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Légionnaire toujours...

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2014


Infiltrer les unités d’élite

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14/04/2014

La mission de Fabrice Pougez : passer ses montres au poignet des forces spéciales. Et le Haut-Saônois de naissance a réussi.

Fabrice Pougez (à gauche) remet au général de Saint-Chamas un exemplaire de la montre Légion étrangère. DR

La mer, l’air et la terre. Trois éléments que Fabrice Pougez s’est mis en tête de conquérir. À sa façon. Par procuration. Mais avec la crème de la crème. Et c’est tout naturellement qu’il a choisi la première lettre de chacun de ces éléments, au moment de créer sa marque horlogère : MAT. Le cap était tracé, l’ADN clairement identifié.

Du rêve à la réalité, se matérialisait plus qu’un fossé que cet ex-pompier de Paris, aujourd’hui âgé de 43 ans, a su combler. Le natif de Haute-Saône – « Je suis originaire de Jussey, même si aujourd’hui je vis à Paris »-, a fait ses gammes chez France Ébauches, en tant que responsable des ventes pour l’Europe, avant de choisir de voler de ses propres ailes vers de nouvelles aventures.

Le RAID d’abord puis l’effet boule de neige

Au cours de ses pérégrinations, il a su tisser des relations et se constituer un solide réseau. Précieux si ce n’est indispensable quand on veut jouer dans la cour des grands. D’autant que, forcément, d’autres acteurs du microcosme ont les mêmes ambitions et assurément une puissance de feu autrement plus percutante.

Pour ouvrir les portes qu’il ciblait, encore fallait-il avoir dans sa manche quelques solides atouts. Son objectif n’était-il pas d’équiper les unités d’élites ? Il en convient : la présence de son frère au sein du RAID a sans doute participé à abattre la première barrière. Après, il fallait être à la hauteur de ses prétentions pour ne pas être renvoyé dans les cordes. Dans ces milieux-là, on ne s’embarrasse guère de manières pour éconduire un illuminé.

« Il faut savoir écouter les gens, sachant qu’ils ont une culture de la montre. Il faut savoir se faire accepter et ne pas nécessairement venir en costard-cravate pour présenter son projet », décode sobrement ce patron qui détonne dans le milieu. Il faut aussi cerner les besoins et ne pas vouloir imposer des montres régies par les propres codes de sa marque comme d’autres ont voulu le faire.

À l’évidence, la petite maison française née en 2007 a su convaincre et a brillamment négocié son baptême du feu. « Après le RAID, c’est vrai, on a bénéficié d’un effet boule de neige. »

Le GIGN, les commandos de marine, le commando Jaubert, le Commandement des opérations spéciales, le Groupe d’appui opérationnel (GAO), la DST, le Groupe sécurité de la présidence de la République (GSPR), le Service de protection des hautes personnalités (SPHP), l’Association nationale des officiers de réserve de l’Armée de l’air (ANORAA) et… les pompiers de Paris ont tous succombé et sont équipés de garde-temps signés MAT. Pas d’échec !

Il y aura bientôt autant d’insignes blasons épinglés au tableau de chasse de l’horloger que de médailles sur la poitrine d’un vieux général de l’ex-URSS. Et ce n’est pas fini. Dernière unité d’élite à être tombée dans l’escarcelle : la Légion étrangère.

La carte de visite s’enrichit. De quoi séduire désormais au-delà des cercles d’initiés des unités d’élite et s’attaquer au grand public. C’est la prochaine mission.

Sam BONJEAN


En souvenir du Capitaine Danjou et de la 3° Compagnie

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12.04.2014

Un détachement du 4° R.E rendra les honneurs (Photos Archives, Avril 2013).

Le 151e anniversaire du combat de Camerone sera commémoré aujourd'hui samedi 12 avril, avec le concours d’un détachement du 4° Régiment Etranger de Castelnaudary et l’Amicale des Anciens de la Légion étrangère (AALE). Les porte-drapeaux se retrouveront au monument aux Morts, avant la messe célébrée à 10 h en l'église Saint-Pierre, par l'abbé Raymond Cazaban.


A 11 h, cérémonie au pied de la stèle de Jean Magrou. Après les sonneries et l'hommage aux Morts, le cortège se rendra devant la maison natale du Capitaine Jean Danjou. L'AALE donnera lecture du récit de la bataille qui opposa le 30 avril 1863 dans l’hacienda de « Camaròn de Tejeda », les légionnaires du 1er R.E aux résistants mexicains. La cérémonie prendra fin en mairie ou sous la halle, avec le traditionnel vin d’honneur, offert par la municipalité.

Les Burundais devraient se tailler la part du lion

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Orne - 12 Avril

Tenant du titre, Abraham Niyonkuru affiche une très belle forme et ne compte pas se laisser surprendre dimanche. | Archives Maxime Letertre

41e Alençon-Médavy, dimanche (13 h). Pour les 40 ans de la course, les coureurs burundais vont certainement se montrer aux avant-postes.

Quand les Kenyans ne sont plus là, les Burundais s'éclatent ! Le Burundi a beau être un tout petit pays d'Afrique de l'Est coincé entre le Rwanda, la République démocratique du Congo et la Tanzanie, et peuplé de seulement 9 millions d'habitants, il n'en demeure pas moins important - à son échelle - sur la carte du fond international.

Comme ses grands voisins du Kenya et de l'Éthiopie, énormes pourvoyeurs d'athlètes de haut niveau depuis des décennies, et malgré sa faible superficie (28 000 km2), le pays regorge de hauts plateaux... De quoi parfaire le talent des siens en course à pied. « C'est vrai qu'ils essayent de copier le modèle kenyan même si leurs montagnes sont moins importantes en terme d'altitude », explique Philippe Planque, l'entraîneur dunkerquois d'Abraham Niyonkuru.

Sauf surprise, le licencié à l'Entente angevine athlétisme devrait à nouveau mettre tout le monde d'accord en forêt d'Écouves. Car le tenant du titre, 24 ans, est en grande forme. En témoigne son record personnel réalisé au semi-marathon de Dunkerque, mi-mars, et établi à 1 h 04'30''. Quinze jours plus tard, à Angoulême, et sur 10 km, le chrono s'arrêtait à 28' 54''. Le lendemain, il se permettait le luxe de s'adjuger un semi ! « Beaucoup d'athlètes très doués n'arrivent pas à gérer l'enchaînement et ont tendance à trop forcer. Certes, ces athlètes gagnent leur vie grâce à ces courses mais il faut savoir écouter son corps. Abraham possède cette intelligence-là. Il est capable de gagner une course en contrôlant », note son coach.

