, le nombre d’engagés et le taux de proportion du contingent allemand coïncident.

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Le déclin du recrutement allemand est alors une évidence. Ce contingent devient même marginal en 1938. Il « est en régression très nette par rapport aux années précédentes et n’est plus que de 12 % à égalité avec le pourcentage de Polonais […]. Il convient également de remarquer que le nombre des engagés d’origine allemande (418) ne compense pas celui des libérés (484) » [145][145] SHD/DAT, 9N79 supplément, rapport du sil pour l’année 1938,.... Étant donné le faible pourcentage des Allemands qui arrivent à la Légion, les mesures prises par le Reich pour empêcher les engagements « paraissent avoir réussi en partie » [146][146] SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour....

Mutation du contingent

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Depuis 1934, les rengagements des légionnaires allemands connaissent aussi une déflation. À partir de l’été 1938, étant donné le sort qui leur est réservé, les légionnaires allemands se rengagent massivement. En 1939, le mouvement continue, et le contingent allemand est désormais un de ceux qui restent à la Légion. L’institution semble donc être redevenue un refuge pour eux. Ce changement a de multiples raisons. D’une part, les légionnaires concernés se sont engagés en 1933 et 1934. Ils avaient déjà de bonnes raisons de fuir le nouveau régime. L’évolution de la politique intérieure allemande ne les incite pas au retour. D’autre part, le décret de dénationalisation du mois de février 1939 a eu un impact favorable sur les rengagements [147][147] SHD/DAT, 1N70 (4) supplément, note 192-S/2 du général.... Les légionnaires allemands semblent ne plus oser rentrer dans leur pays. Ainsi, les autorités du Reich sont parvenues à tarir le recrutement de leurs ressortissants, mais leur propagande pour éviter les rengagements n’a que partiellement réussi. Il n’en reste pas moins que, depuis 1933, le contingent allemand de la Légion étrangère a inévitablement subi des mutations.

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Les motivations des candidats sont désormais bien différentes de celles des premières années après la Grande Guerre [148][148] SHD/DAT, 9N960 (1) supplément, note 115/S du capitaine.... Les aventuriers, élément le plus intéressant, sont peu nombreux. Ceux qui s’engagent pour des raisons économiques viennent parce qu’ils ne trouvent pas de travail en Allemagne à cause de leurs opinions. La véritable raison de leur engagement est donc d’ordre politique. De fait, l’arrivée de la grande majorité des Allemands est expliquée par leur opposition au régime. Aussi, ce contingent est-il constitué de communistes ou de socialistes qui n’ont pas voulu s’affilier au parti nazi et qui sont persécutés en raison de leurs idées. Desnazis tombés en disgrâce viennent également chercher refuge [149][149] SHD/DAT, 9N79 supplément, rapport du sil pour l’année 1938,.... Aussi, après juin 1934, quelques sa préfèrent-ils prendre la fuite plutôt que de rester en Allemagne où leur existence s’annonce pénible. À ces persécutions politiques, il convient d’ajouter celles pour des motifs religieux comme « les catholiques, éléments très bons […] qui ne peuvent s’entendre avec le régime actuel » [150][150] SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour.... « Du fait des décisions prises contre les individus de race non aryenne », les juifs constituent également une part croissante des ressortissants allemands [151][151] SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour.... Ils viennent à la Légion parce qu’ils sont chassés de leur pays [152][152] SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour....

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Les anciens légionnaires peuvent faire partie de l’une de ces catégories, mais ces candidats forment à eux seuls un groupe bien particulier. Il n’est pas nouveau de voir les anciens légionnaires s’engager après une interruption de service. Les vexations dont ils sont victimes suffisent à expliquer leur retour dans des proportions plus importantes. « Le légionnaire quitte la Légion comme il est venu, avec la même insouciance […] s’il est Allemand, après de nombreux déboires, il finit par revenir sous un autre nom » [153][153] André Raulet, Légion über Alles !, éd. Lavauzelle,.... Le retour des anciens légionnaires et l’accomplissement d’un temps de service plus long modifient la structure du contingent allemand. Désormais, il est plus âgé et participe encore davantage à l’encadrement des unités. Entre 1934 et 1939, l’évolution est sensible. En cinq ans, alors que le taux de représentation du contingent a été divisé par deux, le nombre des sous-officiers d’origine allemande a augmenté d’environ soixante et celui des gradés d’encadrement de presque deux cents.

