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Légionnaire toujours...

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2012


L'extension du musée de la Légion a pris du retard

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Le nouveau bâtiment aurait déjà dû être livré, d'où la colère du président des Amis du musée

Fermé depuis le 12 mars dernier, le musée de la Légion étrangère, situé au coeur du quartier Viénot, est en travaux depuis janvier 2011. Des travaux d'extension, avec la création d'un nouveau bâtiment, qui vise à doubler la surface de ce sanctuaire dédié à l'histoire et aux faits d'armes de ce corps prestigieux de l'armée française.

En 2013, le visiteur sera ainsi accueilli dans un musée de 2000m² (contre 1000 aujourd'hui) "moderne esthétique, pédagogique et interactif", expliquait il y a peu dans nos colonnes le capitaine Seznec, nommé en août dernier conservateur.

Problème les travaux de ce nouveau bâtiment ont pris du retard. C'est qu'a dénoncé samedi lors de l'assemblée générale de la Société des amis du musée de la légion, son président, le général Bruno Le Flem. "Je tire aujourd'hui le signal d'alarme, a-t-il lancé à la soixantaine de sociétaires et militaires présents dans la salle de cinéma du quartier Viénot. À ce jour, nous nous acheminons vers un mois de retard puisque l'on devait avoir le bâtiment livré le 9 mars dernier. Désormais, nous sommes dans l'expectative et espérant qu'il soit terminé pour Camerone (Ndlr, programmé le 30 avril prochain)".

Le général Le Flem était ainsi samedi "très en colère contre "la maîtrise d'oeuvre" à qui il impute "80 % du retard", les "20 %" restant relevant, selon lui, "de l'entreprise.

"Je suis très en colère car plus les factures tardent à être payées plus je vais me ramasser une augmentation de l'indice du coût de la construction", a-t-il expliqué. L'association craint ainsi de devoir payer "plus de 100 000 euros" supplémentaires pour cette extension estimée "à quelque 2,2 millions d'euros".

"Le Louvre du légionnaire"

Présent dans la salle, au côté de Guy Teissier, le président de la commission de la Défense nationale et des forces armées et de Christian Faglia, vice-président de la communauté d'agglomération et conseiller municipal d'Aubagne , le général de Saint-Chamas a assuré l'association de son soutien : "Comptez sur moi pour vous aider à accélérer car il y a un souci de cadence", a assuré le patron de la légion qui souhaite faire de ce musée, rénové et étendu, "le Louvre du légionnaire" .

Au cours de cette assemblée générale, le président de la société des amis du musée a également livré "une esquisse" du "futur parcours muséal chronothématique imaginé par la muséographe et l'équipe du musée" .

Ainsi a-t-on appris qu'après "le hall" d'accueil "qui abritera la boutique", suivra "un premier atelier qui s'appellera le mythe, a expliqué le général Le Flem. Ce qu'avec l'ancien conservateur nous avions appelé la légion pour les nuls. On déroule ensuite un parcours chronologique qui mènera au centre jusqu'à l'espace consacré à l'expédition du Mexique et à Camerone".

Le général a enfin rappelé qu'une salle serait consacrée aux expositions itinérantes et qu'une autre avec "une petite meurtrière" offrira une vue inédite sur le monument aux Morts, rapatrié de Sidi-bel-Abbès, en 1962 et autour duquel s'est construit le quartier Viénot. À ce jour, et malgré les retards du nouveau bâtiment, l'inauguration du grand musée de la légion reste programmée pour le 23 mars 2013, année de Marseille capitale européenne de la culture et surtout du 150e anniversaire de la bataille de Camerone.

À noter qu'à l'occasion de Marseille Provence 2013, capitale européenne de la culture, le nouveau musée de la légion accueillera de "septembre à décembre 2013" une exposition des peintres de l'armée sur "une double thématique a expliqué le général Le Flem : "une première que je qualifierai d'orientaliste avec la Méditerranée, l'eau... et une autre sur le 150e anniversaire de Camerone".

R LOPEZ


Un printemps animé et un final en musique

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Publié le 23/03/2012 Gladys Kichkoff

Camerone, moment fort du mois d'avril/Photo DDM, archives, Gladys

Avril, c'est le mois de Camerone à la Légion et pour tout le régiment qui dit Camerone dit effort collectif et esprit de sacrifice. Aussi, en guise de mise en jambe, tout le monde participera au cross qui cette année se déroulera à Fanjeaux le 16 avril prochain. « 4 km de descente et 4 de montée », prévient et résume le chef de corps, le colonel Talbourdel qui rappelle que « ce sera en tenue de combat ». Au « 4 », l'effort se poursuivra avec les challenges sportifs. Quant à la traditionnelle prise d'armes pour la commémoration de la célèbre bataille où se sont illustrés le capitaine Danjou et ses hommes, ce sera évidemment le 30 avril. Elle sera présidée, cette année, par le général de division Vergez, grand « patron » des bases de défense. Rappelons qu'elle est ouverte aux Chauriens, tout comme la kermesse qui suivra, l'élection de Miss képi blanc et le bal du Légionnaire… La fête continuera le 1er mai comme à l'accoutumée avec le tirage au sort de la fameuse tombola.

Autre temps fort de ce printemps, c'est la venue, du 12 au 20 mai, d'un stage de préparation olympique pour l'équipe de France de boxe. En juin -du 1er au 3- la Fédération nationale des clubs artistiques de la Défense tiendra son salon aux Cheminières. L'occasion d'admirer de véritables œuvres d'art et de découvrir bien des talents. Juin, l'exercice Normandie pour deux compagnies dont les soldats partiront sur les traces du débarquement.

