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Morts pour la France : multiplier les célébrations dilue le souvenir

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le 18-11-2011

LE PLUS. Depuis l'arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy, la cérémonie du 11 novembre a revêtu différents aspects, s'éloignant progressivement de la seule commémoration des Poilus morts durant la Première Guerre mondiale. Une nouvelle évolution est-elle judicieuse ?

Par David Desforges

Un soldat français est mort lundi en opérations en Afghanistan. Un légionnaire. Un homme qui avait fait le choix de cette vie, le choix du "métier des armes", le choix de ce risque, le choix de cet engagement et, en fait, le choix d’une telle mort. Il rejoint ses 75 frères d’armes morts depuis 2001 sur ce théâtre d’opérations extérieures.

Mort pour une juste cause diront certains. Mort pour rien rétorqueront d’autres. Mort au champ d’honneur diront encore les anciens. Mort dans l’indifférence du plus grand nombre enfin.

 

Un Memorial Day "à la française" ?

C’est pour lutter contre l’oubli que, vendredi dernier, le président de la République a dévoilé son ambition de faire du 11 novembre un Memorial Day à la française ; jour unique à l’occasion duquel le pays honorerait ses morts au combat. Tous. Sans exclusive. Volonté sincère ou aveu d’échec lorsque les Français se détournent, ou simplement ignorent, l’engagement militaire de tant des leurs ? Peu importe, les deux thèses se défendent sans doute.

Cérémonie du 11 novembre 2011 à Villeroy (LAURENT CIPRIANI/AFP)

Bien sûr, le calcul politique n’est pas étranger à la démarche. En période pré-électorale, il est de bon ton et de bonne stratégie de marquer le terrain et de ne pas se voir ravir les thèmes de la nation, du sang versé et des honneurs dus aux morts au bénéfice traditionnel de qui l’on sait.

C’est donc "sans polémique" que François Hollande a souhaité répondre à Nicolas Sarkozy depuis l’ossuaire du Bois de la Gruerie dans la Marne pour regretter "une utilisation de l’Histoire au risque de la division". Le candidat de la rue de Solférino s’oppose à un jour de commémoration unique, au nom précisément du caractère unique de chacun des conflits qu’une telle journée embrasserait. "Chaque guerre a ses causes et ses caractéristiques dont il faut se souvenir pour ce qu’elles sont" avance, non sans raison, François Hollande.

De fait, la boucherie ignoble de la Grande Guerre n’est pas la conflagration de la Seconde Guerre mondiale. La guerre oubliée conduite en Indochine par la France pauvre de l’après-guerre n’est pas l’épouvantable déchirure à contre-courant de l’Histoire des "opérations de maintien de l’ordre" en Afrique du Nord. Et ces engagements armés - puisque tous n’avaient pas juridiquement le statut de guerres, sont évidemment sans rapport avec les interventions militaires entreprises par la France dans le cadre de mandats onusiens, au nom du droit d’ingérence humanitaire ou encore avec celles engagées contre le terrorisme.

 

Onze jours et onze nuits

Si les morts de la Grande Guerre défilaient sur les Champs-Élysées, leur procession durerait onze jours et onze nuits. Sans interruption. Six cent seize de leurs frères d'armes sont pour leur part tombés dans les 228 opérations extérieures conduites par la France depuis 1963. Mais le droit à la reconnaissance de la nation ne peut bien évidemment pas atteindre le nombre des victimes.

Dans un pays où il faut un siècle pour déclassifier certaines archives, pour un pays auquel il fallu plus de 50 ans pour reconnaître sa faute dans la déportation des juifs, dans un pays où certaines plaies semblent s’envenimer là où, partout ailleurs, elles cicatriseraient, il faut avoir la lucidité de reconnaître que certains morts risquent de n’être jamais honorés par la collectivité.

Les morts de la Grande Guerre sont parmi nous. Leurs noms sont gravés pour l’éternité sur les obélisques de nos villages. Ils nous observent de leurs regards hallucinés de martyrs. Les morts de la Seconde Guerre mondiale ne le sont pas moins. Ils ont rejoint leurs pères ou leurs oncles sur les faces encore lisses de ces obélisques que le lierre ou la mousse n’avaient pas même eu le temps de gagner.

 

Pour tous les morts sans stèle

Hormis dans certaines communes, assez rares, les morts d’Indochine, de Suez et d’Afrique du Nord, demeurent pour beaucoup des morts sans stèle. Quant à ceux plus proches de nous, du Tchad, du Liban, de Bosnie, de Côte d’Ivoire et d’Afghanistan, c’est comme si leur nombre, l’accélération de l’histoire et la complexité du monde devaient les priver du regard et de l’hommage de la communauté nationale

Si une journée unique n’est certes pas la meilleure solution, imagine-t-on sérieusement une "journée de l’Indo", une journée par pays d’Afrique du Nord et encore une journée des opérations extérieures ? La France se connaît. Personne n’y croit raisonnablement. Trop de célébrations divisent, diluent le souvenir. Assez de morts pour ajouter maintenant la polémique à la douleur.

Au-delà de leurs croyances, de leurs aspirations philosophiques, de leurs choix politiques, de la liberté de n’en avoir fait aucun ou de l’honneur d’avoir seulement servi, ces morts demeurent unis malgré la diversité des conflits qui les ont emportés. Ce n’est pas faire injure au "Poilu" de Verdun que de le célébrer avec le légionnaire de la vallée de Kapisa.

Tous sont morts pour la France

C’est pourquoi, le 11 novembre, le théâtre des petites opérations intestines de la politique aurait pu sonner une trêve, juste une. Par respect pour eux.


Traduction

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