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Durant l’entre-deux-guerres, les relations entre la Légion étrangère et l’Allemagne sont à la fois complexes et paradoxales.

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Le recrutement est un enjeu dont la complexité résulte du changement qui intervient dans les premières années du Troisième Reich. Au début, dans l’immédiat après-guerre, les ressortissants allemands constituent le vivier des personnels dont la Légion a besoin pour renaître. La République de Weimar s’avère incapable d’endiguer réellement le flux des Allemands qui viennent s’engager en grand nombre. Puis, l’arrivée d’Hitler au pouvoir inverse la donne. L’efficacité des persécutions mises en place par le régime et le « relèvement de la nation » suscitent de moins en moins de vocations de légionnaires. En proportion, le recrutement « germanique » baisse considérablement à partir de 1934 pour être presque marginal en 1938. Inévitablement, le contingent allemand change de physionomie. Dans ce conflit qui ne porte pas de nom, ne peut-on pas dire finalement que face à l’Allemagne, la Légion a perdu « la bataille du recrutement » ?

A priori non, et c’est là le paradoxe que nous évoquions précédemment. D’une part, les mesures prises par le régime nazi qui provoquent le « départ » du contingent allemand ne sont-elles pas finalement une aubaine ? À l’heure de la montée des totalitarismes, une trop forte proportion d’Allemands n’aurait-elle pas pu avoir de lourdes conséquences sur le loyalisme de la troupe ? D’autre part, l’action subversive de l’Allemagne, dont le but est de faire capituler l’adversaire sans combattre en provoquant une crise du recrutement, produit les effets inverses à ceux recherchés. Elle oblige la Légion à adapter ses structures, son organisation et son fonctionnement, mais surtout à placer « M. Légionnaire » au centre de ses préoccupations. Désormais, être légionnaire n’est plus un « statut » mais un « état » [154][154] Le code d’honneur du légionnaire qui a été formalisé.... L’aboutissement de cette nouvelle conception est le développement de la « solidarité Légion » qui existe toujours au xxie siècle et fait la force de l’institution.

Notes

[1]

L’Illustration, n° 3905, 5 janvier 1918, p. 8.

[2]

Douglas Porch, La Légion étrangère, 1831-1962, Paris, Fayard, 1994, 844 p., p. 447.

[3]

Le concept de l’engagement volontaire pour la durée de la guerre (evle) a été mis en place en juillet 1870. L’urgence de la situation nécessite que les volontaires ne s’engagent pas pour une durée déterminée, comme c’est l’usage, mais uniquement pour le temps que dure le conflit. Ce type de contrat inédit est ensuite abandonné pendant plus de quarante ans. Blaise Cendrars est l’un de ces légionnaires occasionnels ou de circonstance. Il ne se définit pas comme un militaire, mais comme un volontaire « prêt à aller au bout de ses actes » (Blaise Cendrars, La Main coupée, éd. Folio, 2005, 445 p., p. 158, 267 et 299).

[4]

Colonel Maire, Nouveaux souvenirs sur la Légion étrangère, Paris, éd. Albin Michel, 1948, 211 p., p. 22.

[5]

Notamment par le régiment de marche de la Légion étrangère (rmle) qui arbore à la cravate de son drapeau non seulement une croix de guerre avec neuf citations, mais aussi la médaille militaire et la Légion d’honneur. De même, le 3e bataillon du régiment de marche d’Afrique qui se bat en Orient est cité à trois reprises.

SHD/DAT, 3H697, lettre du colonel Martin commandant le 2e régiment étranger, 23 mars 1923.

[6]

La première Légion est celle de 1831-1835, qui a été cédée à Marie-Christine d’Espagne.

[7]

Gaston Moch, La Question de la Légion étrangère, éd. Bibliothèque-Charpentier, 1914, 385 p., p. 59.

[8]

Le 25 septembre 1908, cinq légionnaires déserteurs dont trois Allemands, sont appréhendés juste avant leur embarquement sur un navire allemand dans le port de Casablanca. L’un d’eux étant reconnu par un fonctionnaire, une rixe s’ensuit, et des violences sont portées à l’encontre de deux agents consulaires qui, normalement, sont pourvus de l’immunité diplomatique. Quant aux déserteurs, ils sont arrêtés.

[9]

SHD/DAT, 3H259, note 5 du lieutenant-colonel Maurel commandant le 4e régiment étranger au Résident général, 17 janvier 1921.

