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Le torchon brûle entre Le Drian et les chefs militaires

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Le Point.fr - Publié le 03/01/2013 par

Le ministre de la Défense veut revenir sur les décrets définissant le rôle du chef d'état-major des armées. Ça coince très sérieusement...

Jean-Yves Le Drian visite le 3e RIMA à Vannes © Destoc / Le Télégramme/Maxppp 

 

Pour le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, nommé le 16 mai 2012, c'est déjà la fin de l'état de grâce. De grosses tensions se sont fait jour avec la hiérarchie militaire. Alors que le Livre blanc promet des lendemains difficiles, que confirmeront très vite la loi de finances 2014 et la future loi de programmation militaire, la gouvernance du ministère est mise en cause, de même qu'un gros programme de réformes structurelles.

Dans l'esprit des socialistes définissant actuellement la future politique de défense, qui sont le plus souvent membres du cabinet civil du ministre appuyés par un certain nombre de CGA (contrôleurs généraux des armées), la situation peut se résumer de manière simple : les réformes conduites sous Nicolas Sarkozy pour renforcer le rôle et la fonction du chef d'état-major des armées (CEMA) se sont traduites par une forme de prise de pouvoir du premier des militaires français. L'amiral Édouard Guillaud, chef d'état-major des armées, n'est pas attaqué personnellement ; mais l'exercice de sa fonction définie par les décrets de 2005 (Décret n° 2005-520 du 21 mai 2005) et 2009 (Décret 2009-869 du 15 juillet 2009) est mise en cause : "Le CEMA se voit comme un aubergiste qui "hébergerait" le ministre dans ses murs, entend-on chez Le Drian. Ce n'est pas notre conception." Le décret de 2009 précise par exemple les points suivants : "Sous l'autorité du ministre de la Défense, le chef d'état-major des armées est responsable : 1. de l'organisation interarmées et de l'organisation générale des armées ; 2. de l'expression du besoin en matière de ressources humaines civiles et militaires des armées et des organismes interarmées. Il participe à la définition de la politique des ressources humaines du ministère. Au sein des armées et des organismes interarmées, il est responsable de la mise en oeuvre de cette politique, de la condition militaire et du moral." Or il est aujourd'hui très clair que, sur ces points, Le Drian et ses hommes veulent prendre la main. Et pas sur des détails...

"Restaurer la primauté du politique"

Cette réalité est précisée explicitement dans un courrier du ministre à Jean-Marc Ayrault, en date du 21 septembre dernier. Le Drian y affirme sa volonté de "restaurer dans ce ministère la primauté du politique". On ne savait pas qu'elle aurait été contestée par un seul militaire français depuis le putsch d'avril 1961, mais chez Le Drian, on pense autrement... Plus précisément, poursuit le ministre, "il est désormais indispensable que l'effort ne porte plus pour l'essentiel sur les unités opérationnelles, au détriment, qui plus est, de leur efficacité. (...) Les travaux engagés doivent aboutir à recentrer le plus possible les administrations centrales dans un rôle de conception, d'animation, d'orientation, d'évaluation et de contrôle." Aux yeux du politique, le pouvoir lui revient sur la gestion quotidienne des armées, de leurs opérations et de leurs hommes. Et doit concrètement quitter les mains du CEMA pour rejoindre celles du SGA (secrétaire général pour l'administration du ministère de la Défense), actuellement le contrôleur général des armées Jean-Paul Bodin.

Retirer la gestion des ressources humaines au CEMA

Une mission du CEMA est tout particulièrement visée par cette reprise en main : celle des ressources humaines. Sans jamais dire un mot des responsabilités éventuelles du concepteur du calamiteux logiciel de paiement des soldes, le système Louvois, on veut croire dans l'entourage du ministre de la Défense que ces dysfonctionnements "traduisent un déficit managérial de grande ampleur lié au décret de 2009. C'est la source de ce gigantesque bazar." On admet chez Le Drian que, sur ce point des ressources humaines, "nous sommes dans un petit rapport de force. Nous souhaitons exercer toute la responsabilité confiée par le président de la République." Mais à l'état-major des armées (EMA), c'est un tout autre son de cloche. "Si le CEMA ne peut pas abandonner la fonction ressources humaines, c'est qu'il donne des ordres qui conduisent à la mort. C'est aussi simple que ça, confie un officier. L'année 2011, particulièrement chaude au plan opérationnel, n'aurait pas été possible sans le décret de 2009."