« Il a le niveau olympique »

Arrivé à l'âge de 18 ans en France, l'athlète engagé dans la Légion étrangère possède un visa et parcourt la France de courses en courses, que ce soit du cross, de la route ou sur la piste. « La plupart du temps, je suis invité par les organisateurs, ou mon coach me conseille comme pour le semi de Dunkerque, explique l'intéressé qui n'imagine pas se faire battre à la Croix-Médavy, dimanche après-midi. J'avais trouvé que c'était un beau parcours avec beaucoup de monde pour nous encourager. J'y viens pour parfaire ma préparation en vue de meetings sur la piste cet été. » « Il possède un très gros potentiel et une bonne marge de progression à tous les niveaux. Je pense qu'il a le niveau olympique », pense Philippe Planque.

Côté féminin, la dauphine d'Olena Serdiuk l'an passé, Godelieve Nizigiyimana, partira à nouveau favorite. Licenciée au club de l'AS Rispoli Villeurbanne, la Burundaise a bien changé depuis son arrivée en France il y a trois ans. « Je me souviens qu'elle n'avait pas trop un physique d'athlète. Elle s'est rapidement affinée, s'est formée et marche aujourd'hui très bien en compétition », note Joseph Rispoli, un entrepreneur Lyonnais passionné de course à pied.

Ce dernier héberge depuis un certain nombre d'années des athlètes venus du Burundi, dont l'autre favori de la course masculine et 2e l'an passé, Onesphore Nkunzimana. « Ils ont un très bon comportement moral et sportif. Ce sont des gens fidèles. Je ne leur offre qu'un toit et l'eau chaude, explique le président du club villeurbannais. Ensuite, ils sont autonomes et vont eux-mêmes chercher des courses. En contrepartie, je ne leur demande qu'une chose: participer à deux ou trois courses dans la région du Lyonnais. »
Ugo BRUSETTI.

Camerone : le 1er R.E.C. sur la ligne de départ du... cross

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Publié le Mercredi 09/04/2014


Le major Fabrice Fotrestier nous a présenté hier un événement majeur des célébrations de Camerone : le cross.

Photo T.J.

Le 1er R.E.C., même si l'on sait qu'il est sur le "top départ", n'oublie pas les saines traditions. Ainsi, le 1er-Mai, juste avant l'ouverture de la kermesse, au quartier Labouche pour deux jours, aura lieu le cross de la Légion ouvert "à tous". La première s'était déroulée l'an dernier par un temps exécrable et les organisateurs, notamment le major Forestier, espèrent que le beau temps sera de la partie. Hier, il nous précisait "dans le cadre de célébrations de Camerone, cela permettra de rassembler les populations militaire et civile. Cette année, le thème de cette épreuve sera "Adieu Orange". Le sport permet d'entretenir la forme mais aussi la cohésion. Cette épreuve sera ouverte à tous, mais uniquement aux majeurs."

Le cross du 1er régiment étranger de cavalerie, organisé avec la Ville, se déroulera sur 8 500 mètres. Le départ se fera devant le Théâtre antique, idem pour l'arrivée. Les concurrents, entre-temps, auront couru "en pleine campagne", notamment sur le terrain des Aglanets, après avoir emprunté la route de Châteauneuf, puis sur la colline, près de Saint-Louis.

"Il y aura huit catégories. Un tee-shirt célébrant l'événement sera offert aux 800 premiers arrivants. Les trois premiers de chaque catégorie recevront une médaille. On a de bons coureurs, les membres de clubs sportifs pourront ainsi se mesurer. Il y aura aussi un challenge entre chaque escadron, c'est une vraie compétition pour les légionnaires" tenait à ajouter le major, présentant l'affiche qu'on devrait retrouver, ces prochaines semaines, sur les vitrines du centre-ville.

Cette épreuve sera donc un des multiples rendez-vous du 1er R.E.C. avec la population, jusqu'au 10 juillet, date du départ définitif. Ainsi, le 30 avril au soir, chose rare, aura lieu la cérémonie officielle de Camerone au Théâtre antique. Le lendemain matin, donc, le cross, avant l'ouverture de la kermesse jusqu'à tard dans la nuit puisque c'est ce jour qu'aura lieu l'élection de Miss képi blanc.

Le lendemain, 2 mai, toujours la kermesse, jusqu'à 19 heures. Ajoutons que sont annoncés un concert, au Théâtre antique et... l'inauguration d'un rond-point, sur la N7, au nord de la ville près deu pont de l'Aygues,avec un blindé ayant appartenu au régiment, comme c'est déjà le cas, au sud, pour un Mirage de la BA 115. Mais la date reste à confirmer. En attendant ces festivités, les légionnaires orangeois continuent leur déménagement tout en assurant, en France comme à "l'extérieur", leurs missions de Défense. Tout un... programme !

Le 1er-Mai à 9 heures devant le Théâtre antique. Inscriptions 5 € jusqu'au 26, 10 après. Renseignements et inscriptions 1rec.legion-etrangere.com. 04 32 81 20 14

Tristan Jaureguy


Rwanda 1994 : "Il n'a jamais été question d'un raid sur Kigali !"

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Publié le 09/04/2014

Lundi, jour de l'ouverture des commémorations du génocide tutsi de 1994 et au lendemain des accusations portées par le président rwandais Paul Kagame, un ancien officier de l'armée de terre, Guillaume Ancel, engagé dans l'opération Turquoise censée venir en aide aux victimes, en a contesté le caractère humanitaire, soutenant que les ordres de mission étaient clairement de s'opposer à la rébellion du FPR par des actions offensives : "Je suis parti avec l'ordre d'opération de préparer un raid sur Kigali, a-t-il notamment affirmé sur France Culture. Quand on fait un raid sur Kigali, c'est pour remettre au pouvoir le gouvernement qu'on soutient, pas pour aller créer une radio libre." À cette époque, Jacques Hogard était lieutenant-colonel de la Légion étrangère et commandait le groupement sud de l'opération Turquoise à Cyangugu, au sud-ouest du Rwanda. Il conteste vigoureusement ces accusations. Interview.

Le Point.fr : Le 7 avril, France Culture cliquez ici a affirmé sur la foi des déclarations d'un ancien officier français, Guillaume Ancel, que durant l'opération Turquoise l'armée française avait programmé une attaque terrestre sur Kigali, accompagnée de frappes aériennes. Qu'en pensez-vous ?