[10]

Hubert Jacques, L’Allemagne et la Légion, éd. Libraire Chapelot, 1914, 176 p., p. 61.

[11]

Gaston Moch, op. cit., p. 5. L’auteur de cet article est rédacteur en chef de plusieurs journaux : Die grossere Deutschland et La Gazette du Rhin et de Westphalie.

[12]

Maurice Paléologue, Au quai d’Orsay à la veille de la tourmente, Journal, 1913-1914, Paris, éd. Plon, 1947, 329 p., p. 27.

[13]

Jacques Bainville, Histoire de deux peuples, continuée jusqu’à Hitler, Paris, Arthème-Fayard, 1947, 252 p., p. 239.

[14]

Colonel Maire, op. cit., p. 210.

[15]

Selon les estimations, il y aurait environ 12 000 légionnaires en 1913.

[16]

SHD/DAT, 7N144, note 1838-1/11, 25 janvier 1919. Cette note relative au renvoi immédiat dans leurs foyers des engagés volontaires étrangers pour la durée de la guerre précise que les soldats qui en feront la demande « sont autorisés dès maintenant à solliciter leur renvoi immédiat dans leurs foyers ».

dhpl, 1-FP/C22, rapport du lieutenant-colonel Rollet sur le moral de la troupe, mars 1919.

[17]

SHD/DAT, 7N381, rapport du lieutenant-colonel Rollet au sujet du rmle, transmis par le Résident général à la section Afrique de l’état-major des armées, note 220, 20 décembre 1919.

[18]

SHD/DAT, 6N112, télégramme 44, 17 janvier 1919.

[19]

SHD/DAT, 6N112, télégramme 2080, 21 avril 1919.

[20]

SHD/DAT, 3H95, télégramme 3867 bg, 17 juillet 1919.

SHD/DAT, 6N112, télégramme 2080, 21 avril 1919.

[21]

SHD/DAT, 3H259, note sur le recrutement de la Légion étrangère, sans service émetteur ou récepteur, mais postérieure à juillet 1919.

[22]

SHD/DAT, 3H259, note de service 3125, 27 décembre 1919.

[23]

Ibid.

[24]

SHD/DAT, 6N112, télégramme 54 du commissaire résident général à la section Afrique de l’état-major du ministère de la Guerre, 29 décembre 1920.

[25]

SHD/DAT, 3H95, note 347 du général Cottez, commandant provisoirement les troupes d’occupation au Maroc, au ministre de la Guerre, 12 août 1920.

[26]

SHD/DAT, 7N381, bordereau d’envoi 9455-1/11, 8 novembre 1919.

[27]

SHD/DAT, 6N112, télégramme 380/CMC, 18 novembre 1918.

SHD/DAT, 6N112, télégramme 44, 17 janvier 1919.

[28]

SHD/DAT, 6N112, télégramme 6/cmc, 25 janvier 1919.

[29]

La loi du 5 août 1915 interdit l’engagement à la Légion étrangère des sujets appartenant aux puissances ennemies.

[30]

SHD/DAT, 8N42, lettre 1911-1/11 du ministre de la Guerre aux commandants des régions militaires frontalières, 21 avril 1920.

[31]

DHPLE, 1-FP/C22, note 497/cm du ministère de la Guerre au Résident général, 23 février 1920.

DHPLE, 1-FP/C22, lettre de l’intendant général de l’armée du Rhin au général commandant l’armée du Rhin, 12 janvier 1920. À titre d’exemple, entre le 1er mai 1919 et le 1er octobre de la même année, il n’y eut que 38 engagements dans la zone de l’armée du Rhin. Il y en a 208 entre le 1er octobre et le 12 janvier 1920.

[32]

SHD/DAT, 3H365, note 4100-9/11 de la section d’Afrique au 1er bureau de l’état-major de l’armée, 27 septembre 1920.

[33]

Il y a alors 5 500 légionnaires au Maroc, alors que l’effectif initialement prévu est de 3 500 légionnaires.

[34]

DHPLE, 1-FP/C22, lettre manuscrite, 19 janvier 1920.

[35]

SHD/DAT, 3H259, note 54209-9/11 du ministre de la Guerre au ministre des Affaires étrangères, 29 décembre 1920.

[36]

SHD/DAT, 3H259, note 20415/S du général de division Bonneval, commandant provisoirement le 19e corps d’armée, à la section d’Afrique, 1er décembre 1920.

