AALEME

Légionnaire toujours...

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2014




Extraits de l’hommage émouvant rendu par son camarade de promotion, le lieutenant-colonel (er) André Barraquier, au Colonel Jean Sarrabère.

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Colonel Jean SARRABERE, commandeur de la LH, le 10 août, à presque 87 ans


Salut Sarrabère ! Donne-moi la force nécessaire pour contenir mon émotion pour que je puisse aller au bout de cet hommage que je tiens absolument à te rendre.


Après quatre ans au prestigieux Prytanée Militaire de La Flèche, tu es admis à l’École Spéciale Militaire Interarmes, notre chère école.


Saint-cyrien de la promotion GARIGLIANO, à la sortie de l’École d’application de l’infanterie à Saint-Maixent, où nous nous sommes côtoyés pour la première fois en 1951, tu ne choisis pas la Légion mais le 3e Régiment de tirailleurs algériens à Constantine.


Puis, passé par Bel Abbès tu arrives au 5e Régiment étranger d’infanterie. Je suppose combien grande était ta fierté de servir dans la même unité que ton père, le Régiment du Tonkin. Je t’y rejoins au 1er Bataillon en octobre 1953. Tu étais l’adjoint du capitaine commandant la 4e compagnie. Un poste difficile qu’il fallait affecter à un officier de confiance, car la 4 était la compagnie ‘jaune’ du bataillon, celle composée essentiellement de ‘tirailleurs annamites’, des vietnamiens, malheureusement mal formés militairement et dont le moral était parfois défaillant car ils pressentaient le sort funeste réservé à leur patrie.


Rapidement, nous avons combattu côte à côte lors de l’opération MOUETTE, avec les deux gros accrochages de Chi-Phuong et Yen-Mong, au Sud du Tonkin, dans la région de Phu-Nho-Quan.


Suivent quelques opérations dans le delta. Puis, fin décembre nous embarquons pour Saigon, que nous quittons trop rapide-ment pour prendre la piste vers le Moyen Laos. Nous atteignons Seno, notre base de départ et début janvier 1954, nous entrons dans la forêt laotienne. Nous n’en ressortirons qu’au mois de mai très affaiblis avec des effectifs squelettiques et le moral au plus bas.


Dans cette campagne, tu vas te montrer déterminant dans les deux plus gros combats que nous avons menés.


Le 31 janvier à Bang-Poung, notre point d’appui est menacé par un régiment vietminh. Tu es chargé de donner l’alerte en cas d’attaque avec une vingtaine de tirailleurs à quelques centaines de mètres en avant de notre dispositif, ce que tu as parfaitement exécuté. J’entends encore l’ordre hurlé par mon commandant de compagnie aux avant-postes : « N’ouvrez le feu qu’après le passage du lieutenant Sarrabère » et puis le cri d’un légionnaire : « Le lieutenant est rentré ». Ouf ! est la réaction de tout le bataillon. Nous avons gagné la bataille, d’abord grâce à toi, sans aucun doute.


Moins de trois mois plus tard, à Ban-Sen-Phan, tu es en tête de ta nouvelle unité, entièrement légionnaire : la 3e compagnie. Tu disais alors : « l’officier adjoint est toujours en tête ou en queue mais jamais ‘peinard’ au milieu ». Ce jour-là, tu pénètres dans cette maudite clairière jusqu’au fond de la nasse où le feu, le fer et une nuée de bô-doi s’abattent sur ta troupe en la disloquant totalement. Je ne sais pas comment tu es revenu vers nous pour participer aux contre-attaques qui nous ont permis de récupérer les survivants, les morts et le corps du lieutenant Vaugrente, ton commandant de compagnie froidement exécuté d’une balle dans le front.


Dans le courant du mois de mai, le moral affaibli par la fin de Dien Bien Phu, nous revenons au Tonkin. Nous participons aux opérations de récupération des postes à la périphérie du delta. Tu vas une nouvelle fois te distinguer dans la région des Sept Pagodes en prenant d’assaut avec une seule section, un piton, le « piton Sarrabère ». Et voilà l’armistice, notre régiment sera le dernier à évacuer Hanoï. Puis, il rejoindra l’Annam à Tourane (aujourd’hui Da-Nang). Nous devons quitter le 5 et rejoindre le 2e Régiment étranger d’infanterie en vue d’un rapatriement en Afrique du Nord. Nous débarquons à Bizerte et rapidement, les opérations de sécurisation de la mise en place de la nouvelle République tunisienne ressoudent nos unités. C’était en 1956. Le travail terminé, nous recommençons au Maroc pour l’installation de Mohammed V.


Tu nous quittes pour l’ESMIA qui a besoin d’officiers exemplaires, comme toi, pour former nos jeunes camarades. D’ail-leurs, tu exerceras tes talents d’instructeur à l’Ecole d’Application de l’Infanterie par deux fois, à Saint Maixent puis à Montpel-lier.


Revenu à la Légion au 4ème REI dans le Sud Constantinois puis au 1er RE à Saïda, tu commandes la 4ème Compagnie.


Tu vas nous quitter car tu rejoins la métropole. Puis, c’est la fin de l’Algérie et commence la valse des mutations : Place de Paris, 19e BCP, État Major de la 1re Division puis de la 6e Région. Mais la Légion te réserve le commandement du Détachement de Légion étrangère de Mayotte comme Chef de corps, récompense suprême pour un officier de Légion !


Tu reviens à l’EAI en 1979 et tu plantes des racines à Montpellier. Et nous sommes à nouveau réunis jusqu’à la fin...


Jean SARRABERE tu étais un homme valeureux, un soldat discipliné, un officier de Légion honnête et fidèle.

Adieu Sarrabère ! Mon vieux compagnon, mon très cher frère d’Arme.


Extraits de l’hommage émouvant rendu par son camarade de promotion, le lieutenant-colonel (er) André Barraquier

 

ANOCR 34 - Antenne Défense Mobilité - 3 Boulevard Henri IV - 34000 Montpellier - CCP185579 Montpellier


Heliodor Pika - victime d'un procès manipulé

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27-06-2001 | Astrid Hofmanová

Heliodor Pika

Heliodor Pika Légionnaire de la Première Guerre mondiale, officier de l'Armée tchécoslovaque, attaché militaire dans les Balkans, chef de la Mission militaire tchécoslovaque à Moscou, pendant le second conflit mondial, titulaire d'une trentaine de croix et de décorations militaires, diplomate, le général Heliodor Pika, a été exécuté le 21 juin 1949, comme ennemi de l'Etat de démocratie populaire et espion des puissances occidentales... En juin de cette année, un procès a été ouvert contre le premier procureur communiste des années cinquante, responsable de ce meurtre. L'ancien procureur Karel Vas, 85 ans, accusé d'avoir mis en scène un procès politique contre Heliodor Pika, a été condamné à sept ans de prison. Le tribunal l'a reconnu coupable, en effet, de l'assassinat du général, du procédé illégal, lors de l'enquête, et d'autres actes. Karel Vas est le premier procureur communiste des années cinquante jugé pour un meurtre judiciaire, après 1989. Voici un programme sur la vie et la mort de Heliodor Pika, une des premières victimes de l'arbitraire communiste.