Jacques Hogard : Tout d'abord, je me souviens bien de Guillaume Ancel. Il s'est en effet trouvé sous mes ordres au sein du groupement sud de Turquoise. Arrivé un peu après la mise en place du groupement au Rwanda, il en est parti quelque temps avant notre propre départ. Le capitaine Ancel n'était pas un officier de Légion. Saint-cyrien de la promotion "Cadets de la France libre", c'était un jeune capitaine détaché en renfort individuel du 68e RA (régiment d'artillerie) de la Valbonne. Il a été aussitôt affecté au DL (détachement de liaison, NDLR) humanitaire, dont la mission première, comme son nom l'indique, était d'établir la liaison et la coordination avec les ONG. Il n'a jamais été affecté au groupement sud en tant que "DL d'artillerie" comme il le prétend dans son interview. Il précise même qu'il était destiné à un emploi de TACP (chargé de l'appui aérien, NDLR). Or, l'organigramme du groupement sud n'a jamais comporté de DL d'artillerie ni de TACP, ni avant ni pendant l'opération Turquoise. Cette inexactitude, si elle est volontaire, est lourde de sens, alors que nous n'avons jamais disposé de telles équipes et qu'il n'en a jamais été question.

Dans quelles conditions avez-vous participé à Turquoise ?

Je suis arrivé au Rwanda par le Zaïre via Goma et Bukavu et ai installé le 30 juin mon PC sur l'aérodrome de Cyangugu, chef-lieu de la préfecture du même nom, ville-frontière rwandaise faisant face à la ville congolaise de Bukavu. Lorsque la formation du groupement que j'ai commandé a été décidée par l'état-major des armées à Paris, j'étais alors chef du bureau opérations au sein de l'état-major des FFDj (forces françaises de Djibouti, NDLR), et donc, en tant que tel, parfaitement au courant de tous les ordres d'opération qui émanaient du COIA (centre opérationnel interarmées, NDLR) à Paris, où je comptais encore de nombreux camarades, puisque j'y avais passé moi-même quelques années lors de mon affectation précédente. Jamais il n'a été question de créer un DL artillerie au groupement sud de Turquoise, constitué d'unités opérationnelles de la Légion étrangère autour d'un état-major tactique de différentes armes et spécialités. En revanche, un besoin bien réel avait été identifié : celui de disposer de DL humanitaires. Une équipe m'a donc été affectée composée de deux officiers : un commandant qui en était le chef et le capitaine Ancel. Ils avaient pour mission d'assurer la liaison et la coordination avec les ONG présentes, comme la Croix-Rouge internationale, Médecins du monde, l'Ordre de Malte et d'autres. Puis est rapidement apparue une deuxième mission : les opérations de récupération de survivants tutsi dont on nous signalait la présence. Pendant les quelques semaines où ces deux officiers sont restés avec nous, ce fut le coeur de leur travail.

Vous étiez le chef du capitaine Ancel. Qu'avez-vous pensé de son action ?

J'étais son chef, j'ai même eu à le noter ! Je ne l'ai jamais revu depuis bientôt 20 ans, mais je conserve le souvenir d'un gentil garçon, un peu falot, pas d'une forte personnalité en tout cas. J'ai entendu avec étonnement dans son interview qu'il se serait mis "en colère" et qu'il aurait manifesté sa désapprobation lors d'une occasion bien précise sur laquelle nous allons revenir : cela n'est jamais arrivé, nous avons au contraire le souvenir d'un garçon très discret, parfaitement discipliné, faisant son travail de manière tout à fait correcte, normale et efficace, mais pas flamboyante. Je ne me souviens pas qu'il ait jamais manifesté d'états d'âme ou de problèmes de conscience particuliers. Il ne parlait pas très souvent, sinon pour exprimer son accord en toutes occasions. C'est le souvenir qu'il a laissé. Les graves inexactitudes qu'il énonce aujourd'hui sont d'autant plus surprenantes et lourdes de conséquences, je ne peux donc évidemment pas les laisser passer et c'est la raison pour laquelle j'ai bien entendu accepté votre interview !

Il dit être parti avec un "ordre d'opération" pour engager "un raid sur Kigali". Qu'en pensez-vous ?

Il faut être sérieux : il était tout jeune capitaine, n'avait pas encore fait son stage de futur commandant d'unité et n'avait donc encore jamais commandé de batterie. Il était bien loin de tout ça. En ce qui me concerne, je voyais, de par mes fonctions, les ordres d'opération arriver de Paris. Je suis absolument certain qu'il n'était pas dans ce cas ! Je n'ai, en ce qui me concerne, jamais vu ce fameux ordre d'opération "offensif" dont il parle, qui, pour moi, relève du fantasme, du rêve ou peut-être du besoin de briller. J'ai conservé dans mes archives les ordres d'opération de cette période. Il n'est à aucun moment question d'un quelconque raid sur Kigali. Il était même au contraire plutôt envisagé initialement de stationner au Zaïre et d'effectuer des missions ponctuelles de va-et-vient au Rwanda.

M. Ancel affirme pourtant qu'il s'est trouvé dans un hélicoptère décollant "pour aller déclencher les frappes aériennes sur le FPR"...

Alors, là, on est en pleine fiction ! À cette époque, nous avions en effet reçu le renfort ponctuel d'un hélicoptère Puma en version Pirate équipée d'un canon de 20 mm en sabord. Peut-être le capitaine Ancel est-il monté à son bord dans le cadre d'une mission de reconnaissance ? Mais il est fort peu professionnel d'imaginer qu'on aurait eu l'idée de déclencher des "frappes aériennes" avec un tel engin, contre le FPR de Paul Kagame qui disposait de missiles sol-air. Il faut être sérieux ! Je suis sidéré qu'un ancien officier d'artillerie puisse dire sérieusement de telles choses. J'avais demandé cet hélicoptère en renfort afin d'effectuer des reconnaissances au-dessus de la forêt de Nyungwe dont nous pensions qu'elle pouvait être un terrain privilégié pour toutes sortes d'infiltrations. Il n'a jamais été question de déclencher des "frappes aériennes" contre le FPR, ne serait-ce que parce que, au groupement sud, nous n'en avons jamais rencontré ! En revanche, il faut rappeler que Kagame, de son côté, clamait depuis des mois que, s'il venait à rencontrer des unités françaises, ce serait pour leur tirer dessus. Nous avions pris donc fort logiquement des mesures de précaution et de protection, face au FPR qui disait vouloir "casser du Français" ! Mais quant à déclencher des frappes aériennes sur un ennemi invisible à partir d'un Puma Pirate canon de 20 ! Restons sérieux !

Selon ses accusations, vous auriez rendu "des dizaines de milliers d'armes" aux génocidaires...