[37]

DHPLE, 1-FP/C22, note 8892 du lieutenant-colonel Rollet à la section d’Afrique, 18 août 1920.

[38]

SHD/DAT, 3H259, lettre du lieutenant-colonel Rollet au colonel Delmas, 24 juin 1920.

SHD/DAT, 7N2633 (1). Extrait de la brochure Über Propaganda du capitaine von Wallenberg, fascicule de mars 1922 de la revue Militärwissenchaftliche Mitteilungen. « Lorsque je veux qu’un grand nombre d’hommes pensent et agissent dans un sens déterminé, je dois leur faire apparaître sous un jour favorable ces pensées et ces actes. C’est ce que l’on appelle la propagande. »

[39]

MAE, carton Z 417, note pour la direction des affaires administratives et techniques, 4 novembre 1921.

[40]

SHD/DAT, 7N22054 (1), renseignement 9649, 24 mars 1930. La conférence puis les accords de Locarno visent à stabiliser la situation entre l’Allemagne et les autres États. Les accords portent sur la reconnaissance de la frontière ouest de l’Allemagne, la démilitarisation de la zone rhénane et l’entrée de l’Allemagne à la Société des Nations (sdn) où elle obtient un siège de membre permanent.

[41]

SHD/SHM, 1BB3.22, compte rendu trimestriel de renseignement concernant la propagande allemande d’après l’étude de la presse, janvier-mars 1928.

[42]

SHD/SHM, 1BB3.22, compte rendu trimestriel de renseignement concernant la propagande allemande d’après l’étude de la presse, 1er septembre-30 novembre 1928.

[43]

SHD/SHM, 1BB8.239, compte rendu trimestriel de renseignement concernant la propagande allemande d’après l’étude de la presse, 31 décembre 1931.

[44]

Ibid.

[45]

La fréquence de la réunion des officiers d’information est difficile à déterminer. Le rapport 174.M du SIL tend à laisser croire que cette « pratique idéale » n’est pas systématique : « Il y aurait avantage à tenir les centres de groupement des candidats au courant des modifications survenant dans la garde des frontières et à inciter les centres à tenir compte de ces modifications dans les itinéraires à conseiller aux candidats sérieux. Une visite annuelle orientée dans ce sens serait nécessaire » (DHPLE, 1-FP/C24, « La Légion étrangère au cours de l’année 1929 », 30 mars 1930).

SHD/DAT, 7N992 (1) supplément, note sur les modifications à apporter aux modalités actuelles sur le recrutement germanique de la Légion, 18 juin 1928.

[46]

Ibid. « C’est ainsi que dans le courant de novembre et décembre, on put reconnaître que de tous les volontaires mis en route d’Höchst sur Winden, aucun n’arrivait à destination. Il en fut de même, à un autre moment, entre Landau et Sarreguemines. »

[47]

SHD/DAT, 7N2590, note 1366/am de l’attaché militaire à Berlin au ministre de la Guerre, 26 septembre 1932.

[48]

SHD/DAT, 7N22128 (3), renseignement 4396-scr-2/11, 8 juillet 1932.

[49]

SHD/DAT, 7N22122 (1), renseignement 185/z-sdo au sujet des poursuites exercées contre les anciens légionnaires ayant servi à la Légion pendant la guerre, 6 juin 1929.

[50]

SHD/DAT, 7N22054 (1), Deutsche Wehr, 4 septembre 1931.

[51]

SHD/DAT, 7N992 (1) supplément, note sur les modifications à apporter aux modalités actuelles du recrutement germanique à la Légion étrangère, 18 juin 1928.

[52]

SHD/DAT, 7N20254 (1), renseignement 642-scr-2/11, 10 février 1931.

[53]

SHD/DAT, 7N22054 (1), Deutsche Wehr, 4 septembre 1931.

[54]

SHD/DAT, 7N22122 (1), renseignement 6673-scr-2/11, 5 octobre 1931.

[55]

SHD/SHM, compte rendu de renseignement concernant la propagande allemande d’après l’étude de la presse, 31 décembre 1931.

[56]

SHD/DAT, 7N22054 (2), rapport du chef d’escadron Lano au colonel gouverneur militaire de Dunkerque, 21 septembre 1932.

[57]

SHD/DAT, 7N992 supplément, note 1235-9/11 de la section d’études au 1er bureau de l’état-major de l’armée, 21 mai 1928.