Heliodor Pika est né à Stitina, en Moravie, le 3 juillet 1897, dans la famille pauvre d'un charron de campagne. Après avoir terminé ses études, au lycée d'Opava, il veut devenir pharmacien, mais la guerre déjoue son projet. En automne 1916, il part, en tant que volontaire, sur le front oriental, et devient membre des Légions tchécoslovaques. Puis, il entreprend le voyage de Vladivostok en France, où il attire l'attention du maréchal Foch lui même. Ce dernier offre au jeune lieutenant le bâton de maréchal, en lui disant: 'Vous devez grandir encore pour mériter ce bâton...'. Pika repart en France deux fois: en 1919, pour étudier à l'Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr, avant de passer deux ans d'études (1926-28) à l'Ecole supérieure de guerre, où il reçoit le diplôme d'officier de l'état-major. En 1932, Pika est nommé attaché militaire à Bucarest, où il contribue, considérablement, à la formation de l'armée roumaine. Pendant sa mission dans les Balkans, qui dure jusqu'en 1937, Pika aide les réfugiés retenus dans des prisons hongroises et les émigrés juifs. Après son retour au pays, Pika travaille à l'état-major, jusqu'au 15 mars 1939, où il s'oppose résolument à l'occupation allemande. Il est partisan d'une résistance active et, en tant que tel, il est l'auteur d'une déclaration, dans laquelle il appelle à la défense de l'Etat, cela 'en dépit de la décision du gouvernement traître'. Après l'éclatement de la guerre, le président Benes nomme Pika conseiller militaire dans les Balkans, et délégué spécial pour la Roumanie. A Bucarest, il est chargé de créer une cellule spéciale de notre résistance étrangère. A cause de ces activités, Pika est arrêté, en 1940, par la dite Garde de fer. Grâce à l'aide du roi roumain, Karol, dont il est devenu l'ami intime, il s'échappe pour la Turquie.

Après l'envahissement de l'Union soviétique, le 22 juin 1941, le président Benes nomme Heliodor Pika commandant en chef de la mission tchécoslovaque à Moscou. Son rôle est d'entamer la coopération militaire avec la Russie, d'informer Benes de la sitution dans le pays des Soviets, mais aussi empêcher les services de renseignements soviétiques d'infiltrer les agences de renseignements dans le protectorat. Les communistes ne le lui ont jamais oublié. A Bouzoulouk, il organise la création de l'unité militaire tchécoslovaque, où sont recrutés les prisonniers tchèques et slovaques des goulags sibériens. A l'époque, leur nombre est estimé à plus de 30 000 personnes. Les rapports de Pika aident Benes, exilé à Londres, à convaincre les alliés de coopérer avec l'Union soviétique. Dans le même temps, Pika met en garde contre la bolchevisation des territoires libérés par l'armée soviétique. Pika, qui lutte pour que l'unité tchécoslovaque soit indépendante des affaires politiques, et qu'elle ne soit soumise qu'à l'autorité du gouvernement tchécoslovaque, est remplacé, bientôt, par le général communiste, Ludvik Svoboda, dont les camarades du parti ne tardent pas à envahir l'unité. Les problèmes que Pika doit affronter, au sein de l'unité, sont dus à la double conception de la résistance tchèque à Moscou: une conception démocratique de Benes défendue par Pika et une poignée d'officiers, et la conception pro-soviétique qui plaçait les intérêts du grand frère au-dessus du destin de notre pays.

Après la fin de la guerre, Pika est nommé commandant en chef adjoint de l'état-major de l'armée tchécoslovaque et élevé au grade de général de division. Dès 1946, on commence à surveiller Pika sur la base d'une dénonciation non véridique. En effet, Pika était la bête noire de beaucoup de ses anciens collaborateurs, car il avait été souvent témoin de leur lâche comportement, qui ne correspondait point à l'honneur d'un officier de l'armée tchécoslovaque. Après le putsch communiste, en février 1948, Pika doit quitter l'armée, avant d'être arrêté et inculpé de haute trahison. L'enquête ne dure pas longtemps. En janvier 1949, la commission militaire du Comité central du Parti communiste tchécoslovaque, réunie en présence du Premier ministre d'alors, Klement Gottwald, condamne Pika à la peine capitale. Il est accusé de haute trahison et d'espionnage durant la guerre mais non pas contre son pays, mais contre l'Union soviétique, ainsi que d'avoir collaboré avec les services secrets étrangers. Le condamné est transféré à la prison de Bory, à Plzen, où on lui annonce, le 20 juin, le rejet de son pourvoi en grâce. Le lendemain, Heliodor Pika est exécuté. 'Si ma mort contribue à la réunification du peuple, je suis prêt à mourir', a dit Pika avant sa mort. Rappelons encore que, parmi ceux qui sont intervenus contre l'arrestation de Pika, il y avait aussi le général Faucher. Heliodor Pika a dû attendre presque vingt ans pour être réhabilité, à titre postume, en 1968. Après la révolution de 1989, on lui a conféré, à titre posthume aussi, l'Ordre de Milan Rastislav Stefanik de troisième catégorie. Cette satisfaction juridique et morale a mis un terme à la cause qui a marqué, il y a vingt ans, le destin de centaines et de milliers de ceux qui, pendant la Seconde Guerre mondiale, n'ont pas déposé les armes, et qui ont lutté pour la libération et la souveraineté de leur pays.


Interview du père Yannick Lallemand

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19-06-2009

Aumônier en retraite, le père Yannick Lallemand n’en continue pas moins ses activités au sein de la communauté militaire de la Légion étrangère à Aubagne Interview :

 

Christian Morisot : Comment vous est venu votre vocation d’Aumônier militaire ?

Père Lallemand :
Ayant fait la guerre d’Algérie, j’ai vu les aumôniers militaires qui œuvraient magnifiquement dans des situations souvent difficiles au service du Seigneur. Etant moi-même, fils de militaire, l’armée est un milieu que je connais bien et c’est tout naturellement que la vocation militaire m’était venue d’être officier comme l’étaient plusieurs de mes frères.
 
Quand j’ai pris la décision de devenir prêtre, je n’avais d’autre alternative que celle d’être au service d’autres militaires. C’est un milieu au service de Dieu et de la France que j’estime. J’ai ainsi baigné dans cette vie que nous devons donner à notre pays et dont nous recevons chaque jour les bienfaits sans que nous nous en apercevions.
 
Mon père a donné toute sa vie au pays, à l’Armée et je l’ai toujours entendu dire : « Faire le sacrifice de sa vie est un honneur et aussi un service que chacun devrait rendre s’il le fallait » : mon frère aîné est mort en Algérie. Mon père qui à ce moment là était en Tunisie, a fait le déplacement pour déposer la Légion d’Honneur sur le cercueil de son fils .

Ayant aussi le désir de rester sportif, le fait d’être aumônier militaire c’était, pour moi, la possibilité de faire du sport, j’ai pratiqué beaucoup de cross, de skis, de montagne, de marches, de parachutisme, être prêtre aux Armées me permettait cette vie sportive.
 
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Christian Morisot : Parlez nous, mon Père, de votre aventure Tchadienne :

Père Lalleman: De 1986 à 1996, j’ai vécu 10 ans au Tchad mais je revenais chaque année pour ma mère qui était très âgée, un peu malade et je me faisais un devoir de la revoir et de passer en sa compagnie 3 semaines à 1 mois, c’est moi même qui payais le voyage.

Alors pourquoi suis-je parti au Tchad ?