C'est une autre ineptie ! En tout, dans le secteur de Cyangugu, nous avons récupéré au total, au grand maximum, quelques milliers d'armes et de munitions disparates. Je dois avoir encore le chiffre exact dans mes archives. La quasi-totalité a été jetée d'hélicoptère dans les eaux profondes du lac Kivu. Et ce n'est pas le capitaine Ancel qui, comme il le prétend, en avait "donné l'ordre", il n'était pas dans la position de le faire ! Il est vrai, en revanche, que nous avons rendu quelques dizaines d'armes aux gendarmes et ex-FAR (Forces armées rwandaises) que j'avais recrutés comme supplétifs pour pallier notre faiblesse numérique face à la diversité de nos missions. Leur chef était le major de gendarmerie Augustin Cyiza, dont on m'avait assuré qu'il était un officier au comportement impeccable, qui avait personnellement protégé de nombreux Tutsi durant le génocide. Theodore Mugyangabe, le seul sous-préfet de Cyangugu qui n'avait pas fui au Zaïre et qui avait accepté de prendre la tête du "comité préfectoral intérimaire" que j'avais mis en place, me l'avait confirmé. J'ai également fait rendre quelques dizaines d'armes individuelles à d'ex-FAR se trouvant dans des camps de réfugiés au Zaïre qui étaient venus me les réclamer. Il s'agissait de leur permettre de se défendre, eux et leurs familles, femmes et enfants, en cas d'attaques du FPR ou même de coupeurs de route et bandits zaïrois qui dépouillaient les réfugiés.

Avec le recul, estimez-vous avoir bien fait ?

J'ai pris cette décision en conscience, devant leur détresse, et j'aimerais bien qu'on vienne me demander des comptes sur ce point ! Je l'assume parfaitement. Le capitaine Ancel n'en parle pas - il confond d'ailleurs peut-être les deux -, mais j'ai également fait livrer quelques camions de vivres et de couvertures à ces gens qui étaient dans une détresse immense. En ce qui me concerne, j'avais acquis la conviction que le génocide (mené à la houe et à la machette !) était pour l'essentiel l'oeuvre de populations frustes manipulées par quelques politiciens sans scrupules. Je me permets de souligner que le Tribunal pénal international pour le Rwanda a lui-même confirmé dans ses jugements que, dans leur grande majorité, les FAR n'ont pas été engagées dans le génocide. Par ailleurs, je ne voyais pas comment je pouvais en conscience refuser à ces familles en pleine détresse un minimum d'autoprotection contre les drames à venir que nous pressentions sans avoir besoin d'être prophètes ! Je considère que je n'ai fait que mon devoir en laissant à ces gens quelques dizaines d'armes d'autodéfense, lesquelles n'ont d'ailleurs malheureusement pas empêché les drames de 1995, 1996 et 1997, où des centaines de milliers de Hutu ont été massacrés dans l'indifférence générale dans les forêts du Zaïre oriental. Comme l'écrit votre confrère Renaud Girard dans Le Figaro du 8 avril, "M. Kagame serait mieux avisé de nous décrire sa responsabilité directe dans le massacre de dizaines de milliers de civils hutu en République démocratique du Congo (ex-Zaïre) depuis qu'il exerce un pouvoir sans partage à Kigali"... Je suis sûr que le capitaine Ancel, dont les souvenirs semblent passablement brouillés et embrouillés, n'a pas dû réfléchir à tout cela avant de parler à France Culture.

Guillaume Ancel nous prie de faire part des remarques suivantes :

Je maintiens l'intégralité de mon témoignage sur ce que j'ai fait pendant l'intervention Turquoise et qui est détaillé dans le livre Vents sombres sur le lac Kivu, dont je recommande, y compris à Jacques Hogard, une lecture attentive, même si j'ai romancé les noms.

Les propos de Jacques Hogard, pour le formuler poliment, ne correspondent pas à la réalité. Comment du reste peut-il nier des faits qui se sont déroulés avant son arrivée au Rwanda (le 30 juin, si j'en crois le livre qu'il a écrit sur son expérience dans ce pays) et bien avant que je ne sois rattaché directement à son groupement (le 10 juillet) ?

En ce qui me concerne, j'étais au Rwanda depuis le 23 juin, et j'y étais comme Forward Air Controller (ou encore TACP, Officier de Contrôle Avancé en français, en charge des frappes aériennes) de la Compagnie de combat du 2° REI.

Que la mémoire de Jacques Hogard soit défaillante à vingt ans de distance, qui ne le comprendrait pas. En revanche, qu'il entreprenne de détruire mon témoignage en tentant de me décrédibiliser relève d'un procédé qui ne saurait susciter l'indulgence. Le tableau méprisant et préjudiciable qu'il dresse de moi en me présentant comme un "gentil garçon, un peu falot, pas d'une forte personnalité", n'assumant aucune responsabilité et dont les souvenirs seraient "brouillés et embrouillés" (ce qui est un comble en l'occurrence) n'est pas qu'inélégant. Il signale également un déficit d'arguments solides. Faute de tels arguments, on s'en prend courageusement à la personne dont on dénonce les propos.

Par ailleurs, Jacques Hogard décrit un capitaine qui a bien existé, qui était effectivement DL Humanitaire de son état-major ... mais qui n'a aucun rapport avec moi et à qui je laisse le soin de s'exprimer quant à la description dédaigneuse qu'on fait de lui publiquement.

Je n'apprécie pas du tout, que pour éviter un débat indispensable sur le drame rwandais, on ne trouve rien de mieux que faire jouer le rôle de crocodile amnésique à des compagnons d'armes. En effet, j'ai le plus grand respect pour le lieutenant-colonel Hogard aux ordres de qui j'ai servi au Rwanda (comme officier rens avec le CNE G), un homme extrêmement droit, respectueux des autres et profondément humain. J'aurais préféré qu'il dise simplement qu'il n'est encore une fois pas d'accord avec mon interprétation des faits et je n'aurais pu que le respecter car je n'ai jamais prétendu détenir la vérité. Je trouve malsain de le mettre en porte à faux, par cet interview, car il ne peut que défendre une situation qu'il a toujours assumée. S'il avait lu mon livre, il saurait que je ne l'ai jamais critiqué, ni aucun de mes compagnons d'armes.

Je forme en conclusion le voeu que le débat sur le rôle de la France au Rwanda se tienne dans des conditions sereines. Il appartient aux journalistes compétents, aux historiens et aux hommes politiques de le tenir. Ils pourraient ainsi mettre en lumière les erreurs que nous avons commises et dont nous pouvons apprendre, mais aussi celles qu'on ne peut pas nous reprocher aujourd'hui, car nous n'avons jamais participé au génocide, ni ne sommes restés passifs face à un tel drame.

Guillaume Ancel

Rwanda : l'incroyable destin d'Angelo

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Publié le 09/04/2014 Par


Juillet 1994. Alors que Kigali vient de tomber dans le giron du FPR, sonnant l'écrasante victoire de l'armée tutsi, Christophe Calais, jeune journaliste à VSD, est envoyé sur le terrain pour suivre les centaines de milliers de civils hutu qui se précipitent sur les routes par peur des représailles. Direction le Zaïre. La marche est longue, les corps sont fragiles, terrorisés, meurtris, et bientôt la réalité dont doit rendre compte Calais s'apparente à l'"apocalypse". Très vite, l'épidémie de choléra est déclarée et, à Goma, les hommes tombent les uns après les autres, charriés par milliers par les bulldozers de l'armée française dans d'immenses fosses creusées pour les ensevelir. Dans la tête du photographe, les questions fusent : comment rendre compte d'un tel drame ? Que faire contre ce sentiment d'impuissance qui tenaille le témoin ? Quel rôle le photographe peut-il jouer dans ce chaos ?