[58]

SHD/DAT, 3H259, rapport du chef de bataillon Augier, 3 octobre 1920.

[59]

Pierre Soulié, Paul-Frédéric Rollet, père de la Légion, éd. Italiques, 2001, 736 p., p. 402.

[60]

SHD/DAT, 7N2348, note sur les modifications à apporter à l’organisation du dépôt de Marseille, 1er juin 1928.

[61]

SHD/DAT, 7N992 supplément, note 1235-9/11 de la section d’études au 1er bureau de l’état-major de l’armée, 21 mai 1928.

[62]

SHD/DAT, 7N928 (1) supplément, note 2473 du bureau renseignements et propagande de l’état-major de l’armée du Rhin au ministre de la Guerre et des Pensions, 26 mars 1924.

[63]

SHD/DAT, 7N928 (1) supplément, note 2820 du ministre des Affaires étrangères au ministre de la Guerre et des Pensions, 19 décembre 1923.

[64]

SHD/DAT, 7N928 (1) supplément, projet de note accompagnant les prospectus, le ministre de la Guerre aux attachés militaires, sans date mais probablement de l’automne 1920.

[65]

SHD/DAT, 7N928 (1) supplément, « Le Légionnaire à la Légion étrangère », 1er août 1920, 88 p.

[66]

SHD/DAT, 7N989 (5) supplément, note 456-scr-2/11 de la section de centralisation des renseignements à l’attaché militaire près l’ambassade de France à Berne, 5 février 1930.

[67]

SHD/DAT, 7N989 (5) supplément, bordereau 1036-9/11 du ministère de la Guerre pour le cabinet du ministre, 1er mai 1928.

[68]

Cooper, Douze ans à la Légion étrangère, éd. Payot, 1934, 270 p., p. 174.

[69]

Prince Aage de Danemark, Mes souvenirs de la Légion étrangère, éd. Payot, 1936, 214 p., p. 105.

[70]

DHPLE, 1-FP/C26, rapport sur l’état d’esprit du 1er régiment étranger pour l’année 1932, 1er décembre 1932.

[71]

Pierre Mac Orlan, Légionnaires, Éd. du Capitole, 1930, 210 p., p. 71 et 72.

[72]

SHD/DAT, 9N960 (1) supplément, note 3121-9/11 de la section d’étude de l’état-major des armées à la direction du service de santé, 15 novembre 1929.

[73]

SHD/DAT, 7N2664 (3), note VI 5212 du ministère de l’Intérieur allemand en vue de combattre les enrôlements dans la Légion étrangère, 7 novembre 1922.

[74]

SHD/DAT, 7N22122 (3), renseignement 5304-scr-2/11, 31 octobre 1928. Extrait du Kölnische Zeitung du 16 octobre 1928.

[75]

SHD/DAT, 7N22054 (1), Hagener Zeitung, 31 mars 1930.

[76]

SHD/DAT, 7N992 supplément, note sur les modifications à apporter aux modalités actuelles du recrutement germanique à la Légion, 18 juin 1928.

[77]

SHD/DAT, 7N992 (1) supplément, note 3232bis-9/11, 25 novembre 1929.

[78]

SHD/DAT, 7N22054 (1), Mainzer Anzeiger, 10 août 1931.

[79]

SHD/DAT, 7N22054 (1), lettre de Wilhlem Marx au légionnaire Lieder, octobre 1929.

[80]

SHD/DAT, 7N992 (1) supplément, note 3232bis-9/11, 25 novembre 1929.

[81]

Capitaine Poirmeur, Notre vieille Légion, éd. Berger-Levraut, 1931, 317 p., p. 20.

[82]

SHD/DAT, 7N12054 (1), Pirmasenser Zeitung, 29 janvier 1931.

[83]

SHD/DAT, 7N22122 (3), lettre de M. Anton Giersen à son neveu, le légionnaire Giersen, 2 novembre 1929.

SHD/DAT, 7N22086 (1), lettre de M. Bayer à son frère, légionnaire au 1er régiment étranger, 12 mars 1927.

[84]

SHD/DAT, 7N22125, lettre de M. Pfennig à son fils, légionnaire à l’instruction, 28 juillet 1929.

[85]

Heinz Weil-Bernard, Contre-moi de la tyrannie…, Nouvelles Éditions latines, 1991, 234 p., p. 58.