Il y a plusieurs raisons : quand j’ai décidé d’être prêtre, j’avais l’intention de devenir missionnaire mais je n’ai pu réaliser ce projet du fait que mon frère aîné venait d’être tué, je ne souhaitais pas m’exiler loin de ma famille à cause mes Parents.
 
La deuxième raison vient de ma participation pendant 6 mois à l’opération « Manta », opération qui avait pour mission le soutien de l’Armée française aux combattants tchadiens contre l’envahisseur libyen.
J’ai rencontré très souvent des chrétiens tchadiens perdus dans le désert surtout des fonctionnaires : soldats, instituteurs et infirmiers venus du sud du pays qui n’avaient pas vu de prêtres depuis une dizaine d’années, ils avaient d’importants besoins spirituels.
 
Une troisième raison est que j’ai bien compris que l’Esprit Saint était là ! qu’il m’appelait à venir au Tchad, à tout quitter et en particulier ma situation privilégiée d’aumônier parachutiste avec son gros salaire pour retrouver la vie d’un religieux, coexistant avec  les tchadiens, vivant comme eux la pauvreté, la misère et le dénuement.
 
Il y a peut-être une quatrième raison : celle d’avoir été témoin à Beyrouth de la mort de 72 parachutistes et de 4 marins. J’y ai trop subi une situation malsaine d’impuissance à voir ces jeunes gens mourir. J’étais bouleversé de devoir les accompagner dans leur dernier parcours terrestre.
 
En fait, avec le recul du temps et celui de la réflexion, je souhaitais un peu de paix, mon choix était faussé, je retrouvais, malgré-moi un pays, encore et toujours, en état de guerre…

Le prêtre est un homme seul, il vit de solitude, de recherche, de silence, éléments indispensables pour la place que tient la prière dans son quotidien, dans son face à face avec Dieu.
 
Pour revenir à mon aventure tchadienne, il serait intéressant d’en parler et expliquer mon action sacerdotale à vivre la vie nomade de ces chrétiens Tchadiens.    

La Légion étrangère, une particularité française

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“Qui sait si l’inconnu qui dort sous l’arche immense,
Mêlant sa gloire épique aux orgueils du passé
N’est pas cet étranger devenu fils de France
Non par le sang reçu mais par le sang versé ?”
Pascal Bonetti, 1920.

“Étrangère ! non pas ! ô France, depuis quand
Le baptême du sang n’est-il plus un baptême ?
Qui donc vous renierait Français sans un blasphème,
Martyrs de Camaron, héros de Tuyen-Quan ?”
Henri Richardot (Dachères), 1912.

1 - Drôle de troupe ces légionnaires, héritage des bataillons étrangers levés par les rois de France puis par Napoléon. La Restauration continue ce recrutement particulier et la conquête de l’Algérie achève d’en faire une troupe à part entière. Ce sera la Légion étrangère, constituée en 1831 pour répondre aux nouvelles exigences de la conquête coloniale.

2 - Quels sont les objectifs de cette Légion étrangère ? Quels sont les étrangers qui la composent et quelles sont leurs motivations pour entrer dans ce corps spécifique ? L’analyse de ces motifs nous incite à nous pencher sur les raisons de la création de la Légion, sur la constitution de cette troupe mais aussi sur la création du mythe de la Légion comme modèle d’intégration et d’adhésion aux valeurs universelles de la France.

Une réponse aux besoins des conquêtes coloniales

3 - Au XIXe siècle, le développement des guerres sur les terrains extérieurs à la France (colonies africaines et asiatiques, Mexique, Crimée) rend indispensable la levée de nouvelles troupes. En complément des troupes coloniales et des troupes indigènes de l’armée d’Afrique, la constitution de corps de volontaires étrangers devient une évidence.

4 - Cette troupe est envoyée dans tous les théâtres d’opérations où elle s’illustre souvent. Ainsi, à Camerone en avril 1863, 60 légionnaires résistèrent héroïquement à 2 000 Mexicains. La Légion y gagne ses heures de gloire et son mythe fondateur. Au fur et à mesure des expéditions, la Légion devient une troupe de choc qui a la réputation de combattre jusqu’à la mort.

5 - Elle est aussi utilisée à d’autres fins. Elle se fait bâtisseuse, les légionnaires construisant des routes et des villages de colonisation, notamment en Afrique. Il existe toujours au niveau de la Légion un corps de pionniers, reconnaissable à leur tenue, composée de la hache, du tablier de cuir et de la barbe.

6 - L’Afrique reste le creuset de la Légion. La conquête algérienne a généré son existence et c’est en Algérie, à Sidi-Bel-Abbès (Sud oranais), qu’a longtemps été le cœur de la Légion. Jusqu’en 1962, elle y a ses quartiers, son centre de recrutement et son centre de formation, sa prison aussi. Après l’indépendance algérienne, en 1962, la Légion se replie à Aubagne dans le sud de la France.

7 - La France s’enorgueillit de cette troupe de choc qu’elle malmène pourtant, l’envoyant dans les expéditions les plus meurtrières. La Légion a payé un très lourd tribut lors des deux guerres coloniales d’Indochine et d’Algérie. Aujourd’hui encore, elle est de tous les combats en Afrique et au Moyen-Orient.

Devenir légionnaire

8 - Pourquoi servir dans la Légion ? Quelle est l’attractivité de ce corps si particulier ? Est-ce réellement, comme le dit Pascal Bonetti, pour devenir français “par le sang versé” ? La naturalisation française, à laquelle le légionnaire a droit à partir de cinq ans de service, est-elle réellement un graal que l’on vient chercher du monde entier ?

9 - L’analyse de l’histoire des légionnaires semble brouiller un peu cette belle image. Le nombre important de désertions aussi, ces hommes n’hésitant pas à partir lorsqu’ils estimaient ne plus trouver ce qu’ils étaient venus chercher.

10 - Certes, il y a bien eu l’enthousiasme des milliers de volontaires étrangers se rendant en masse dans les bureaux de recrutement en août 1914, demandant à défendre la France et ses valeurs contre l’agression allemande. Ces étrangers ont été recrutés à partir d’août 1914 sous l’appellation d’“engagés volontaires pour la durée de la guerre”. C’étaient essentiellement des intellectuels francophiles et/ou vivant en France depuis longtemps. L’appel lancé par Blaise Cendrars et d’autres intellectuels résume bien leur motivation : “L’heure est grave. Tout homme digne de ce nom doit aujourd’hui agir, doit se défendre de rester inactif au milieu de la plus formidable conflagration que l’Histoire n’ait jamais connue. Toute hésitation serait un crime. Point de paroles, donc des actes. (…) Des étrangers, amis de la France, qui pendant leur séjour sur le territoire ont appris à l’aimer et à la chérir comme une seconde patrie, sentent le besoin impérieux de lui offrir leur bras1.” Suite à cet appel, plus de 8 000 candidats à l’engagement pour la durée de la guerre se présentent le 3 août dans les permanences que l’association Les Amitiés françaises a ouvertes. Les demandes d’engagement sont adressées au ministère de la Guerre. D’autres appels suivent : celui d’Américains mené par Georges Casmèze, celui des juifs ou des Arméniens, des Syriens ou encore des Grecs2. Pour certaines communautés, cet engagement est l’occasion de demander la création de corps d’armée composés de membres de la même nation, comme c’est le cas pour les 300 Polonais – ils composent, en 1914, une compagnie du 1er régiment étranger, qui possède même ses drapeaux officieux avec l’aigle polonais3 – ou encore pour les Italiens qui servent dans la Légion garibaldienne, composant le 4e régiment étranger de la Légion étrangère4. Au total, plus de 32 000 hommes – représentant plus de 50 nationalités – s’engagent comme volontaires étrangers pour la durée de la guerre5.

