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Téléphone portable et chambrée de six, obstacles au recrutement des jeunes dans l’armée

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L'Opinion

Article paru dans l’Opinion des 4/5 avril pour les abonnés

Comme elle le fait tous les trois ans, l’armée de terre mène une nouvelle campagne de recrutement à base d’affiches, de spots télévisés et de sites internet, dont le coût atteint environ 2 millions d’euros. Centrée sur des profils individuels, la communication décline le thème « Votre volonté, notre fierté ». Objectif : 14 000 recrutements.

Comme chaque premier mardi du mois, l’ensemble des centres de recrutement de l’armée de terre accueille les nouveaux engagés et leurs familles pour une cérémonie de signature du contrat. Ce moment solennel devrait se reproduire 14 000 fois cette année. 14 000, c’est en effet le nombre de militaires du rang - les engagés volontaires de l’armée de terre, ou EVAT - qui devront être recrutés en 2016. Un chiffre en forte hausse, du fait de l’augmentation des effectifs décidée après les attentats. Ils n’étaient que 9 000 en 2014 - soit une hausse de plus de 50 % en deux ans.

La machine à recrutement tourne à plein régime. Aux EVAT, il faut ajouter les cadres, officiers et sous-officiers, les légionnaires, les sapeurs-pompiers de Paris et, bien sûr les aviateurs et les marins. Au total, environ 23 000 jeunes pousseront pour la première fois la porte d’une caserne cette année. C’est considérable. « Cette année, chaque recruteur doit ramener l’équivalent d’une section » de trente hommes, résume un officier.

Depuis la professionnalisation des armées en 1996 et le départ du dernier appelé en novembre 2001, seuls les volontaires servent sous les drapeaux. Alors que de nombreux pays, comme les États-Unis et la Grande-Bretagne, ont de très sérieuses difficultés de recrutement, la France fait figure d’exception depuis vingt ans. L’armée de terre a le choix de ses troupes : pour chaque poste offert, elle a deux candidats. Cette moyenne recouvre toutefois des situations très contrastées. S’il est difficile de trouver des techniciens en maintenance aéronautique, des cuisiniers ou des spécialistes des systèmes d’information et de communications (SIC), à cause de la forte demande dans le civil, il y avait cette année 150 bons dossiers pour 20 places afin d’intégrer Saint-Cyr à Bac +5.

Qu’est-ce qui pousse aujourd’hui un jeune à s’engager ? Et qu’est-ce qui, en revanche, peut l’inciter à résilier son contrat ? Le général Thierry Marchand, un officier de la Légion étrangère, est en charge du recrutement dans l’armée de terre. Interrogé par l’Opinion, il décrit ce qu’il appelle « le champ de motivations et de réticences » des candidats à l’engagement. Une plongée au cœur des tendances lourdes de la société française : « Nous constatons trois grandes aspirations chez les jeunes qui prennent contact avec nous. L’un est très nouveau, c’est l’effet Charlie. Les jeunes nous disent qu’ils veulent servir et défendre leur pays. Tous insistent également sur la difficulté d’entrer dans la vie active et pensent qu’un passage dans l’armée peut être un bon tremplin. La troisième motivation, c’est une vie active, l’aventure mais surtout la recherche d’un cadrage, de repères simples. Nous leur offrons quelque chose de carré dans un monde mou et cela les attire ». L’argent ? « Ils n’en parlent jamais et c’est nous qui abordons le sujet ». La solde d’un jeune engagé correspond globalement au smic, mais un militaire du rang est « nourri, logé, blanchi » et perçoit des primes importantes, en particulier lorsqu’il est envoyé en opération extérieure.

Quant aux réticences, le général Marchand en voit principalement trois : « Lorsqu’ils arrivent chez nous, c’est souvent une sorte de choc thermique. D’abord ils découvrent la promiscuité dans des chambres de six et pour beaucoup, c’est un vrai traumatisme. D’autant plus qu’ils n’ont plus un accès permanent à leurs téléphones portables », c’est-à-dire à leurs amis et aux réseaux sociaux. « Nous organisons des plages horaires pour cela, mais ils doivent comprendre qu’en opérations, ce n’est pas possible ». Les marins en savent quelque chose. L’interruption de la connexion pendant de longues périodes est devenue un frein sérieux à l’embarquement sur les bateaux pour de nombreux matelots.

Dernier point délicat : les familles. « Nous devons désormais considérer l’engagement comme un projet familial. Nous essayons d’acculturer les familles en les recevant et en les informant. Les pères des engagés n’ont plus l’expérience du service militaire et l’armée suscite encore beaucoup de fantasmes. Ce que nous craignons le plus, c’est l’appel à la maman au bout de la première semaine qui dit à son fils : “si c’est trop dur, rentre à la maison” ».

Malgré le coaching des futurs engagés et de leurs proches, le taux de dénonciation des contrats (« l’attrition ») se situe autour de 20 % au cours de la première année. Le général Marchand se veut rassurant : « Ce comportement se retrouve ailleurs que dans l’armée. On a une génération assez versatile ». Pour rentabiliser ses coûts de recrutement et de formation, tout en gardant une moyenne d’âge assez jeune, l’armée de terre aimerait que ses EVAT restent en moyenne huit ans chez elle. Elle n’y parvient pas, avec moins de six ans actuellement. La « fidélisation » de ses troupes reste donc un chantier important pour l’état-major.

Contrairement à une idée répandue, les armées n’offrent pas une garantie de l’emploi comparable à la fonction publique. Globalement deux militaires sur trois servent avec des contrats à durée déterminée (de plusieurs années) et c’est le cas de tous les militaires du rang. Seul l’encadrement est, partiellement, « de carrière ». Dans l’armée de terre, les personnels sous contrat représentent 72 % des effectifs.

La moitié des militaires du rang qui s’engagent sont désormais des bacheliers, alors que le niveau des sous-officiers est bac +2 et des officiers bac +5. L’âge moyen d’engagement est de 20 ans. Les jeunes femmes représentent environ 10 % des candidates et autant des recrues. Le général Marchand ne cache pas qu’il aimerait voir ce dernier chiffre augmenter. Géographiquement, certaines régions fournissent plus de militaires que d’autres. C’est le cas du nord-est et du sud-est de la France, alors que l’ouest n’est guère fana-mili. Avec 12 % des recrues, l’outre-mer fournit trois fois plus d’engagés que la métropole, proportionnellement à sa population.


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