Soudain, au beau milieu du tumulte, un petit miracle interrompt tout questionnement médiatique. Arthur da Dilva, lieutenant dans la Légion étrangère, croit déceler un mouvement dans la masse morbide. Un petit garçon de 15 kg, sans nom et sans âge, vient d'être sauvé de l'enfer zaïrois. Pour tous les présents, il s'appellera Angelo. Un destin rwandais* est l'histoire de ce petit corps rachitique et mourant devenu, près de 20 ans plus tard, un solide gaillard, bien vivant. À plusieurs reprises, Christophe Calais a pensé clore le chapitre, y mettre un point final. Mais à chaque fois, un nouveau bouleversement dans la vie du jeune homme et de sa famille l'invitait à revenir, à suivre leur lent retour dans le monde des vivants.

Ntibagilirwa

Les premières parutions dans VSD connaissent un retentissement imprévu. De nombreux magazines, comme le mensuel Life, relayent les images du petit miraculé, qu'un légionnaire veut adopter et ramener en France. L'émouvante histoire d'Angelo aurait pu s'arrêter là. Mais en juillet 1995, soit un an presque jour pour jour après la découverte de l'enfant, le père, Léonard, reconnaît son fils dans un camp de réfugiés. Le gamin s'appelle en réalité Ntibagilirwa, il a 8 ans et est originaire du village de Mbogo. Sur les indications de Léonard, Christophe Calais et la rédactrice Caroline Mangez prennent la direction du village natal et rapportent à Marie, la mère, l'heureuse nouvelle : son époux et son fils sont en vie. Heureuse de savoir l'enfant sain et sauf, elle insiste pour que les deux reporters mettent en garde son époux : il vaut mieux pour lui qu'il reste au Zaïre.

Qui se cache donc derrière le père aimant et protecteur photographié à Goma ? Quel a été son rôle pendant le génocide ? Il apparaît bien vite que si ces hommes reviennent au Rwanda tous les individus valides pourraient être requis pour mettre sur pied une "armée de libération" destinée à reprendre le pouvoir aux Tutsi du FPR. Une fois le message délivré, Christophe Calais regagne la France. Dans son esprit, les questions se bousculent.

Miracle

Imaginait-il seulement un jour pouvoir y répondre ? Une fois de plus, il avait refermé la page Angelo. Mais en novembre 1996, les bouleversements de la situation politique au Zaïre précipitent de nouveau son départ pour Goma. Les troupes de Laurent-Désiré Kabila avancent sur Kinshasa pour y écraser le régime de Mobutu, marquant un nouvel exode tout aussi spectaculaire que celui de 1994. Seulement, cette fois-ci, les réfugiés, stoppés par les forces de police, sont contraints de rebrousser chemin. Le cliché est poignant. Calais immortalise ces 500 000 Hutu serrés les uns contre les autres dans le brouillard épais de la forêt congolaise, reconduits au pays. Et - est-ce encore un miracle ? - aperçoit Léonard et le petit Angelo au coeur de la foule. "Le lendemain, confie le photographe, toute la famille était enfin réunie à Mbogo et j'étais là pour photographier cet incroyable moment."

Courte trêve. Quelques mois plus tard, Léonard est arrêté et emprisonné : des villageois le suspectent d'avoir participé aux tueries, ce qu'il nie fermement. "À partir de ce jour, je suis retourné tous les ans au Rwanda pour réaliser divers sujets. Et à chaque fois, je prenais le temps de rendre visite à Angelo." Il passe de longs moments avec lui, le suit sur le chemin interminable qui le mène à l'école, dans les lourdes tâches qui composent son quotidien, puis immortalise son mariage, la maison qu'il se construit, sa petite fille de 3 ans... "C'était un reportage et c'est devenu le projet d'une vie, avoue Christophe Calais, visiblement ému. Je vais voir Angelo dès que j'en ai l'occasion. On fait désormais partie de nos vies l'un de l'autre. J'ai hâte qu'il voie le livre." Un récit à rebours, qui d'aujourd'hui à 1994 relate tant le destin d'Angelo que l'histoire du Rwanda. Une course effrénée pour la survie.

* Un destin rwandais, Christophe Calais et Nathan Réra, Les Belles Lettres, 200 pages, 36€


Portfolio Pendant 20 ans, un photographe a suivi Angelo, rescapé du génocide du Rwanda

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Anne Guion  Créé le 08/04/2014

Le photographe Christophe Calais a suivi pendant 20 ans le destin d'un enfant retrouvé dans un charnier, lors de la fuite de Hutu, après le génocide. Il lui a rendu visite une nouvelle fois fin 2013, accompagné de notre journaliste Anne Guion.













Guillaume Ancel : "L'histoire mythique de l'opération Turquoise ne correspond pas à la réalité"

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07/04/2014

Guillaume Ancel, chevalier de la Légion d'honneur décoré à titre militaire en opérations.© DR

Pour la première fois depuis 1994, l’opération Turquoise au Rwanda s'éclaire d'un jour nouveau grâce au témoignage d'un officier français de l’armée de terre. Selon lui, l'objectif "humanitaire" officiellement affiché par Paris se confond avec un autre, beaucoup moins avouable : celui de freiner ou de stopper l’avancée militaire du Front patriotique rwandais (FPR), tout en ménageant les forces gouvernementales génocidaires.

Lancée le 22 juin 1994, l’opération française Turquoise aurait eu pour objectif initial de faire le coup de feu contre le Front patriotique rwandais (FPR), la rébellion – essentiellement tutsie – qui se battait contre les forces gouvernementales hutues à l’origine du génocide. Ce n’est pas le président Paul Kagamé qui le dit, mais un ancien officier français, chevalier de la Légion d'honneur et décoré à titre militaire en opérations. Dans un long entretien accordé à “Jeune Afrique”, Guillaume Ancel, 48 ans, à l’époque capitaine au 68e régiment de l’artillerie d’Afrique, évoque sans détour le décalage entre la version officielle française et ce qu’il a vécu il y a vingt ans sur les collines du Rwanda. Si lui et ses compagnons d’arme ont effectivement mené, à partir du début juillet 1994, des missions de protection et d’extraction au bénéfice de rescapés tutsis, ils avaient auparavant, selon lui, reçu l’ordre de stopper l’avancée du FPR au moment où la victoire militaire de celui-ci devenait inexorable. Interview.

