Flexible flanc mat sous le corsage d'indienne au nœud lâche
elle s'exile d'un regard trop prompt
vers le camaïeu d'horizons liquides.
Je souffle : Thi-Bâ !
Une fossette ensoleille sa joue ; deux virgules inverses
ponctuent son râble de batracienne
qu'emprisonne
un écheveau de reflets moirés :
Passe ton chemin soldat !
De la berge, je la respire. Elle
à l'odeur métisse de bétel et de mangue.
Délicate ondine de proue
greffée à l'amphore des hanches
son buste
émerge de la rizière.
Nhà-qué ou princesse ? Qui le sait soldat ?
A tes souhaits !
Sous laile d'ombre
D'un chapeau de fibres tressées
Luisent
Des yeux qu'on dirait peints sur soie.
Le ciel et l'eau, mêlant leurs ocres
fardent sa paupière
Je dis : Thi-Bâ ! Vive, elle se détourne.
Qu'espérer d'une nymphe
Toute à l'éploiement de son aile ?…
Le corsage respire à petits frissons
attentive, la nuques est envers de regard
les cuisses, la main qui tend dessinent un sillage d'intentions.
Elle a décoché, j'en jurerais ce mince sourire à dents crues :
On verra, soldat ! Le temps va !
Quand ?…
Je crie Thi-Bâ !… Elle passe …
Nonchalante, la traîne d'onde
touche mes pieds nus
les recouvre.
Jean-Marie SELOSSE - 1985