11 - Les raisons de leur engagement sont bien différentes de celles des légionnaires. Leur réversion dans les régiments de la Légion étrangère à partir de 1915 est d’ailleurs l’occasion pour Blaise Cendrars – lui-même engagé volontaire pour la durée de la guerre – de narrer ce choc des cultures : “L’arrivée de ces têtes brûlées de retour d’Afrique, de ces survivants de je ne sais quelles infernales campagnes coloniales, de je ne sais quelles criminelles expéditions punitives dans l’extrême Sud, qui étaient montés en ligne comme nous commencions à crever de misère et de honte dans les tranchées, nous fit un bien à tous, car chacun de ces damnés, ça se voyait, était moralement dépouillé de tout, orgueilleux et solitaire ; et c’est cet abominable moral d’hommes d’action, pour ne pas dire d’hommes de main, ou encore de héros désenchantés et revenus de tout, beaucoup plus que leur esprit de corps, auquel ils semblaient si manifestement, si exagérément tenir, qui nous servit d’exemple, à nous, jeunes écervelés, enthousiastes ou je m’en-fichistes (…) dont se composait notre IIIe régiment de marche de la Légion étrangère, le régiment le plus parisien de tous les régiments de l’armée française, et le plus intellectuel de tous (…)6.”

12 - En dehors de ces périodes de guerre, qui sont ces volontaires étrangers désirant entrer dans la Légion et quelles sont leurs motivations ? Devenir français n’est certes pas leur priorité première. La Légion propose autre chose : elle est une famille d’accueil pour des êtres brisés par la vie ou en quête d’une nouvelle patrie. Mais cette patrie n’est pas la France, c’est la Légion : “Legio patria nostra” est bien la devise des légionnaires.

13 - Elle absorbe les hommes en quête d’un nouvel idéal ou fuyant une vie éprouvante. Elle propose l’ultime possibilité, celle de l’effacement. Les légionnaires deviennent des “hommes sans nom”, des hommes sans passé, sans patrie. “Ce corps a pour vocation d’accueillir des hommes sans racines qui veulent tirer un trait sur leur passé”, dit Hélie de Saint-Marc, officier français de la Légion. Ils peuvent se racheter – ou pas – de leur vie d’avant. Ils entrent dans la famille : “Chaque légionnaire est ton frère d’armes, quelles que soient sa nationalité, sa race ou sa religion. Tu lui manifestes toujours la solidarité étroite qui doit unir les membres d’une même famille”, indique le 2e article du code d’honneur du légionnaire.

Une légion franco-germanique ?

14 - La Légion est d’abord le creuset des hommes perdus, des apatrides, des vaincus de l’histoire. Pour cela, on y parle beaucoup la langue des exilés : le yiddish et le polonais au XIXe siècle, le russe dans les années 1920, l’italien et l’espagnol dans les années 1930… Mais la langue la plus parlée dans la Légion reste l’allemand. Entre 1830 et 1961, sur 600 000 légionnaires ayant servi dans la Légion, 210 000 sont allemands, 60 000 italiens, 50 000 belges et Français, 40 000 espagnols et 30 000 suisses. Ils représentent même 60 % des régiments étrangers entre 1945 et 1955, largement employés lors des guerres coloniales (Madagascar, Indochine et Algérie).

15 - Ce choix de la Légion par de nombreux jeunes Allemands reste à la fois un mystère et une source de tensions entre la France et l’Allemagne. Désir d’aventure ? Besoin de se mettre à l’abri du besoin ? Qu’est-ce qui pousse ces jeunes Allemands à s’engager pour une patrie qui est, par trois fois, son ennemi ? À l’inverse, pourquoi l’armée française accepte-t-elle de recevoir un nombre aussi conséquent de ces potentiels ennemis ?

16 - Une première réponse est que, dans la Légion, on oublie sa nationalité, on est avant tout légionnaire. D’autre part, l’état-major de la Légion aime ces nationaux qui ont le sens de la discipline et incite donc au recrutement de légionnaires allemands (à l’exception de la période 1870 et 1880, où le sentiment anti-allemand est encore vif). Enfin, de 1871 à 1914, une grande partie des Allemands recrutés étaient des Alsaciens-Lorrains désirant fuir la conscription allemande7. C’est bien le seul réel exemple de motivation patriotique8. La loi du 5 août 1914 stipule d’ailleurs que tout Alsacien-Lorrain contractant un engagement volontaire au titre d’un des régiments étrangers recouvre la nationalité française. Ils sont 11 854 à s’engager au 1er avril 1915, soit plus du tiers des engagés volontaires dans l’armée française.

17 - L’envie d’ailleurs peut aussi expliquer cette motivation. La loi du 9 mars 1831 stipulait que la Légion ne pouvait être employée qu’en dehors du territoire national. Pas question donc de s’impliquer dans des conflits nationaux. Cette loi n’étant cependant valable qu’en temps de paix, la Légion s’est trouvée engagée dans le premier conflit mondial. La France respecte pourtant la convention de La Haye qui stipule l’interdiction faite “à un belligérant de forcer des nationaux de la partie adverse à prendre part aux opérations de guerre dirigées contre leur pays”. Des camps d’internement sont donc ouverts pour les légionnaires allemands, mais les meilleurs sont regroupés dans les bataillons des deux régiments de marche créés à la demande du général Lyautey pour assurer la sécurité du protectorat du Maroc, dégarni de ses autres troupes envoyées au front. De même, au lendemain de la guerre, la Légion du Maroc offre la possibilité, pour de nombreux Allemands, de s’engager au service de l’ancien ennemi ; la France – et Lyautey au Maroc – encourage d’ailleurs ce recrutement, notamment en ouvrant des bureaux de recrutement dans la partie occupée par la France en Rhénanie9.

18 - Les différents gouvernements allemands ont pourtant tout essayé pour dissuader leurs jeunes de s’engager dans la Légion. À mesure que croissait le nationalisme, le départ de ces jeunes vers une armée étrangère choquait l’opinion publique allemande. Les nazis ont été les plus virulents. Sous le IIIe Reich, toute allusion à la Légion est prohibée. On crée un camp de concentration à Kislau (pays de Bade) pour “accueillir” les légionnaires en fin de contrat. Au printemps 1939, la nationalité allemande est même retirée aux légionnaires.

19 - Pourtant, la Légion, quoique française, reste un idéal pour des jeunes soldats allemands déboussolés par la défaite en 1918 comme en 1945. En 1945, elle sert d’accueil pour de nombreux Allemands venant des anciennes régions orientales de l’Allemagne, devenues polonaises ou tchèques. Elle permet aussi aux anciens nazis ayant échappé aux foudres de la justice, de se refaire une identité10. Le jeune officier Hélie de Saint-Marc, ancien résistant et réchappé des camps de concentration nazis, se retrouve ainsi dans un bateau pour l’Indochine au milieu d’hommes qu’il a combattus. Ce qu’il en retient, c’est avant tout la capacité qu’a la Légion à d’effacer : “Les hommes avaient mis entre parenthèses leur nom, leur famille, leurs racines, leur nationalité. Ils s’étaient volontairement dépouillés de tout ce qui fait l’apparence sociale. Devant nous, ils étaient nus. La règle tacite était de ne jamais parler du passé. Nous la respections tous, conscients que la moindre curiosité pouvait être une offense. Je partageais avec eux la vision de trop de morts. Comme moi, ils essayaient de vivre avec le souvenir des engloutis11.”