Nous avons reçu l'ordre de préparer un raid sur la capitale rwandaise, Kigali.

JEUNE AFRIQUE : Quelle était votre mission au moment de rejoindre l’opération Turquoise ?

Guillaume Ancel : L’ordre initial, que j’ai reçu autour du 24 juin, était très clair : préparer un raid sur la capitale rwandaise, Kigali, alors passée en quasi-totalité sous le contrôle du FPR. La spécialité de mon unité était le guidage des frappes aériennes [Tactical Air Control Party - TACP, NDLR]. Infiltrés à proximité de la cible pour guider les avions de chasse, notre rôle était de dégager un couloir pour permettre aux troupes de s’emparer de leur objectif avant que quiconque ait eu le temps de réagir. Pas besoin d’avoir fait Saint-Cyr pour comprendre que lorsqu’on cherche à reprendre la capitale d’un pays en guerre passée aux mains d’une rébellion, c’est pour remettre en place les autorités officielles.

>> Lire aussi : "Les fantômes de Turquoise"

Aucun raid de l’armée française sur Kigali n’a pourtant eu lieu à l’époque…

La confirmation de l’ordre de mission n’est jamais arrivé. Peut-être était-ce lié aux problèmes logistiques que nous rencontrions, nos équipements ayant été acheminés avec retard jusqu’à Goma [en RDC, NDLR]. D’autre part je sentais un certain flottement au niveau de la hiérarchie. Puis, entre le 29 juin et le 1er juillet, nous avons reçu un ordre qui s’est substitué au premier. Nous devions stopper par la force l’avancée du FPR à l’est de la forêt de Nyungwe, dans le sud-ouest du Rwanda. Le lendemain matin à l’aube, nous avons décollé dans des hélicoptères Super-Puma afin d’aller déclencher les frappes aériennes sur les colonnes du FPR. L’essentiel de l’unité était déjà partie la veille par la route. Mais au moment où les hélicoptères décollaient de l’aéroport Bukavu, nous avons reçu un contre-ordre. L’officier en charge des opérations nous a expliqué qu’un accord avait été passé avec le FPR. Désormais nous devions protéger une "zone humanitaire sûre" (ZHS) dont la rébellion de Paul Kagamé avait accepté qu’elle échappe provisoirement à son contrôle. C’est à ce moment-là que la nature de notre mission a changé pour devenir humanitaire. Jusque-là, il était clair qu’il s’agissait de combattre le FPR.

Les soldats français ont sauvé plusieurs milliers de vie.

En quoi a consisté cette mission humanitaire ?

Nous nous sommes déployés autour de Cyangugu, au sud du lac Kivu. Le commandant de compagnie a décidé d’installer notre camp au-dessus du camp de Nyarushishi, où s’étaient réfugiés des milliers de Tutsis et de Hutus modérés. Il avait été alerté par le médecin-chef du camp, un Suisse travaillant pour le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), sur le risque d’une attaque massive des miliciens Interahamwe. Cette dimension de Turquoise ne doit pas être oubliée : même si les ordres que nous recevions étaient ambigus, les soldats français ont sauvé plusieurs milliers de vie. Pour moi, chacune d’entre elle était une victoire.

Quels étaient vos relations avec les forces armées gouvernementales qui avaient orchestré le génocide ?

Dès que nous avons traversé la frontière entre l’ex-Zaïre [actuelle RDC] et le Rwanda, nous avons constaté que les militaires rwandais étaient consternés en réalisant que les soldats français n’allaient pas remettre en selle le gouvernement intérimaire à l’origine du génocide. Ils nous regardaient avec une réticence et une inquiétude évidentes. À l’inverse, quand les réfugiés de Nyarushishi ont réalisé que nous venions réellement pour les protéger, ils nous ont accueilli avec des cris et des chants de joie.

Étant un spécialiste des frappes aériennes et des missions spéciales, quand la compagnie s’est installée pour protéger le camp de Nyarushishi, on m’a détaché auprès du colonel Hoggard, de la Légion étrangère, et je suis devenu responsable des extractions. Pendant un mois, avec des légionnaires, à chaque fois que nous recevions une information sur des personnes menacées dans la zone humanitaire sûre, j’étais chargé de conduire les opérations se sauvetage.

J’ai reçu l’instruction de charger les conteneurs d’armes sur ces camions, qui les ont emmenées ensuite au Zaïre pour les remettre aux forces gouvernementales rwandaises.

On sait que l’armée française a, par ailleurs, montré une certaine complaisance face aux forces génocidaires fuyant vers l’ex-Zaïre…

Pendant cette période, nous avons confisqué des dizaines de milliers d’armes légères aux Hutus qui traversaient la frontières, essentiellement des pistolets, des fusils d’assaut et des grenades. Toutes ces armes étaient stockées dans des conteneurs maritimes sur la base de la Légion étrangère à l’aéroport de Cyangugu. Vers la mi-juillet, nous avons vu arriver une colonne de camions civils et j’ai reçu l’instruction de charger les conteneurs d’armes sur ces camions, qui les ont emmenées ensuite au Zaïre pour les remettre aux forces gouvernementales rwandaises. On m’a même suggéré d’occuper les journalistes pendant ce temps pour éviter qu’ils s’en rendent compte. Quand je lui ai fait part de ma désapprobation, le commandant de la Légion m’a répondu que l’état-major avait estimé qu’il fallait montrer à l’armée rwandaise que nous n’étions pas devenus ses ennemis, afin qu’elle ne se retourne pas contre nous. La France a même payé leur solde aux soldats rwandais.


Privés de papiers, d'anciens légionnaires se rebiffent

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05/04/14

Des légionnaires à Aubagne le 30 avril 2011 - Boris Horvat/AFP

Ils ont porté l'uniforme français, parfois gagné citations et médailles sous le feu: d'anciens légionnaires de nationalité étrangère se battent désormais pour obtenir le droit de vivre en France.

Une carte de séjour de dix ans est octroyée à quiconque a servi dans une unité combattante ou passé trois ans dans la Légion étrangère pour en sortir avec un "certificat de bonne conduite".

Aussi Ganzorig Altanbagana, un Mongol de 28 ans, ne comprend pas pourquoi l'administration lui a refusé son titre de séjour le 21 janvier, cinq ans après son départ de la Légion où il a été promu caporal et pratiquement dix après sa participation à l'opération "Pamir" en Afghanistan.

Installé à Paris où il vivote de petits boulots, il se juge "parfaitement intégré à la société française" et adhère "à toutes ses valeurs qu'il a d'ailleurs défendues avec courage", selon son recours en justice. Mais il n'a pas obtenu le précieux certificat.

