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Quand la Grande muette fait la sourde oreille

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le 18/02/2014 Clément Tonnot

Au sortir de la Légion, Mostapha Allal n’avait pour seuls papiers que sa carte d’identité militaire. Photo Vanessa Meyer-Wirckel

Ancien adjudant dans la Légion étrangère, Mostapha Allal s’est retrouvé sans papiers et sans ressources à l’issue de 28 ans de service. Le Colmarien impute à l’armée ses deux ans de galère.

Djibouti, Tchad, ex-Yougoslavie, Polynésie… Mostapha Allal revient de loin. Certes il a beaucoup bourlingué avec la Légion étrangère. Mais l’ancien képi blanc, de retour à Colmar où il a grandi, se plaint surtout d’avoir été « abandonné par l’administration militaire » à l’issue de 28 années de service. « Du jour au lendemain, je me suis retrouvé dehors, sans papiers, sans solde, sans retraite, sans carte de séjour. Même mes affaires personnelles ne m’ont jamais été rendues » , assure le quinquagénaire de nationalité marocaine.

Sac de nœuds administratif

Arrivé en Alsace à l’âge de 4 ans, Mostapha Allal a grandi dans le quartier Europe. « Bien intégré » , il s’engage à 21 ans dans la Légion, « pour faire comme tous [ses] copains appelés ». Après les classes à Castelnaudary, il servira dans le 2e Régiment étranger de parachutistes, la 13e Demi-brigade à Djibouti et le 5e Régiment étranger à Mururoa. Il termine avec le grade d’adjudant. « Je me suis épanoui dans la Légion. J’avais le sentiment d’appartenir à une institution qui œuvre pour le bien. »

Fin 2010, après deux années d’arrêt pour longue maladie, l’armée lui propose un dernier contrat de six mois, à l’issue duquel il sera mis fin à son engagement. Mostapha Allal demande des explications. L’armée prend sa réponse comme un refus. S’ensuit un imbroglio administratif et judiciaire, avec deux procédures actuellement en cours devant la Cour administrative d’appel de Paris et le tribunal de grande instance de Marseille. « Ce sac de nœuds administratif et la lenteur de la justice m’ont placé dans une situation difficile » , déplore l’ancien militaire.

En mars 2011, Mostapha Allal est en effet radié des contrôles d’office. Pour l’armée, il a officiellement quitté la vie militaire pour la vie civile. Mais le quinquagénaire assure n’avoir jamais eu les papiers nécessaires à sa réinsertion : certificats de radiation et de bonne conduite, état signalétique des services, diplômes et permis militaires…

En situation irrégulière

« J’ai multiplié les courriers mais je n’ai pas eu de réponse. On parle de la Grande muette, mais en réalité, elle est plutôt sourde… » Impossible, dans ces conditions, d’accéder à la carte de séjour de dix ans, la naturalisation et la retraite auxquelles il peut prétendre. « À cette date, je me suis retrouvé en situation irrégulière, et donc dans l’impossibilité de travailler. »

Sans papier pendant six mois, sans ressources pendant un an, avec un fils de 10 ans à charge, Mostapha Allal s’enfonce dans le surendettement : « Les crédits, les assurances, les frais d’avocat… Je ne pouvais plus faire face. » D’abord hébergé par son frère, il se retrouve à l’été 2011 au foyer de l’association « L’échelle ». L’aide alimentaire de La Manne lui permet de subsister.

En juin 2011, l’ancien légionnaire obtient finalement une carte de séjour provisoire, renouvelable tous les trois mois. Pas grâce à son passé militaire au service de la France, mais… parce que son fils y est né ! En octobre, il retrouve du travail, puis un logement en avril 2012. Et depuis décembre 2012, il perçoit les 1600 € mensuels de sa retraite militaire. Mais à cause de ses dettes, sa situation reste « précaire » : il est aujourd’hui sous le coup d’une procédure d’expulsion en fin de trêve hivernale.

Pour dénoncer sa situation et obtenir de l’aide, Mostapha Allal a écrit à toutes les autorités, du maire de Colmar au Président de la République en passant par le ministre de la Défense, le préfet du Haut-Rhin, le délégué du Défenseur des droits et une bonne partie de l’État-major de la Légion. En vain. « Je ne veux plus payer pour les autres. Je me retrouve dans une situation de dingue alors que je n’ai fait de mal à personne. »

Aujourd’hui, il souhaite avant tout « régulariser [sa] situation » , et que l’armée « reconnaisse ses manquements et répare ». « Je ne veux pas cracher sur l’armée, qui m’a tout donné. Je ne demande pas d’argent, seulement une trêve vis-à-vis de mes créanciers, qu’on me laisse sortir la tête de l’eau. » Mais il garde de sa galère une profonde amertume : « Quand on signe dans la Légion, on s’engage à faire don de sa vie. J’aimerais que l’armée respecte ses engagements en retour. »


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