La Légion, creuset de l’intégration à la française ?

20 - Sont-ils pour autant “français par le sang versé” ? Pas si sûr. Leurs noms n’apparaissent pas sur les monuments aux morts des villages de France et il faut attendre la loi du 29 décembre 1999 pour que la France accorde de droit la nationalité française aux légionnaires blessés au combat. Ils n’obtiennent pour toute intégration qu’une carte de résident au bout de trois ans de service à condition d’avoir auparavant obtenu un certificat de bonne conduite. Si le légionnaire veut devenir français, la procédure de naturalisation lui est facilitée : il est dispensé de prouver les cinq années de résidence en France et de passer une épreuve de langue, et la décision est quasiment toujours favorable.

21 - Néanmoins, l’intégration par le sang versé reste un mythe largement entretenu par la France. La grande majorité des légionnaires ne demandent pas la nationalité française. Si la France s’enorgueillit de ce corps spécifique, c’est en vertu de l’illusion qu’elle s’est forgée d’une nation qui attire les étrangers du monde entier, y compris pour combattre à ses côtés. C’est pourquoi la Légion est à l’honneur aujourd’hui lors des défilés du 14 Juillet. Le défilé des compagnies de sapeurs-pionniers, habillés du tablier de cuir et portant la hache, perpétue le mythe du soldat bâtisseur. Ce sont les héritiers des soldats de l’an II, s’enthousiasmant pour une France révolutionnaire aux accents des Lumières. Ce sont les héritiers des soldats de la Grande Armée, conquérant les pays européens avec le Code civil.

22 - Sans doute l’union entre la France et sa Légion repose-t-elle sur une vaste supercherie. La Légion offre une famille et un idéal à des milliers d’hommes dans le monde, une raison d’espérer à une République française en quête de modèles d’intégration. Mais laisser croire que la Légion est l’exemple parfait de l’intégration à la française relève de la construction d’un mythe national.

Notes

1 Appel du 1er août signé Cendrars, Sarlius, Csaki, Kaplan, Berr, Oknosky, Dibroski, Isbicki, Schoumoff, Roldireff, Kozline, Esen, Lioschits, Frisendahl, Israilivitch, Vertepoff, Canudo.

2 Appels reproduits dans l’ouvrage de Jean-Paul Mahuault, Engagés volontaires à la Légion étrangère pour la durée de la guerre, Monts, éd. Grancher, 2013, pp. 82-92.

3 Il existe un monument aux morts commémorant ces volontaires polonais morts pour la France à Neuville-Saint-Vaast, bâti en 1929, « à la mémoire des volontaires polonais qui, le 9 mai 1915, se sont portés à l’assaut de la cote 140 et sont tombés pour la résurrection de la Pologne et la victoire de la France ».

4 Ils furent 2 354 volontaires dans cette légion garibaldienne, dont Lazare Ponticelli, dernier poilu français décédé en 2008 (les légionnaires ont d’ailleurs porté son cercueil). Ce régiment est dissous le 5 mars 1915 et la plupart des “garibaldiens” ont ensuite intégré les rangs de l’armée italienne, l’Italie entrant en guerre à son tour le 24 mai 1915.

5 Le ministère de la Guerre décide de n’ouvrir les recrutements qu’à partir du 21 août (soit le 20e jour de mobilisation) pour éviter l’enthousiasme des premiers jours. Les bureaux de recrutement des Invalides sont pourtant débordés à cette date. Plusieurs bureaux doivent être créés à Paris. Du 21 août 1914 au 1er avril 1915, 25 834 engagements sont signés, dont 6500 Alsaciens-Lorrains, 3393 Russes, 600 Arméniens. Chiffres extraits de l’ouvrage de Jean-Paul Mahuault, op. cit, p. 93.

6 Blaise Cendrars, “L’Égoutier de Londres”, in La Main coupée et autres récits de guerre, Paris, Denoël, 2013, pp. 312-313. Tous les étrangers n’ont pas eu l’enthousiasme de Cendrars. Ainsi, les 200 volontaires américains ont fortement protesté lors de leur réversion dans la Légion dont ils connaissaient la mauvaise réputation. Alan Seeger écrit que la Légion est “un régiment composé presque exclusivement de rebuts de la société, d’individus fuyant la justice et de brutes commandées par des sous-officiers qui nous traitaient tous sans la moindre considération”.

7 Entre 1882 et 1885, il y a 45 % d’Alsaciens-Lorrains et 20 % entre 1899 et 1905 contre 30 % de Français et 25 % d’Allemands. En 1872, est imposé aux “annexés” le service militaire obligatoire allemand.

8 Celle-ci n’est d’ailleurs pas sans risque puisque, insoumis à la loi militaire allemande, les engagés alsaciens et lorrains s’exposent à être arrêtés, condamnés à quarante jours de prison puis incorporés de force dans l’armée allemande s’ils retournent dans leur pays natal. 

9 Voir “Allemands, volontaires”, in Paul-André Comor (dir.), Dictionnaire de la Légion étrangère, Paris, Robert Laffont, 2013, p. 97.

10 Le 2e régiment étranger de cavalerie compte, en mai 1951, 43 % d’Allemands. Leur moyenne d’âge est de 23 ans. On y trouve des anciens de la Wehrmacht, des anciens SS, des anciens des Jeunesses hitlériennes, des jeunes sans ressources.

11 Hélie de Saint-Marc, Mémoires. Les champs de braises, Paris, Perrin, 2002.

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Pour citer cet article

Référence papier

Valérie Esclangon-Morin, « La Légion étrangère, une particularité française », Hommes et migrations, 1306 | 2014, 133-137.

Référence électronique

Valérie Esclangon-Morin, « La Légion étrangère, une particularité française », Hommes et migrations [En ligne], 1306 | 2014, mis en ligne le 01 avril 2017, consulté le 09 septembre 2014. URL : https://hommesmigrations.revues.org/2844

Auteur

Valérie Esclangon-Morin

Historienne, professeur-relai au Musée de l'histoire de l'immigration.


La légion étrangère et la franc-maçonnerie

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18/04/2014

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Au Légionnaire Gilbert… Ils y viennent pour une raison et y restent pour une autre… (Général Christophe de SAINT CHAMAS).

Parler d’un corps d’armée dans un Temple Maçonnique peut paraître quelque peu incongru ! Et pourtant ! La Légion étrangère, qui inspire tout autant l’admiration que le rejet de nombreux concitoyens, qui suscite des fantasmes et souffre de préjugés et d’ignorances, porte en elle des valeurs qui transcendent les races, les religions et qui, à bien des égards, sont proches des nôtres !

La France a hérité du siècle des Lumières des valeurs qui en font un pays unique au monde. Parmi celles-ci, le sacro-saint droit d’asile qui a été qualifié comme étant le droit, pour les réfugiés persécutés, d’être accueillis sur son sol. La Légion étrangère perpétue ce droit, pratiqué à l’extrême, puisqu’on ne demande pas à celui qui veut s’y engager de justifier son passé ni ses origines. Donner à chacun une deuxième chance est un des principes « sacrés » de la Légion étrangère.