Pour se voir refuser ce sésame, il "faut vraiment avoir fait une grosse bêtise", affirme le général Rémy Gausserès de la Fédération des anciens de la Légion (FSALE). Selon l'armée de terre, en 2013, il a été délivré dans 95% des cas. "Ce n'est pas une décision isolée empreinte de despotisme", "les 5% restants ont dépassé les bornes", poursuit un porte-parole.

Faux, rétorque Michel Bavoil, de l'Association de défense des droits des militaires (Adefdromil): en cas de manquement grave, un légionnaire est exclu. Avocate de plusieurs de ces légionnaires, Me Aïda Moumni assure que les fautes "mineures" de ses clients "ne justifient pas le refus" du certificat dont la délivrance est soumise au "régime de l'arbitraire le plus total", selon Michel Bavoil.

En 2010, dans un rapport, la députée socialiste Marylise Lebranchu avait dénoncé le "pouvoir exorbitant" accordé à la hiérarchie et recommandé de "déconnecter le certificat de bonne conduite (...) de l’attribution du permis de séjour".

S'il concède quelques bêtises, alcool ou bagarres avec d'autres militaires, Ganzorig Altanbagana explique avoir le sentiment d'avoir été dans le collimateur d'un sous-officier et évoque un possible "racisme".

 

- 'Tu signes là et tu fermes ta gueule' -

 

Un Ukrainien installé à Marseille s'est vu refuser en décembre le certificat pour, selon un document consulté par l'AFP, avoir contrevenu "gravement aux règles de l'institution": avoir souscrit un crédit-consommation sous son identité de légionnaire et "contracté mariage sans autorisation". Des règles ancestrales sans fondement légal.

En 2012, ce légionnaire avait été cité à l'ordre de son régiment pour ses "belles qualités militaires" en Afghanistan: il avait, "pendant plusieurs heures, au mépris du danger, parfaitement riposté, favorisant l'ascendant pris sur les rebelles et appuyant efficacement la progression de son unité vers les positions adverses".

S'il concède quelques "bêtises", des états d'ébriété, des retards, un autre ex-légionnaire, un Ivoirien, assure que d'autres ont obtenu leur certificat malgré des dérapages plus graves que ceux qui lui ont valu ses 79 jours d'arrêt. Il raconte avoir été convoqué le 14 mai 2013 par son supérieur qui lui a annoncé qu'il ne pourrait pas rempiler: "On m'a dit: +Tu signes là et tu fermes ta gueule+. A 17H00, on m'a annoncé que je n'étais plus militaire. On m'a dit que le certificat de bonne conduite me serait envoyé, j'attends toujours."

Traducteur douala-français durant l'opération Licorne, il s'affiche en uniforme sur Facebook mais ne souhaite pas donner son nom, sa famille craignant des représailles au pays. Aujourd'hui, il vit en foyer à Paris. "C'est comme si on m'avait planté un couteau dans le dos", dit-il, brandissant son titre de reconnaissance de la Nation délivré en décembre 2012, cinq mois avant son départ sans cérémonie.

S'il a choisi d'entrer dans la Légion en 2008, c'était pour se "mettre en règle avec les autorités" six ans après son arrivée en France.

Pour Michel Bavoil, la Légion étrangère, qui attire plusieurs milliers de volontaires chaque année, est "une filière d'immigration qui ne dit pas son nom": "Comme ils ne veulent pas que ce soit dit comme ça, ils font des exemples."

AFP


Des Suisses dans les tranchées de 14-18

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04/04/2014

Des volontaires suisses à Paris, en août 1914. © Musée de l’histoire de l’immigration/DR

«Histoire vivante» - 100 ans • Alors que pendant la Grande Guerre, des pacifistes français venaient se réfugier dans notre pays, des milliers de Suisses ont au contraire décidé de s’engager. Ils ont laissé des récits poignants de leur vie de «poilus».

Des milliers de Suisses ont combattu côté français pendant la Grande Guerre, dont on célèbre cette année le centenaire. De Blaise Cendrars à Valdo Barbey, en passant par Edouard Junod, certains ont laissé des récits poignants de leur vie de «poilus».

La date du 28 septembre 1915, dans ce contexte d’engagement volontaire ou mercenaire, est emblématique. Ce jour-là, dans le nord de la Marne, le 2e régiment de marche de la Légion étrangère se lance à l’assaut de la ferme Navarin, tenue par les Allemands. Vers 15h30, sous une pluie battante, le caporal Sauser est mitraillé par les fantassins allemands. Il y perd son bras droit. «Un bras humain tout ruisselant de sang, un bras droit sectionné au-dessus du coude et dont la main encore vivante fouissait le sol des doigts comme pour y prendre racine», racontera Sauser, alias Blaise Cendrars, dans son livre «La Main coupée».

Foudroyé par les balles

Au moment où le poète Cendrars achève sa guerre dans la douleur, d’autres Suisses vivent l’enfer des plaines de Champagne. Ce même 28septembre, quelques tranchées plus loin, le capitaine Edouard Junod envoie un mot à sa sœur. «J’écris dans l’obscurité. La journée a été terrible. On avance lentement. L’adversaire est dur, son artillerie admirablement servie nous abrutit sans interruption avec du 140 asphyxiant. Trêve ni jour ni nuit. Il pleut. Quelques éclaircies. Soleil pâle; on grelotte. Moral excellent. Je ne comprends pas comment je suis encore debout.»

Dans l’après-midi, le Genevois Junod tombe «foudroyé par les balles de mitrailleuses allemandes dissimulées sous les bois», racontera le journaliste Paul Seippel. Il meurt à 40 ans, après une guerre courte mais d’une violence inouïe, lors de l’assaut de la butte de Souain. Sa fiche de décès, datée du lendemain, précise simplement: «Tué à l’ennemi.»

Amis de la France

Un monde sépare Cendrars de Junod. L’écrivain né à LaChaux-de-Fonds est engagé volontaire avant d’être versé dans la Légion étrangère. En août 1914, il rédige un appel, tragiquement prémonitoire, dans la presse parisienne. «Les amis étrangers de la France sentent le besoin impérieux de lui offrir leurs bras.» Cendrars s’engage, et part combattre en Artois, puis en Champagne.

Junod, lui, est un mercenaire, dans la vieille tradition militaire suisse. Officier dans l’armée helvétique, il prête ses services à la Légion et fait campagne au Maroc, au Tonkin et à Madagascar. Un dur. Son contemporain Albert Erlande décrit le phénomène en mai 1915, lors de la meurtrière bataille de l’Artois: «Le capitaine Junod, un pied sur la marche d’un escalier creusé à la pelle-pioche, sa cigarette russe à la bouche, cravache en main, son regard froid électrisant sa compagnie, commande d’une voix douce: «En avant, mes enfants! Courage!»

Junod meurt pour rien, ou presque. L’offensive de Champagne lancée par le général Joffre, commandant en chef des armées françaises, se solde par une avancée de… quatre kilomètres. Le bilan humain est terrifiant. L’armée française déplore 28'000 morts, 98'000 blessés, 53'000 prisonniers et disparus.