[86]

Georges Manue, Têtes brûlées, éd. La Nouvelle Société d’édition, 1929, 283 p., p. 13.

[87]

SHD/DAT, 7N2314, note 1987-9/11 de la section d’études au sujet de la crise des effectifs de la Légion étrangère et des besoins approximatifs en 1925 et 1926, 22 juillet 1925.

[88]

SHD/DAT, 3H697, note du colonel Rollet commandant le 1er régiment étranger au général commandant supérieur des troupes du Maroc, 4 mars 1926.

[89]

Pierre Mac Orlan, Légionnaires, Éd. du Capitole, 1930, 210 p. p. 199.

[90]

SHD/DAT, 7N992 supplément, note sur les modifications à apporter aux modalités actuelles du recrutement germanique de la Légion, 18 juin 1928. Ce centre est l’un des points principaux par lequel transitent les volontaires allemands. En 1928, 67 % des candidats du centre sont allemands et 74 % germaniques (en incluant les Autrichiens et les Sarrois). Par ailleurs, en 1927, 60 % des légionnaires allemands qui ont été engagés sont passés par ce centre.

[91]

DHPLE, 1-FP/C23, rapport du capitaine Deschamps, commandant la 6e compagnie du 3e régiment étranger, 1924. « Le contingent de la compagnie comprend 60 % d’Allemands ».

[92]

SHD/DAT, 7N2348 (1), note 172/ES du 1er bureau de l’état-major des armées, 8 juillet 1926.

[93]

DHPLE, 1 FP/C24, rapport du sil pour l’année 1929.

[94]

Ibid. Cette année-là, de nombreux francophones (30 %) et Italiens (18,6 %) viennent s’engager.

[95]

SHD/DAT, 7N1011 supplément, rapport du sil pour l’année 1930.

[96]

SHD/DAT, 7N1011 supplément, rapport du sil pour l’année 1932.

[97]

Souvenons-nous qu’en 1920, le ministre de la Guerre écrivait à son homologue des Affaires étrangères que « les provinces rhénanes fournissent à la Légion étrangère un contingent supérieur à celui qu’il estime possible et désirable d’incorporer dans les unités d’Algérie et du Maroc ». (SHD/DAT, 3H259, note 54209-9/11, 29 décembre 1920).

[98]

Ibid.

[99]

SHD/DAT, 7N22054 (2), L’Ami du peuple, 12 mai 1933. Il s’agit d’un article du colonel en retraite von Ditfurth publié dans Deutschwehr. Selon le journal, cet officier serait l’auteur d’un livre assez virulent contre la Légion.

[100]

Ibid.

[101]

SHD/DAT, 7N22054 (2), renseignement 17003 du 29 mars 1933, enregistré le 10 avril à la scr, papier 487 du carton.

[102]

SHD/DAT, 7N2591, note 273/am de l’attaché militaire à Berlin au ministre de la Guerre, 28 mars 1933.

[103]

SHD/DAT, 7N22054 (2), renseignement de presse 40/Pr. de la sr, 25 février 1933. Der Arbeitdienst, février 1933.

SHD/DAT, 7N22054 (2), renseignement 17003 du 29 mars 1933, enregistré le 10 avril à la scr, papier 487 du carton.

[104]

Le Geheime Staatspolitische Amt est plus connu sous le nom de Gestapo.

[105]

SHD/DAT, 7N22128 (2), renseignement 3443-scr-2/11, 17 mai 1933. Dans la durée, les actions proposées par cet organisme s’avèrent extrêmement cohérentes. La note marque non pas une action à mener instantanément, mais le déroulement d’une méthode qui s’inscrit étape après étape.

[106]

SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour l’année 1933.

[107]

SHD/DAT, 7N22054 (2), Der Tag, 1er octobre 1933.

[108]

SHD/DAT, 7N22054 (2), renseignement 6865-scr-2/11, 18 octobre 1933. Le numéro du Völkischer Beobachter est paru les 8 et 9 octobre. Il s’agit donc d’une fusion entre la Ligue de protection contre la Légion étrangère (Schutzverband gegen die französische Fremdenlegion) et la Ligue de combat contre la Légion étrangère (Kampfbund gegen die Fremdenlegion). Il est intéressant que le nom de la nouvelle association (Kampfbund gegen die französische Fremdenlegion) reprenne en partie les termes de cette ligue, mais qu’elle définisse plus nettement l’adversaire en précisant « französische ».