Une réforme voulue par Le Drian

Voulue par Le Drian, conduite à la hache par son directeur de cabinet Cédric Lewandowski, la réforme est menée par une poignée de contrôleurs généraux. Dans un rapport remis en octobre au ministre, l'ancien directeur des ressources humaines du ministère, le CGA Jacques Roudière, abonde dans le sens du politique en écrivant que le fonctionnement hiérarchique des armées s'accommode mal de la nécessité d'introduire une relation "fonctionnelle", assise sur des contrats entre les différents acteurs : "la relation fonctionnelle au ministère de la Défense souffre de la comparaison avec le mode hiérarchique considéré comme le seul efficace (...) Un seul credo est reconnu : un chef, une mission, des moyens, et l'alternative un responsable, un contrat, une performance ne convainc pas. Le contrat, pourtant si fort dans d'autres organisations, a du mal à supplanter l'exercice du pouvoir hiérarchique." En un mot, le fossé se creuse...

Le groupe CL32

Le politique veut convaincre les chefs militaires de la pertinence de ses choix. Des discussions se déroulent notamment au sein d'un groupe ad hoc, le CL 32, animé par le directeur adjoint du cabinet civil et militaire, Jean-Michel Palagos. Il se trouve être, comme il se doit, contrôleur général des armées, et étudie le possible retrait au CEMA de ses compétences en matière de ressources humaines, de finances et de relations internationales. Sur ce dernier point, l'EMA ne se bat pas très vigoureusement. Concernant le point dur (les ressources humaines), trois options sont à l'étude. La première n'est autre que le transfert total de cette compétence à la Direction des ressources humaines du ministère de la Défense, structure civile spécialisée du secrétariat général pour l'administration (SGA). Deuxième option : le maintien de la gestion des militaires par l'EMA, mais le retrait des personnels civils de la défense. Troisième option : la définition des objectifs généraux par le SGA et le transfert des compétences de proximité aux états-majors.

"Des mecs à présumer coupables, aux mains sales"

Mais tout comme le directeur de cabinet est parfois accusé de "caporalisme", son adjoint Palagos ne fait pas l'unanimité. En témoigne ce message électronique, dont nous avons reçu une copie, envoyé par un collaborateur militaire de Jean-Yves Le Drian à l'un de ses supérieurs. Il a tout l'air d'un appel de détresse, que nous livrons in extenso, "dans son jus" : "Je suis un peu inquiet. Il commence à être défendu l'idée par le cab [directeur adjoint, NDLR] qu'il existe des militaires fiables, ceux qui ne portent pas les armes : contrôleurs généraux, ingénieurs d'armement ou infra, etc. Et les non-fiables, ceux qui portent les armes, que Mahé, Carcassonne et Uzbeen ont démasqués, des mecs à présumer coupables, aux mains sales. On m'a récemment fait le reproche d'avoir du sang sur les mains car faisant partie des opérationnels. Qu'ainsi la gouvernance du ministère ne doit pas appartenir à des assassins présumés ou avérés, mais à des militaires aux mains propres. Nous avons tué sur ordre, cela faisait sens, nos consciences sont pures et légères. Jamais nous n'endosserons ce qu'ils veulent faire passer pour des crimes. Nos épaules ne supporteront jamais les responsabilités qui incombent aux décideurs politiques. Nous devons une bataille contre cela à nos subordonnés. Demain ne doit pas les mettre en taule de nous avoir obéi. Respectueusement."

Le Drian, réveille-toi ! Ils sont devenus fous... 


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