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Le repas du guerrier 18122010

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18.12.10

Les talibans sont juste derrière la montagne, mais ça aurait pu être des Viêt-congs planqués dans la jungle, des fellagas embusqués dans les Aurès ou des Argentins débarqués aux Malouines.

La journée a été rude, les combats ont duré jusqu'à la nuit et la fatigue le dispute à la faim dans le corps des hommes. Le soldat n'a plus que deux envies : manger et rentrer à la maison. Il revient alors à l'intendance de satisfaire la première pour faire oublier la seconde, le temps d'un repas. C'est l'heure de la ration de combat, du MRE (Meal Ready-to-Eat, repas prêt à manger) pour les Américains. Chaque armée a les siennes et le fantassin ukrainien ne se nourrit pas comme l'artilleur espagnol. Ashley Gilbertson a profité de la guerre en Afghanistan – 47 pays engagés – pour photographier l'ordinaire des membres de la coalition.

La ration tient en peu de place. La nature du terrain et la nécessité d'en porter plusieurs dans son barda en sus de l'arsenal militaire interdisent la nappe et le couvert. Déshydratation, lyophilisation, compression, aromatisation sont les maîtres mots de la cuisine de guerre. D'où une multitude de boissons en poudre : soupes, chocolat, café, lait, thé, jus de fruits de différents parfums (fraise et framboise pour les Britanniques, citron vert pour les Américains, citron pour les Français, orange pour les Polonais et les Ukrainiens, exotique pour les Allemands). Il semble acquis que l'eau potable est toujours disponible pour réaliser ces breuvages.

De même, la troupe dispose d'un système pour réchauffer ses aliments. Il s'agit d'une sorte de sucre incandescent qu'il suffit d'allumer dans sa petite boîte métallique et qui va réchauffer la ration, posée dessus comme sur un chauffe-plat. " Nos soldats mangent chaud ", m'a-t-on assuré au ministère de la défense. Le même principe est en vigueur dans toutes les armées.

La fonction première de cette ration de combat étant de reconstituer la force de travail, les denrées énergétiques y figurent en bonne place et sans cache-sexe : comprimés de glucose pour les Espagnols, bonbon à la vitamine C pour les Polonais… A l'exception du contingent danois, tous sont traités aux fruits secs mélangés à d'autres douceurs ou en nougat, barres, gâteaux et biscuits. Très important, le biscuit dans la diététique militaire. Salé, il fait office de pain – à l'avoine pour les Suédois et les Britanniques, en crackers chez les Allemands, les Italiens et les Polonais, voire en tortilla pour les Américains, soucieux de satisfaire les nombreux Latinos de l'US Army. Sucré, il accompagne les nombreuses pâtes de fruits, confitures ou puddings inscrits au menu, dont l'essentiel reste bien sûr le plat principal.

"EXPRESS DE COMBAT"

A lui de remplir l'estomac et si possible de soigner le moral en offrant " le goût du pays ". Le civil imagine mal en effet le plaisir du légionnaire dégustant aux abords de Kandahar un cassoulet (saucisse, confit de canard, haricots) comme à Castelnaudary, celui du soldat de Sa Gracieuse Majesté découvrant son omelette au bacon et son curry d'agneau, celui du bersagliere avalant ses tortellinis en pensant à la mamma.

La joie du GI réchauffant ses pork ribs avec leur sauce BBQ, celle du caporal de la Bundeswehr face à son goulasch aux patates ou celle de son camarade sud-coréen devant son kimchi sauté (légumes, piments macérés et fermentés). Même l'officier ukrainien a le moral qui remonte avec son porridge au bœuf et à l'orge. Pour lui, les harengs " européens " sont à l'huile mais le maquereau italien est à l'huile d'olive.

Le souci du confort des troupes est sensible à quelques détails : un peu de beurre de cacahouètes pour l'Américain, un caramel pour le Français, du Tabasco pour le British, un chewing-gum pour l'Américain, l'Allemand, le Polonais, le Norvégien, l'Espagnol, le Britannique. L'Italien bien sûr, le Français, l'Américain et quelques autres peuvent se remonter à l'"express de combat". Il suffit de se jeter toute la poudre (café instantané, sucre et lait, éventuellement) dans la bouche et de rincer avec de l'eau. Cela donne le goût du petit noir (ou du crème) aux confins du Helmand…

Outre la qualité de ses plats, l'armée italienne se distingue sur le plan de l'hygiène. Les rations de tous les pays sont bien sûr accompagnées d'une serviette – humide ou non, parfumée ou non – semblable à celle des plateaux d'avion, mais seuls les Danois et les Italiens disposent de cure-dents. Trois par repas avec en plus trois minibrosses à dents pour ces derniers. Berlusconi veille à l'hygiène buccale de ses troupes.

Un jour ou l'autre, tous ces soldats se croisent et comparent leurs menus. Ashley Gilbertson rapporte que la ration française était généralement la plus prisée (cassoulet, pâté de chevreuil et nougat) et pouvait s'échanger contre cinq rations américaines. Il vient cependant d'apprendre d'un journaliste de retour d'une opération avec les Français que certains d'entre eux cherchent à récupérer des rations américaines (hamburger, chili, peanut butter, bonbons) jugées "plus fun". A l'heure où le "repas gastronomique des Français" vient d'entrer au patrimoine de l'Unesco, il faut réagir, mon colonel !

Découvrez le portfolio qui accompagne cet article paru dans Le Monde Magazine daté 18 décembre sur LeMonde.fr.

J.P. Géné

Traduction

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