Notre Ordre est bel et bien ancré dans le monde des bâtisseurs. Qu’il s’agisse des constructeurs de temples antiques ou de bâtiments cultuels durant le moyen-âge, la Tradition a été perpétué par des Initiés. Ils se sont appelés Pharaons, Collegia, Guildes, Moines bâtisseurs,... De nos jours, les Maçons, Francs et Acceptés, ne sont plus opératifs. Mais n’existe-t-il pas, en France, des soldats bâtisseurs dont la tradition a été conservée à travers les « Pionniers » de la Légion étrangère ?

Ces hommes, à qui on offre le choix de servir un pays qui va devenir le leur, créent une part de mystère qui fait leur renommée. Créé par Louis-Philippe en 1831, ce corps d’armée, qui a eu pour vocation originelle de protéger et d’étendre l’Empire Colonial, est un brassage humain, formidable condensé d’héroïsme et de courage.

Mais alors, pourquoi parler de ces hommes dans nos Temples ? Une phrase, extraite du rite Émulation peut éclairer peut-être cette question : « En votre qualité de citoyen du monde, je dois vous recommander de vous acquitter de vos devoirs civiques d'une façon exemplaire. …Soumettez-vous franchement aux lois du gouvernement étranger qui vous donnerait provisoirement l'hospitalité ou vous accorderait sa protection… »

Quels sont donc les points communs entre ce corps d’armée et notre Ordre ? Sur quelle mythologie et sur quels rites se fondent ses traditions ? De quelles valeurs supérieures se revendique-t-il ? Telles sont les questions auxquelles ce morceau d’architecture ne prétend pas apporter des réponses mais, humblement, susciter quelques pistes de réflexion.

Un mythe fondateur

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Jusqu’en 1863, la Légion étrangère a été considérée comme une armée de fortes têtes vouée à faire la sale besogne de la colonisation ! Le 30 avril 1863, lors de l'expédition française au Mexique, la bataille de Camerone va définitivement changer l’esprit de ces soldats et le regard porté sur eux.

Il s’agit d’un combat qui opposa une compagnie de soixante fantassins de la Légion étrangère, commandée par le capitaine DANJOU et deux sous-lieutenants, à une armée de deux mille mexicains. Assiégés dans une hacienda, ils résistèrent durant 11 heures, tuant 300 ennemis et en blessant 300 autres.

A dix heures du matin, alors que les Français, qui n'ont rien mangé depuis la veille, commencent à souffrir de la soif et de la chaleur, un officier mexicain leur somme de se rendre, ce à quoi le capitaine DANJOU fait répondre : « Nous avons des cartouches et ne nous rendrons pas ! ». Il fait alors jurer à ses hommes de lutter jusqu’au bout. Il tombera à la mi-journée, touché en plein cœur. Neuf heures durant, les Légionnaires vont affronter les troupes mexicaines, sans boire, étouffés par la fumée de l’incendie provoqué par l’ennemi.

En fin d'après-midi, il ne reste en état de combattre que six Légionnaires. Les mexicains somment alors les survivants de se rendre. Le caporal MAINE répond : « Nous nous rendrons si vous nous faites la promesse la plus formelle de relever et de soigner nos blessés ; si vous nous promettez de nous laisser notre fourniment et nos armes. Enfin, nous nous rendrons, si vous vous engagez à dire à qui voudra l'entendre que, jusqu'au bout, nous avons fait notre devoir », ce à quoi l'officier mexicain répond : « On ne refuse rien à des hommes comme vous ! » Les rescapés sont présentés au colonel MILAN, qui s'écrie : « Mais ce ne sont pas des hommes, ce sont des démons ! » Sur un monument commémoratif, érigé en 1892 au Mexique, figure l'inscription :

« Ils furent ici moins de soixante
Opposés à toute une armée.
Sa masse les écrasa.
La vie plutôt que le courage
Abandonna ces soldats Français
Le 30 avril 1863
A leur mémoire la Patrie éleva ce monument ».

Aujourd'hui encore, les militaires mexicains rendent hommage aux soldats français et mexicains tombés ce jour-là en présentant les armes lorsqu'ils passent devant ce monument.

Chaque 30 avril, les héros de ce combat sont honorés dans tous les régiments de la Légion ; à cette occasion est proclamé le récit du combat de Camerone. L'idée du « serment de Camerone » est là pour rappeler le courage et la détermination des Légionnaires ainsi que le respect à la parole donnée accomplie jusqu'au sacrifice suprême. Aujourd'hui, la main du capitaine DANJOU, prothèse de bois provenant d’une amputation antérieure, est conservée dans la crypte du musée de la Légion étrangère à Aubagne.

Pour fédérer tous ces hommes il fallait leur donner un passé commun, une histoire commune, quelque chose qui dépasse l’engagement de chaque individu. C’est le fait d’arme de Camerone qui tient ce rôle et constitue un acte fondateur.

Le point essentiel de cette histoire se situe à l’instant même où le capitaine DANJOU, transcendé, fait prêter serment à ses hommes. Ce serment, inattendu et exceptionnel dans de telles circonstances, a été gravé par le sang. Le mythe qui en est issu de fait, est le Légionnaire qui trouve la rédemption dans la mort. Ainsi, on plonge implicitement dans le mythe sacrificiel ; on trouve le Salut à travers le don de sa personne…

Il est important de noter que ce fait d’arme s’est déroulé dans le but de remplir une mission particulière qui consistait à protéger de l’armée mexicaine un important convoi français. Depuis lors, remplir la mission confiée et respecter la parole donnée sont devenu sacrés pour la Légion étrangère. Du reste, l'expression « faire Camerone », toujours usitée dans la Légion, signifie remplir sa mission jusqu’au bout, sans concession, s’il le faut au prix de sa vie.

Des rites

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Les traditions au sein de la Légion étrangère sont nombreuses et issues directement de son histoire : du « vert et rouge » au pas lent de ses unités, en passant par les pionniers et Le Boudin (chant de marche de la Légion). Mais contrairement à une idée reçue, elles ne sont pas immuables et vivent avec l'Institution. Elles sont officiellement regroupées au sein d'un « Recueil des traditions de la Légion étrangère » édité par un Comité des Traditions.

La formation des Légionnaires est certes une suite de stages professionnels sophistiqués, mais elle est également émaillée de temps forts qui exigent beaucoup d’abnégation.

Et tout d’abord le changement de nom, pour toute nouvelle recrue, est systématique. Il symbolise la mort de l’homme ancien, permettant de « repartir » sur de nouvelles bases. C’est en quelque sorte une nouvelle naissance. La Légion est le seul lieu où l’on peut « recommencer » sa vie. Mais cette deuxième chance ne blanchit pas le Légionnaire de toute faute qu’il aurait pu commettre avant son admission. Ce n’est qu’au bout de trois ans de service, après qu’il ait prouvé sa bonne moralité et une réelle volonté de s’amender, qu’il peut recouvrer, à sa demande, sa véritable identité.

D’autre part, un des éléments fédérateurs importants dans la Légion est la langue. La majorité des candidats à la Légion ne parlent pas le français. A l’évidence, pour des raisons de sécurité et d’efficacité militaires, tout soldat doit comprendre les ordres qui lui sont donnés en français, et pouvoir communiquer avec ses compagnons. Durant leur formation initiale, chaque légionnaire apprend donc le français, ce qui le lie aux autres de manière encore plus forte puisque sa langue maternelle, si elle n’est bien entendu pas oubliée, n’est plus pratiquée dans les rangs.

