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La page des poèmes de Von Palaïeff
Le Capitaine Pierre-Eugène Bourgin est né le 7 janvier 1924 à Saint-Nizier-de-Fornas dans la Loire et mort le 1er mars 1959 au douar Ouillen (région de Souk-Ahras, Algérie). Officier et poète, il publie ses œuvres sous la signature de Von Palaïeff, pseudonyme choisi alors qu’il sert à la 3e Compagnie saharienne portée de la Légion étrangère.
Désigné pour servir au 2e régiment étranger de cavalerie (2e REC), il rejoint Oujda en Algérie le 25 juillet 1954. Initialement prévu pour un renfort à destination de l’Extrême-Orient, il gagne Nouvion en Algérie le 10 décembre, mais il est désigné pour encadrer des compagnies lors d’exercices aéro-transportés de type « Blizzard » avec lesquelles il fait une tournée de police (Prévention de l’Oranie) dans la région de Tlemcen. Il est affecté à la 3e CSPL au Fort Leclerc à Sebha, qu’il rejoint 23 mai 1955. Il est promu au grade de capitaine le 1er juillet 1956. Affecté à la compagnie d’instruction des cadres au groupement d'instruction de la Légion étrangère (GILE) du 1er Régiment étranger d'infanterie à Sidi bel-Abbès, le 1er août, il effectue un stage de sauts au camp de Pau-Astra, du 4 mars au 4 mai 1957, et en juillet, il est affecté au 2e REP à Philippeville.
En opération, il est blessé mortellement d’une balle le 1er mars 1959 à la tête de sa compagnie portée. Il décède pendant son transport vers l’hôpital de Souk Ahras. En Afrique du Nord il a gagné une citation à l’ordre du corps d’armée, une à l’ordre de la brigade et une à l’ordre de la division. Lors de son décès, une ultime citation à l’ordre de l’armée, accompagne la croix d’officier de la Légion d’honneur, attribuée à titre posthume.
Von Palaïeff
SI
Parfois crevé de faim et préféré mourir.
Si tu as vu trop souvent trop de jeunes en liesse,
Toi qui n'a jamais eu même envie de sourire.
Si tu n'as pas connu l'affection d'une mère
Et la joie qui doit être de ne point vivre seul,
Si tu as tout perdu du fait de la guerre
Qui cache tant de deuils des plis de son linceul.
Si tu veux comme moi ne pas te résigner,
Car l'homme doit lutter, il faut que tu le saches,
Arrache à la vie ce qu'elle peut te donner....
La vie n'appartient pas aux veules et aux lâches.
Si tu crois en Dieu, tu pourras lui parler
Lui dire tes malheurs, lui raconter ta peine,
Le Dieu des malheureux n'est pas un Dieu altier
Le Dieu des malheureux est un Dieu qui nous aime.
Si comme moi tu sers, anonyme mais fier
Des épaulettes rouges et de ton képi blanc.
Tu sais que nos anciens étaient de chaque guerre,
Qu'ils se battaient déjà quand nous étions enfants.
Et si tu dois un jour, dans la boue des rizières,
Combattre tel un démon sous un soleil brûlant,
Tu n'auras comme moi, tu le sais légionnaire,
Que le seul droit de vaincre ou de verser ton sang.
Von Palaïeff
Légende de IMAOUENE
Que les plus vieux palmiers n'en ont plus souvenance.
Dieu fit le don un jour à tout le Sahara
De trois présents sacrés : De l'eau en abondance,
Un soleil très chaud et du sable d'or fin.
Les hommes étaient heureux, les troupeaux étaient gras,
Aucun besoin n'était aux peuples sahariens
De travailler la terre. Les hommes reconnaissants
Regardaient chaque soir vers le soleil couchant
Et des heures durant psalmodiaient avec cœur
Des litanies ferventes à leur Dieu bienfaiteur.
Mais un jour de fête les tribus s’enivrèrent
De l'alcool des dattes et elles en oublièrent
De chanter dans la nuit et de remercier Dieu.
C'est depuis ce jour là, m'a dit un vieux Targui
Que le sable a brûlé sous un soleil de feu,
Que les palmiers sont morts sauf dans les Oasis,
Et que l'eau ne court plus partout au Sahara.
Von PALAIEFF
Le soir du 30 avril
Un rêve m'a confié qu'au soir du 30 avril
Les morts de la Légion s'évadaient de leurs tombes
Et venaient par milliers des quatre coins du monde
Dessiner dans la nuit d'interminables files.
Et leurs os de poussière, encore rougis de sang,
Supportaient dans le ciel, plus beau qu'une auréole,
Deux épaulettes rouges et puis un Képi Blanc
Piquetés dans la nuit des éclairs des lucioles.
J'ai voulu leur parler, mais ils n'entendaient point.
J'ai voulu leur faire signe, ils ne me voyaient pas.
Les Morts de la Légion défilaient devant moi….
Et j'ai cru reconnaître plusieurs de ces anciens.
Qui sont tombés là-bas dans la boue des rizières
Pour l'Honneur du Drapeau et puis des Képis Blancs…
Pour fêter Camerone, nos Morts sortaient de terre
Et pendant une nuit redevenaient vivants.