Romands et Alémaniques

Combien sont-ils, ces Suisses embrigadés dans la Légion? Ils ont «toujours formé un peu plus du tiers des régiments étrangers», écrit en 1916 Gauthey des Gouttes, qui préside le comité des Suisses au service de la France. Ce dernier évalue leur nombre à «environ 2500 à 3000 hommes».

Après la déclaration de guerre, des centaines de Suisses affluent à Paris, au café du Globe, boulevard de Strasbourg, qui fait office de lieu de recrutement. «Du pasteur protestant au garçon d’hôtel, de l’étudiant en lettres au vacher», les exilés suisses s’engagent en masse, s’enthousiasme Gauthey des Gouttes. «Je compte, pour ma part, sur plus de 800 volontaires avec lesquels j’ai été en correspondance, 300 Suisses allemands et 500 Suisses romands ou italiens.»

Pourquoi un tel engouement? Gauthey des Gouttes l’explique par «la violation de la Belgique» par l’armée allemande, «car c’était la violation de la Suisse en perspective». A ceux qui accusent ces volontaires d’avoir trahi la neutralité helvétique, le francophile répond: «Quelques-uns sont venus, écœurés par des menées germanophiles dans notre pays.»

Le journal de Barbey

Parmi les Suisses qui combattent côté français, il y a aussi les naturalisés. Ils ont perdu le passeport à croix blanche mais gardent avec leur pays d’origine des liens puissants. Valdo Barbey a 34 ans quand la guerre éclate. Né près d’Yverdon, parti faire les beaux-arts à Paris, le jeune peintre est chargé en septembre 1914 de dessiner les uniformes de l’ennemi. La routine de l’«arrière» l’oppresse. Il veut se battre. Fin octobre, son vœu est exaucé. Barbey est envoyé au front, dans le Pas-de-Calais. Son journal, qu’il publie en 1917 sous le pseudonyme de Fabrice Dongot, raconte au quotidien le terrible face-à-face des tranchées.

26 octobre 1914: «A un mètre devant notre abri sont creusées quatre tombes avec une croix sur laquelle se balance un képi. Ce sont quatre malheureux tués tout près d’ici dans la cave d’une maison par un obus qui a pénétré par le soupirail…»

2 novembre: «Les mitrailleuses boches nous arrosent; les balles passent au-dessus de nous. A ma gauche j’entends crier: «Ah maman!» Puis silence.»

1er décembre: «L’ordre est donné de rompre les faisceaux, de mettre la baïonnette et de partir à l’attaque […] Nous voilà dans la zone balayée par les balles… Dzing, dzing, dzing… Il y en a qui tombent. On court, on bondit, il y en a qui crient, il y en a qui rient…»

Enterrer les corps

Dans cette lutte à mort pour quelques mètres de terrain, les valeurs humaines n’ont pas totalement disparu. Pénétrant dans une tranchée remplie de cadavres ennemis, la section de Barbey enterre les morts, malgré les obus qui pleuvent. «Creuser n’est rien. C’est de transporter ces pauvres corps tout mutilés qui est le plus dur.»

Atteint par deux balles à la tête et à l’épaule, Valdo Barbey est évacué des zones de combat, puis réformé en 1916. Quand, à la fin des années 20, l’ex-«poilu» et historien Jean Norton Cru recense les témoignages de la Grande Guerre, il s’enthousiasme pour le récit du Vaudois. «Un pur joyau (…) A lire ce journal, je me demande toujours s’il a été égalé dans la peinture de la vie du soldat au jour le jour.» Avec PFY

 

***

Appel pacifiste venu de Suisse

Alors que pendant la Grande Guerre, des milliers de Suisses s’engagent sous les drapeaux tricolores, des Français antimilitaristes viennent se réfugier dans notre pays. Parmi eux, des intellectuels comme Romain Rolland. L’écrivain français y mène à distance, dès août 1914, un combat en faveur de la paix. S’engageant auprès de l’agence des prisonniers de guerre de la Croix-Rouge, il se met à écrire, dans «Le Journal de Genève» et d’autres publications, de vibrants articles contre la «fatalité de la guerre», véritable «suicide» de l’Europe. Restant «au-dessus de la mêlée», il appelle les «âmes fraternelles et libres du monde entier à se ressaisir».

Les pamphlets de Romain Rolland sont peu à peu reproduits, traduits et distribués sous le manteau. Largement diffusés par des camarades socialistes et syndicalistes, ils contribueront à relancer le mouvement pacifiste international. Une lutte qui se concrétisera, dès 1917, par des manifestations, des grèves, des mutineries et des désertions massives sur tous les fronts. Jusqu’à l’armistice du 11novembre 1918… PFY

=> Voir le documentaire «14-18, refuser la guerre», ce dimanche sur RTS 2.

 

***

L’engagement des «amis de la France»

Le nombre de Suisses ayant rejoint les rangs de l’armée française durant la Première Guerre mondiale n’est pas clairement établi. Selon le «Dictionnaire historique de la Suisse», environ 14'000 volontaires suisses auraient combattu dans les régiments de la Légion étrangère et 8'000 d’entre eux seraient tombés sur les champs de bataille. Mais d’autres sources donnent des chiffres moins élevés. Selon une étude sur les «Neutres en 1914»*, environ 6'000 soldats suisses auraient servi sous les drapeaux tricolores, dont 1'500 à 2'000 Suisses résidants à Paris. Le site internet «Mémoire des hommes»** recense 1893 combattants nés dans notre pays, qui seraient «morts pour la France». Les cas de Suisses volontaires en Allemagne seraient plus rares.

Les Suisses qui s’engagent avec les alliés en 1914 sont principalement des expatriés bien intégrés en France. Ce sont majoritairement des jeunes gens nés dans l’Hexagone de parents suisses, mais aussi des ressortissants helvétiques, déjà libérés de leurs obligations militaires dans notre pays, mais qui veulent faire la preuve de leur attachement pour la France. Certains sont des chômeurs attirés par la solde. A Paris, un «appel aux amis de la France» est placardé dès la fin juillet 1914 sur les murs de la ville, puis relayé par divers journaux.

Cet appel, et son relatif succès, ont inquiété la Légation suisse à Paris et le Conseil fédéral, soucieux de la neutralité suisse. En cas de devoirs militaires, les Suisses expatriés en France se sont toutefois montrés très clairement fidèles au pays. Sur les 1'600 premiers hommes rappelés en Suisse lors de la mobilisation générale, seuls deux ont préféré rejoindre le Corps des volontaires français… PFY

* «Neutres en 1914», Stéphanie Leu, publié sur le site de l’Académie de Paris (www.ac-paris.fr)

** www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr


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