Cette formation est ponctuée par une série de « rites », importants pour tout jeune Légionnaire : après un premier stage de sélection, les engagés volontaires retenus reçoivent leur premier contrat d’engagement dans le musée d’Aubagne, où un officier les informe de l’importance de leur futur statut. Ensuite, à l’issue de leur formation, et après avoir prouvé qu’ils en étaient dignes, les nouvelles recrues sont invitées à coiffer pour la première fois leur képi blanc. C’est une cérémonie solennelle durant laquelle ils récitent, en chœur, avec fierté, la tête haute, et dans un français encore hésitant, leur code d’honneur, véritable serment du Légionnaire.

Enfin, la Commémoration annuelle de CAMERONE est un temps fort de la Légion. Le centre de Commandement, situé depuis 1962 à Aubagne, près de Marseille, possède une « voie sacrée » sur laquelle est présentée, puis « élevée », la main du capitaine DANJOU, véritable relique enfermée dans une chasse. Le reste de l’année, ce trophée repose dans une crypte souterraine dans laquelle toute nouvelle recrue est tenue de se recueillir pour honorer tous les Légionnaires morts au combat.

Une mort symbolique, une renaissance sous une autre identité et une autre langue, celle du pays pour lequel on est prêt à donner son sang, une fraternité sans faille et de principe, c'est-à-dire définitive, enfin un rappel périodique et immuable du mythe de CAMERONE ; nous sommes bien en présence de rites pratiqués par des hommes unis dans une cohésion inébranlable.

Une fraternité

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Soyons nets : l’Homme incline facilement au « chacun pour soi », il ne naît pas avec une conscience universelle. S’il lui arrive, dans le cours de son existence, de se sentir solidaire, c’est dans certaines situations, telles que la guerre ou toutes autres épreuves partagées, et ce sentiment disparaît généralement avec les circonstances qui l’ont fait naître.

Or, cette « fraternité de combat » ne constitue pas la véritable « Fraternité », telle que nous l’entendons, nous, et telle que l’entendent les Légionnaires. En effet, elle n’est pas « totale » et, dépendant trop des circonstances qui l’ont créée, reste surtout limitée à quelques individualités vivant ces circonstances. Ainsi des hommes, durant une guerre, peuvent fraterniser, ce rapprochement ne restant que circonstanciel et s’évanouissant souvent avec le temps.

Dans la Franc-Maçonnerie, on admet la réalité de la Création par la notion même de « Fils d’un même Père ». Il est donc normal de nous concevoir « en Fraternité » avec nos semblables : c’est même, presque, une attitude réflexe. Mais alors, comment les Légionnaires déterminent-ils leurs liens entre eux et avec autrui ? Pour prendre conscience de l’importance et de la réalité de la Fraternité telle qu’ils la conçoivent, il est bon de rappeler le contenu de leur code d’honneur, appris et récité en chœur par les nouvelles recrues le jour de la remise du képi blanc :

Art. 1 - Légionnaire, tu es un volontaire, servant la France avec honneur et fidélité (devise de la Légion étrangère NDR).
Art. 2 - Chaque légionnaire est ton frère d'armes, quelles que soient sa nationalité, sa race ou sa religion. Tu lui manifestes toujours la solidarité étroite qui doit unir les membres d'une même famille.
Art. 3 - Respectueux des traditions, attaché à tes chefs, la discipline et la camaraderie sont ta force, le courage et la loyauté tes vertus.
Art. 4 - Fier de ton état de légionnaire, tu le montres dans ta tenue toujours élégante, ton comportement toujours digne mais modeste, ton casernement toujours net.
Art. 5 -Soldat d'élite, tu t'entraînes avec rigueur, tu entretiens ton arme comme ton bien le plus précieux, tu as le souci constant de ta forme physique.
Art. 6 - La mission est sacrée, tu l'exécutes jusqu'au bout et, si besoin, en opérations, au péril de ta vie.
Art. 7 - Au combat, tu agis sans passion et sans haine, tu respectes les ennemis vaincus, tu n'abandonnes jamais ni tes morts, ni tes blessés, ni tes armes.

Il faut rappeler que l’homme n’est jamais aussi isolé que face à la mort. Or c’est précisément ce dénouement qui est au centre du mythe de la Légion : « tu exécutes ta mission jusqu'au bout, …au péril de ta vie », « …tu n'abandonnes jamais ni tes morts, ni tes blessés… ». Dans le fond, ces hommes, animés du désir de changer leur vie et de protéger celle de leurs semblables, font preuve d’une générosité totale et d’un sentiment de solidarité, qu’ils nomment justement « FRATERNITÉ ». En ce sens, implicitement, leur sort est transcendant. Ils se retrouvent d’une certaine manière au cœur même du sacrifice christique.

A défaut d’une image du Dieu-Père, engageant naturellement une perspective de « filiation », c’est la Légion qui va leur donner la conscience d’appartenir à une même « famille », vivant d’elle et la faisant vivre. Du reste, à partir du moment où un homme a rempli avec satisfaction son contrat avec la Légion, celle-ci devient son « obligé ». Elle doit l’aider au moindre problème durant toute sa vie. Cette « morale laïque », morale raisonnée par opposition aux morales impératives des Religions, induit une solidarité sans faille.

Notre Ordre conçoit la Fraternité comme une constante universelle. Mais, à bien des égards, la Fraternité vécue au sein de la Légion dépasse les hommes eux-même par les références existentielles et la mythologie auxquelles elle renvoie. Ainsi, ces hommes, qui recommencent une seconde vie au sein de leur nouvelle famille, famille de substitution, la Légion étrangère, s’interdisent par principe toute discussion relative à leur passé. Il existe entre eux, pour toute leur vie, ce lien invisible, discret, cet attachement indéfectible qu’ils tissent dès leur formation.

Conclusion

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Le Légionnaire, porteur de tous les pêchés, nourrit l’imaginaire populaire. Par définition les premiers sur le terrain et les derniers à partir, les Pionniers, qui perpétuent la tradition du Légionnaire bâtisseur, jouissent du privilège de défiler, avec gants blancs et tablier, à la tête de la troupe. Cette tradition est à rapprocher de l’hommage particulier que rend la Légion à ses sous-officiers, ses « maréchaux » comme on a coutume de les appeler, en laissant à trois des leurs l'honneur de défiler en tête de toute la Légion. Un de leurs chants exprime ainsi leur fierté :

« On nous appelle les fortes têtes,
On a mauvaise réputation.
Mais on s’en fout comme d’une musette,
On est fier d’être à la Légion.
Et ce qu’ignore le vulgaire,
C’est que du soldat au colon,
Ils ont une âme de mousquetaire,
Les Légionnaires ! »

Malgré son apparente rigidité, il n’y a pas plus large d’esprit que la Légion étrangère, accueillant plus de 130 nationalités différentes et les fédérant dans un but unique. Elle constitue un important creuset social. Celui-ci, paradoxalement, pourrait être considéré comme un archétype de la République, au sens français du terme. C’est un lieu de brassage et d’acceptation de règles qui transcende les ethnies, les origines, les religions. Accepter ces règles, c’est devenir français, « français par le sang versé et non le sang reçu… » Une suggestion : dans la Franc-Maçonnerie, ne rassemble-t-on pas ce qui est épars ?

