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Une galerie des Dons au musée de l’Histoire de l’Immigration

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Jérôme Coignard - 15 mai 2014

La machine à coudre de la mère d'Albert Pezzoni (®Lorenzo-le don d'Albert Pezzoni).

Au musée de l’Histoire de l’Immigration, la nouvelle galerie des Dons est ouverte au public depuis avril dernier. 250 objets y évoquent sans pathos des parcours singuliers et poignants.

Comme tout musée, le musée national de l'Histoire de l'Immigration bénéficie de la générosité de donateurs. Leurs noms ne sont pas gravés sur de pompeuses plaques de marbres. Leurs dons ne sont ni des toiles de maîtres, ni des porcelaines rares ou de précieuses sculptures mais des objets quotidiens, de la théière en métal au châle brodé, du carnet de souvenirs au pain de cire à cacheter. Et pourtant ces objets sont précieux. Car à chacun d'eux se rattache une histoire familiale, une histoire de migration avec ses espoirs et ses succès, ses amertumes et ses drames. Ce projet original a vu le jour dès la création du musée en 2007. Celui-ci présentait alors deux vitrines d'objets mis en dépôt par leurs propriétaires. Petit à petit, d'autres objets sont venus s'ajouter, spontanément. Et avec eux d'autres histoires singulières, qui nourrissent l'histoire collective de l'immigration. Le projet a mûri, les dépôts sont devenus des dons. Chacun de ses objets fait désormais partie du patrimoine national. Petit détail technique mais significatif : pour chacun d'eux, un récit a été recueilli, et c'est à ces récits que renvoient les numéros de l'inventaire qui a été dressé.

Espoirs déçus d'une machine à coudre

La galerie se déploie sur 450 m2 au premier étage du musée, autour de l'ancienne Salle des Fêtes du Palais des Colonies devenue forum du musée. Dans une scénographie limpide, signée Mathilde Meignan, des vitrines hautes et basses se succèdent. À l'intérieur trônent les objets entourés de quelques documents, photographies, carte d'identité, diplôme militaire... Le récit familial recueilli par Hélène du Mazaubrun, conservatrice chargée de la galerie des Dons, replace ces objets dans leur contexte. Une note plus générale situe cette histoire individuelle dans le contexte global de l'immigration de telle ou telle population. L'itinéraire du ou de la propriétaire de l'objet est tracé sur la vitre : Constantinople, Toulon, Alexandrie, Saigon, Lyon, Téhéran... Voici, par exemple, la machine à coudre d'Antonia Giuseppa Pezzoni donnée par son fils, une machine Singer au piétement caractéristique. Albert Pezzoni raconte : « Je possède une machine à coudre Singer des années 1920 avec un pied en fonte. Cette machine appartenait à ma mère qui a immigré de sa Vénétie natale au début des années 1930 pour s'établir à Suresnes, où j'habite toujours. Cet objet représentait toute sa fortune, tous ses espoirs. J'imagine la difficulté pour elle de la faire venir, par train, de son petit village [...] Ma mère pensait améliorer ainsi notre situation, mais cette machine n'a jamais rien cousu d'autre que nos vêtements d'enfants, à mon frère et moi. »

« Aucune envie d'aller nulle part »

Voici la médaille de chevalier des Arts et Lettres d'Ora Adler. Cette médaille, Ora avait failli la rendre en 1995 lorsque la loi dite Pasqua l'avait obligée à fournir à nouveau les preuves de sa nationalité française... D'origine juive, son père, le photographe de plateau Emmanuel Lowenthal avait été brutalement destitué de son travail. C'était à Berlin, en 1933. La famille franchit clandestinement la frontière franco-allemande cachée dans un corbillard... Et cette tête minuscule, fragment peut-être de quelque statuette africaine... C'est en fait une sculpture en mie de pain, offerte à la donatrice, Frida Rochocz, par une victime de la dictature en Argentine. Elle-même a dû fuir l'Argentine en 1976 : « Je n'ai voyagé que parce que j'étais obligée. Je ne suis pas venue de mon propre gré. Je n'avais aucune envie d'aller nulle part. » Cette sculpture était une sorte de talisman, qu'elle conservait toujours dans sa poche. Plus de 500 000 Argentins ont quitté leur pays sous la junte du général Videla... Ici, sont exposées les bottes du soldat Lazare Ponticelli, le « dernier des poilus », mort en 2008. Originaire d'Italie, il avait fui la misère, pieds nus, en s'accrochant à l'arrière d'un train. En 1914, trop jeune pour s'engager, il avait dissimulé son âge et rejoint la Légion étrangère : « J'ai voulu défendre la France. C'était une manière de dire merci ». Plus loin, une truelle de maçon : « Elle est de la variété briqueteuse », nous renseigne le texte d'accompagnement, par opposition à la truelle lisseuse des cimentiers. « Elle a perdu, par l'usure du travail, une bonne partie de sa longueur. Si la virole est mangée de rouille, c'est dû à mon manque de soin. Papa ne l'eût pas toléré. J'ai aussi-et je m'en sers !-sa pioche, ses pelles, la grande ronde à gâcher et la carrée pour vider la brouette, sans oublier le cure-pelle taillé dans une cuillère à soupe aplatie à la masse, objets hautement symboliques et, pour moi, infiniment précieux ». Celui qui parle ici, c'est François Cavanna, l'écrivain. Là, c'est Saïd Abtout, le berger devenu champion de ski, exilé une seconde fois d'Algérie en 1990, au début de la « décennie noire », suite à des menaces de mort proférées par des islamistes. Ailleurs, c'est Arnold Bac, qui offre en souvenir de son père Ovche Bâc le drapeau de l'Union des engagés volontaires et anciens combattants juifs (1939-1945). Ce sont, en tout, quarante parcours de vie qui s'offrent ainsi au visiteur, sans fioritures et sans pathos. Quarante épopées soudain mises en lumière et partagées. À la fin du parcours, un « arbre à dons » invite à prendre contact avec le musée pour déposer un témoignage.


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