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Il y a dix ans, Nougaro nous quittait (portrait)

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mardi 4 mars 2014

Claude Nougaro est décédé il y a dix ans. Il avait 74 ans. Voici le portrait hommage au jazzman, publié dans le Soir au lendemain de sa disparition.

Nougaro est vivant. Il ne peut qu’être vivant. Debout, sur un ring qui s’appelait scène. Avec des mots pour punching-ball. Une arène pour le taureau écumant sa poésie française rythmée par le jazz. Voilà résumé en quelques mots un homme volubile qui a chanté les couleurs qu’on retrouve chez un Christian Lacroix. Nougaro, c’est la Méditerranée qui monte jusqu’à Toulouse. Nougaro-Nougaronne, un « Monsieur Claude », comme le rappelait encore récemment, et de fort belle façon, un de ses enfants spirituels : Art Mengo, l’autre Toulousain, plus calme celui-là. Sans oublier Maurane, sa fille spirituelle qui n’a pas voulu s’exprimer, hier, sur cette perte.

Nougaro, c’était Trenet pour le phrasé jazz adapté à la tradition française, c’est Gainsbourg pour les allitérations et les jeux de mots, c’est Charlie Mingus et Eddy Louiss pour l’authenticité et l’amour de la musique, c’est l’enfant-phare (titre de son disque paru en 1997) éclairant à lui tout seul tout un pan de la chanson française.

Assidu au jazz plus qu’à l’école

Né à Toulouse, la Ville rose qu’il immortalisera lui-même plus tard, le 9 septembre 1929, le petit Claude était prédestiné : son papa, Pierre, est premier baryton à l’Opéra de Paris et sa maman, Liette, est, professeur de piano. Mais l’un comme l’autre sillonnent les routes du monde lyrique et donc confient le petit à ses grands-parents. Il se retrouve dans un état d’exil affectif, nous dit-il en 2000. En guise de refuge, Claude découvre la vie et sa future passion, à la radio, en écoutant notamment le critique Hugues Panassié qui retrace l’histoire du jazz sur Radio-Toulouse. Armstrong, Ellington, Basie… Le petit Nougaro n’en manque pas une miette. Assidu au jazz plus qu’à l’école où il se révèle plutôt cancre. Déjà la tête dans les étoiles et la poésie, son autre passion. Il n’a pas 20 ans qu’il trouve le journalisme pour s’occuper, à Vichy d’abord, en Algérie ensuite, où il s’acquitte de ses obligations militaires, ensuite. L’homme a du caractère puisqu’il s’engagera même à la Légion étrangère, au Maroc.

De retour à Paris, il hante les nuits de Saint-Germain-des-Prés du début des années 50. Il croise le poète Jacques Audiberti et les chanteurs Brassens et Mouloudji. Il écrit ses premières chansons pour Marcel Amont, Philippe Clay et Edith Piaf, avant, en 1955, de faire ses débuts de chanteur au Lapin Agile. En 1959 paraît son premier disque. Henri Salvador dit de lui : Il a en lui ce que Paris demande à un artiste, c’est-à-dire la fougue, la rage, la souffrance…

Une icône de la Rive Gauche des années 60

n’est pas que jazz, même si son adaptation du « Blue rondo à la Turk », de Dave Brubeck et Paul Desmond, restera un sommet de son oeuvre. Il est java (« Le jazz et la java ») mais aussi cinéma (« Le cinéma », « Une petite fille », « A bout de souffle ») et bossa aussi quand il reprend « Bidonville » avec Baden Powell ou traduit Chico Buarque pour « Tu verras ». Il rend hommage à Satchmo (« Armstrong »), Sonny Rollins (« A tes seins ») ou Nat Adderley (« Sing Sing song ») et fond comme un père face à sa fille dans « Cécile ma fille », une Cécile qui le reliera à tout jamais à Bruxelles, la ville où il fit ses débuts en première partie de Piaf, à l’Ancienne Belgique.

Il continue de personnifier la Rive Gauche dans les années 60, avant de se mobiliser pour la Révolution de 68 dans « Paris Mai ». L’homme est insoumis, un sanguin. En 1974, il chante Trenet, Brel, Ferré, Gainsbourg. Le jazz continue de l’obséder. Il forme un trio avec Maurice Vander mais les années 80 sont de moins en moins sensibles aux artistes et de plus en plus aux chiffres. Barclay, la firme, le vide comme un malpropre. Nougaro se retrouve sur la touche. Mais il n’est pas dans son caractère, entre le rouge et le noir, de se laisser faire sans réagir. En 1987, il ose New York et le rock pour un « Nougayork » qui est la plus belle des leçons adressée à ceux qui le croyaient fini. Comme aujourd’hui Henri Salvador, Nougaro touche les nouvelles générations. Il remet ça en 1989 avec « Pacifique » enregistré à Los Angeles cette fois mais refuse de tomber dans le piège de la facilité et revient à Toulouse (« Toulouse to win ») et au jazz d’« Une voix et dix doigts » en compagnie de Maurice Vander.

Des problèmes cardiaques lui imposent de ralentir son rythme de vie mais c’est plus fort que lui, l’homme ne cesse de sortir des disques et de se produire sur scène, comme encore récemment au Théâtre 140 pour dire « Les Fables de ma fontaine ».

Gourmand de la vie

L’homme peint et dessine aussi. Luttant contre la maladie, il n’avait pas moins lancé un formidable projet pour Blue Note, avec des grands du jazz. Le disque restera inachevé.

Dans son nouveau havre des Corbières, sa femme Hélène lui apporte réconfort et inspiration (en plus de lui servir d’infirmière et de secrétaire). Après les femmes de sa vie, Nougaro l’appelait « la femme de ma mort ». Il lui écrira « L’île Hélène ».

Nougaro, c’est un gourmand de la vie. Pour ses interviews, il ne tenait pas en place. On se souvient de lui tournant autour de la table qu’il martelait de temps en temps. La vie, comme la musique, était un combat pour défendre ses idées. Il finissait par parler comme il chantait : en rythme. Le regard pétillant comme un bon vin dont il raffolait, les mots roulants sur la table comme un verre vide en fin de repas. Rabelaisien et seigneur, il s’est donné à fond jusqu’à son dernier souffle. On gardera de lui le souvenir d’un homme entier, tout de noir vêtu. D’ailleurs, il l’a chanté : il était un Noir blanc de peau…


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