Les mythes sur lesquels se fonde notre Ordre sont révélés et gravés dans le Volume de la Loi Sacrée. Pour la Légion, c’est un mythe construit par l’homme à l’issue d’une épopée historique : CAMERONE, véritable fait d’arme. Il n’empêche, ce mythe est transcendant en ce qu’il engage la vie même de ceux qui y adhèrent.

A la peine comme à l’honneur, le Légionnaire est représenté comme le soldat bâtisseur, celui qui ouvre les voies du progrès au milieu des ténèbres. Le mythe du Légionnaire qui trouve la rédemption dans la mort symbolise, d’une certaine façon, le mythe sacrificiel. On gagne le Salut à travers le don de sa personne…

Ces hommes, qui ont un « passé » et pas d’avenir, et qui, arrivés dans la Légion, oublient leur passé et gagnent un avenir, ne sont point dans le sacré. Pas plus que la Légion n’est un ordre initiatique. Mais un mystère les distingue radicalement de toutes les armées du monde et en font les combattants les plus redoutés de tous. Leur statut juridique demeure exceptionnel. Leur silence et leur pudeur les honorent. A bien des égards, les valeurs dont ils se revendiquent touchent à l’Universel…

Peu importe ce qui motive un homme à s’engager dans la Légion, qu’il y soit attiré par le prestige ou par un désir de changer de vie, le pli sera pris. Une Fraternité entière et une obligation de sacrifice s’imposeront à lui. Il demeurera Légionnaire toute sa vie. Dans notre Ordre également, des hommes et des femmes « s’engagent » pour des raisons diverses mais qui leur sont propres. L’état de Maçon leur sera définitivement acquis.

Je dois maintenant vous faire part d’un point de vue tout à fait personnel. Je suppute que des officiers supérieurs, Francs-Maçons, au sein du Commandement de la Légion, ont vraisemblablement dû influencer durant son histoire l’esprit de cette institution et, ainsi, favorisé la formalisation de nombre de ses rites.

Enfin, pour être franc, et après avoir étudié les valeurs indéfectibles qui sont les leurs, je me pose la question de savoir combien, parmi nous, seraient capables de risquer leur vie pour sauver un Frère ! Telles sont les réflexions que m’inspire, en tant que Franc-Maçon, la Légion étrangère.

A\ L\


L'uniforme du légionnaire dans les R.M.V.E.

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Le grand décalage ?

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Edito du Président

Paris le 7 juillet 2014

La guerre de « 14 » et l’année de son centenaire : le temps de la réflexion. 

Beaucoup de Français et sans doute d’Européens découvrent un conflit d’une telle ampleur qu’ils n’arrivent pas à comprendre comment des hommes et des femmes ont pu supporter un tel effort, un tel engagement et surtout un tel sacrifice. Certes, il y a des Français qui, par conviction et par fidélité, ont cultivé la mémoire de ceux qui ont vécu cette forme de l’apocalypse due à la fureur humaine. Nous sommes en effet heureusement nombreux à avoir arpenté les hauteurs de Verdun, celles de la Somme ou le chemin des Dames, à avoir observé avec attention les monuments aux morts en lisant les noms de tous nos compatriotes qui ont fait leur devoir pour que nous puissions vivres libres, dans la dignité, sur la totalité de notre patrie enfin reconstituée.

Saluons nos jeunes grands anciens qui ont tout donné à la tête de leurs hommes, saluons aussi leurs chefs qui ont fait le mieux possible avec détermination, compétence et courage, alors même que le rapport de forces ne nous était pas favorable. Trop d’historiens actuels se penchent avec une loupe sur des événements pour trouver ensuite des raisons de critiquer le commandement, à tous les niveaux. Relisons de préférence les grands livres de l’après-guerre écrits par des acteurs, chefs de guerre ou écrivains de vocation, là nous trouverons matière à mieux comprendre. Heureusement il y a toujours des exceptions, c’est pourquoi nous avons remis le prix littéraire à l’historien Jean-Pierre Rioux pour son excellent livre « La mort du lieutenant Péguy » et examiné avec un grand intérêt le livre de l’historienne Frédérique Neau-Dufour, « La première guerre de Charles de Gaulle 1914-1918 ».

Notre société, un siècle plus tard, a bien changé, tout le monde le dit et tout le monde ou presque le croit ; elle s’est fragmentée et l’intérêt personnel y a pris une place centrale. Ce grand décalage entre les générations rendrait difficilement compréhensible par nos contemporains la capacité d’un peuple à lutter pour sa liberté et sa dignité. La mondialisation, cliché à la mode, ne doit pas faire oublier que chaque pays, chaque peuple, a des ambitions et des revendications qui ne disparaissent pas.

En juin 2014 la vraie fausse boutade du président Poutine qui, parlant de la Russie, aurait dit qu’en période de crise elle n’avait confiance qu’en deux alliés, son Armée et sa Flotte, éclaire d’une façon crue la réalité des rapports de puissance. Il en était ainsi il y a 100 ans, il en était de même il y a 70 ans au moment de la Libération et c’est toujours le cas pour les États qui jouent un rôle dans le monde. Il est bon d’avoir des alliés, des alliances sérieuses, mais il convient de compter sur ses propres moyens, sa propre stratégie, sa propre détermination, son propre courage. La France l’a compris, grâce au général de Gaulle, et dispose de la bombe nucléaire, ultima ratio, comme arme de dissuasion mais celle-ci, pour rester crédible, ne peut être isolée de forces conventionnelles d’un certain volume et même d’un volume certain, d’où l’importance du débat très actuel. L’Allemagne et la Grande-Bretagne sont trop liées stratégiquement aux États-Unis pour constituer les bons contre-exemples que certains « boutiquiers de Bercy » voudraient utiliser.

Les générations qui passent sont donc bien différentes les unes des autres mais y a-t-il un si grand décalage entre elles dès lors que l’on parle de la défense de notre pays ? Le terme valeur est-il trop galvaudé ? Quels sont les mot-clés à expliquer aux plus jeunes pour leur permettre de mieux préparer et vivre leur avenir ? Pour ma part je recommande une meilleure transmission de la notion de devoir trop souvent abandonnée au profit exclusif du fourre-tout des droits « humains ». Il n’y a pas de droits sans devoirs et réciproquement. Le sens du devoir est une expression supérieure de la liberté individuelle et du désintéressement ; c’est ce qui en fait toute sa vertu. En cette période de commémorations, il est temps, au lieu de s’appesantir uniquement, dans un sentimentalisme souvent hypocrite, sur l’immensité des sacrifices de nos anciens (« boucherie » pour certains pseudo historiens prêts à tout rabaisser), parlons du sens du devoir, de l’Honneur et de la Patrie.

 

L’écrivain, le poète, le lieutenant Péguy, dans la continuité de son engagement intellectuel et moral, est tombé face à l’ennemi, en ce début de la bataille de la Marne, comme des centaines de saint-cyriens, comme des milliers de Français, en faisant son devoir et ici, comme Péguy l’écrivait lui-même, le «Devoir sacré de défendre la Patrie ». « Que chacun fasse son devoir »…, tout simplement, pour la France, composée de sa nation et de son histoire, du passé vers son avenir.

Toujours d’actualité !

Général de corps d'armée (2s) Dominique DELORT

Les cahiers du Cesat N° 35

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Allocution du Général CAUBEL devant l’ANAPI le 7 mai 2014

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LA LÉGION ÉTRANGÈRE AU FRONT (1915)

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