[109]

SHD/DAT, 7N22122 (1), renseignement 7548-scr-2/11, 21 novembre 1934.

[110]

SHD/DAT, 7N22054 (2), Berliner Börsen Zeitung, 21 décembre 1933. Cette mesure a été prise en vertu du décret pour la protection du peuple et de l’État en date du 28 février 1933.

[111]

SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour l’année 1935, p. 10.

[112]

SHD/DAT, 7N22128 (2), renseignement 2062-bsle au chef du sea, 24 septembre 1937.

[113]

SHD/DAT, 7N22100 (1), renseignement 218-bsle à la scr, 27 janvier 1939. Il s’agit d’un extrait du Glaube und Tat (Foi et Action), un almanach chrétien (protestant) destiné aux formations de jeunesse, qui a été envoyé aux légionnaires par des pasteurs à l’occasion de Noël.

[114]

SHD/DAT, 7N22100 (1). Ce paragraphe, probablement rédigé en communiqué de presse par le ministère de la Propagande, se retrouve mot pour mot aussi bien dans le Völkische Beobachter que dans le Fränkische Tageszeitung du 22 février 1939 (renseignements 506-bsle du 3 mars 1939 et 561 du 8 mars 1939).

[115]

SHD/DAT, 7N22054 (2), note 5890-2-scr-ema, extrait de la loi du 28 juin 1935 portant modification du code pénal allemand, août 1935.

[116]

Il est évident que la loi dont il est bientôt question ne vise pas les légionnaires en particulier, mais les concerne en premier lieu.

[117]

SHD/DAT, 7N22100 (1), renseignement de presse du 23 février 1939.

[118]

SHD/DAT, 7N22122 (2), analyse de presse 31326 au sujet des mesures prises par le ministre de l’Intérieur du Reich concernant les Légionnaires, 3 mars 1939.

[119]

SHD/DAT, 2R45, note 34119HC/SUR/SAT du chef du service de la sûreté à l’ambassadeur de France haut-commissaire de la République en Allemagne, 25 juillet 1952. La question de la perte de la nationalité des légionnaires allemands ressurgit en 1952. Les légionnaires allemands sont toujours l’objet de tracas au sujet de leur appartenance à la nation allemande. En exécution des instructions du ministre badois de l’Intérieur, la police convoque six anciens légionnaires ayant servi dans la Légion avant le 8 mai 1945. L’agent raye « sur leur Kennkarte la mention “nationalité allemande” pour porter l’annotation “nationalité indéterminée”. Les directives mentionnent en outre qu’à partir du 8 mai 1945, l’entrée à la Légion étrangère n’a plus donné lieu, en aucun cas, au retrait de la nationalité. Le cas de chaque légionnaire sera examiné spécialement […]. En ce qui concerne Baden-Baden, cent soixante cas environ seraient à examiner […]. Il est évident que les ex-légionnaires considèrent cette mesure comme étant une brimade et craignent qu’il en résulte ultérieurement des difficultés relatives à leur séjour en Allemagne et à leur emploi dans l’économie allemande ».

[120]

SHD/DAT, 7N22106 (2), note du cabinet du préfet de Moselle au général commandant la 20e région militaire, 3 juin 1937.

[121]

SHD/DAT, 7N22106 (2), note 2186 du général de division Requin commandant la 20e région au ministre de la Guerre et de la Défense nationale, 25 juin 1938.

[122]

SHD/DAT, 7N22106 (2), rapport 10/S du capitaine Perrossier commandant l’annexe du dépôt de transition de la Légion étrangère à Toul, s.d., mais antérieure au 10 mars 1938.

[123]

SHD/DAT, 3H236, note 2065-9/ema du ministre de la Défense nationale et de la Guerre au ministre de l’Intérieur, 6 mai 1938.

[124]

SHD/DAT, 3H236, note D-18 du ministre de l’Intérieur au ministre de la Défense nationale et de la Guerre, 25 mai 1938.

[125]

SHD/DAT, 7N2348 (3), document émanant du sil intitulé, « La libération — L’organisation de l’entraide — Le rôle du sil », 20 février 1933.

[126]

DHPLE, 1-F.P./C.24, rapport du sil pour l’année 1929, p. 14.

[127]

SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour l’année 1934, p. 20.

[128]

SHD/DAT, 7N2348 (3), document émanant du sil intitulé, « La libération — L’organisation de l’entraide — Le rôle du sil », 20 février 1933.

[129]

Idem.

[130]

Georges Manue, Têtes brûlées, op. cit., p. 247.

[131]

SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour l’année 1932, p. 11.

[132]

SHD/DAT, 7N1009 (3) supplément, lettre d’Élie Rambaud au capitaine Goudard de la section d’études, 2 février 1934.

[133]

SHD/DAT, 7N1009 (3) supplément, programme de l’inauguration. Notons que l’image de ce dernier ne représente pas le centre mais un portrait du général Rollet dessiné par Benigni.

[134]

SHD/DAT, 7N1009 (3) supplément, note 69 du capitaine Rollin au chef de la sr-scr, 7 février 1934.

[135]

SHD/DAT, 7N1009 (3) supplément, lettre de M. Rambaud au capitaine Pasteur, 20 juin 1936.

[136]

SHD/DAT, 7N1009 (3) supplément, lettre et reportage photographique de M. Rambaud au colonel de Monsabert, chef de la section d’outre-mer, 12 septembre 1936.

[137]

La Légion étrangère, revue mensuelle illustrée. Militaire et coloniale, n° 2, juillet-août 1937, p. 38.

[138]

SHD/DAT, 7N1011 supplément et 9N79 supplément, rapports du SIL de 1932 à 1938. Les Autrichiens et les Tchécoslovaques ne sont pas pris en compte dans les graphiques. Entre 1933 et 1938, ils sont trois mille deux cent onze Allemands à s’engager sur un total de quinze mille huit cent quarante et une recrues, soit 20,2 %.

[139]

SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour l’année 1934, p. 15.

[140]

SHD/DAT, 7N4041 (2), rapport 900/srd du colonel Azan commandant par intérim le 1er régiment étranger sur l’état d’esprit du régiment pour l’année 1935, p. 21, 7 décembre 1935.

[141]

Il s’agit du « groupe 2 » établi par le sil.

[142]

DHPLE, 1 fp/C27, rapport 101 du sil, p. 6, mars 1934.

[143]

SHD/DAT, 9N123 (1), extrait du rapport annuel du sil de 1932 mis à la disposition de la section études de l’ema, 27 mai 1933.

[144]

SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour l’année 1937, p. 18.

[145]

SHD/DAT, 9N79 supplément, rapport du sil pour l’année 1938, p. 37.

[146]

SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour l’année 1935, p. 10.

[147]

SHD/DAT, 1N70 (4) supplément, note 192-S/2 du général commandant le 19e corps d’armée au 2e bureau de l’état-major de l’armée, 8 mars 1939.

[148]

SHD/DAT, 9N960 (1) supplément, note 115/S du capitaine commandant l’annexe de Toul à la direction de l’infanterie, 4 décembre 1935. « Parmi les candidats allemands, il y en a un certain nombre qui, pour venir en France, ont parcouru à pied plusieurs centaines de kilomètres, sans repos, et qui, pendant de longues étapes qu’ils viennent de faire, n’ont pu se procurer qu’une alimentation absolument insuffisante ».

[149]

SHD/DAT, 9N79 supplément, rapport du sil pour l’année 1938, p. 5, 6 et 7.

[150]

SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour l’année 1937, p. 6 et 7.

[151]

SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour l’année 1935.

[152]

SHD/DAT, 7N1011 (2) supplément, rapport du sil pour l’année 1935 et, 7N4041 (3), rapport 517/srd du colonel Azan commandant le 1er régiment étranger sur l’état d’esprit du régiment pour l’année 1936, p. 21, 21 décembre 1936.

[153]

André Raulet, Légion über Alles !, éd. Lavauzelle, 1934, 176 p., p. 159.

[154]

Le code d’honneur du légionnaire qui a été formalisé dans les années 1980 mais trouve sa source dans le Mémento du soldat de la Légion de 1937 est très clair. L’un des articles stipule : « Fier de ton état de légionnaire, tu le manifestes. »

 

Pour citer cet article

Neviaski Alexis, « 1919-1939 : le recrutement des légionnaires allemands », Guerres mondiales et conflits contemporains 1/2010 (n° 237) , p. 39-61
URL : www.cairn.info/revue-guerres-mondiales-et-conflits-contemporains-2010-1-page-39.htm.
DOI : 10.3917/gmcc.237.0039.


Traduction

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