Dans la roue de La Solidaire

C'est « la « course chère au capitaine Joffredo, officier supérieur adjoint du régiment. Cette année, la course cycliste au profit de l'institut des invalides de Puyloubier partira de Castelnaudary, le 23 juin et c'est une belle première avec passage à Bagnères de Bigorre, Saint-Girons et arrivée, au terme de 467 km et des poussières, de la sueur aussi… à Formiguères. L'an dernier ils partirent 47 de Nice et par un prompt effort, se virent 67 en arrivant au port. Combien seront-ils pour cette édition ? Une centaine certainement… avec des participations extérieures à l'institution d'amis et de sponsors.

La course n'est que dans trois mois. Fallait-il déjà l'évoquer ? Le choix fut cornélien mais le plaisir d'annoncer la venue de la musique de la Légion étrangère pour un concert gratuit, du car podium de l'institution et des nombreuses animations qui vont avec, a prévalu. Et puis, quelle belle et noble cause que la Solidaire. Pour en savoir encore plus, le site de la Légion hébergera un blog spécialement dédié à l'épreuve dont bien sûr, nous reparlerons. À défaut de pédaler, on pourra acheter des kilomètres. L'essentiel n'est-il pas de participer ?


Monaco run

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19/03/2012

1700 coureurs se sont retrouvés ce dimanche 18 mars pour la Monaco run, avec deux épreuves au programme : la Riviera Classic, 23,8 km de Vintimille à Monaco, et la 10 km Monte-Carlo, dans les rues de la principauté (seul ou en relais). La Riviera Classic est plutôt atypique puisqu'elle a la particularité de permettre aux coureurs de traverser trois pays sur une même épreuve (Italie, France, Monaco).

Jean-Claude Niyonizigiye (Burundi) termine premier sur le parcours le plus long, en 1 h 15 min 01 sec, devant le Kényan Duncan Kiptanui Kipkurgat (à 2 min 11 sec) et le Marocain Icham El Barrouki (à 2 min 32 sec). Chez les femmes, la lauréate s'appelle Ornella Ferrara. L'Italienne, déjà vainqueur l’an dernier, mena toute la course pour l’emporter aisément en 1 h 29 min 18 sec, devant la française Ingrid Lopergolo et la Roumaine Adriana-Maria Di Guitso.

Pendant ce temps, les 700 coureurs du 10 km avaient pris le départ à 9h30 sur le port de Monaco. Du boulevard Albert Ier vers Fontvieille et le tour du Stade Louis II, en repassant devant le port, puis l’avenue Princesse Grace et enfin le retour sur le port Hercule. Sur ce nouveau parcours, c’est le légionnaire Ougandais Nathan Chebet qui s’est imposé en 30 min 20 sec, devant le Kenyan Mike Njuguna et le Français Bruce Bautista.

Chez les féminines, trois françaises se retrouvent sur le podium, Nathalie Chabran, 1ère en 36’34, devant Nathalie Da Ponte et Evelyne Mura.

Le site de la monaco run : http://www.monacorun.org


19 mars : telle une blessure

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Publié le 19/03/2012 par Thomas Longué

Gisèle Ferraris, pied-noire de Sidi Bel Abbès, fixée à Pau depuis 1963, ne reconnaît pas le 19 mars comme la date devant marquer la fin

de la guerre d'Algérie (Photo D. Le Deodic)

«Pour nous, cette date est une insulte : on oublie tous les massacres perpétrés par le FLN après les accords d'Evian. Il y a eu plus de morts entre le 19 mars et le 5 juillet 1962 (1) que dans les huit années qui avaient précédé ».

Mariée depuis six mois, Gisèle Ferraris, de Sidi Bel Abbès, avait 23 ans et était secrétaire de direction chez Renault quand survint le cessez-le-feu. « Sur le moment, on y a cru à la pacification. On a cru qu'il n'y aurait plus d'attentats, qu'on allait pouvoir rester en Algérie… »

Mais les menaces s'accumulant, particulièrement sur les femmes, Gisèle Ferraris, sa sœur cadette et sa mère firent prestement leurs valisent, le 22 juin 1962, et débarquèrent à Marseille. « C'était la première fois qu'on mettait les pieds en métropole. On pensait que la France était notre pays, eh ! bien non… Mon père avait beau avoir fait la guerre, la bataille de Monte Cassino, non, nous n'étions pas les bienvenus. On ne nous parlait pas en face. »

Cependant, un cousin de Dignes (Basses-Alpes) leur offre l'hospitalité. C'est alors que Gisèle décide - pure folie aux yeux de sa mère ! - de retourner en Algérie, où sont restés son père et son mari.

Elle arrive à l'aéroport de Senia (Oran), à contresens du flux de l'exode. Sur la place d'Armes, ça tire de tous les côtés. « Le garde mobile, un Français de France qui m'avait pris sous sa protection me disait que c'était l'OAS. »

Deux oncles liquidés

Son départ définitif d'Algérie interviendra le 9 janvier 1963. Elle n'a jamais su ce qu'était devenu un oncle, entrepreneur en maçonnerie, âgé de 62 ans, disparu du jour au len demain. Un autre de ses oncles, légionnaire, adjudant du 1er REP (Régiment étranger de parachutistes) est mort au combat dans les Aurès.

Son cœur se serre quand elle pense à son père qui, à 50 ans, dut accepter un emploi de chauffeur de camion pour continuer à faire vivre sa famille

Femme de tempérament, Gisèle Ferraris, présidente de l'Amicale des Pieds-Noirs de Pau-Béarn et de leurs amis (657 familles adhérentes) s'honore d'avoit été la toute première pied-noire à revenir sur le sol algérien, en 1976. « On est reçus comme des rois, là-bas. »

L'âge, dit-elle, ne fait qu'aviver la nostalgie du pays perdu. Mais il n'émousse pas son ardeur : Gisèle Ferraris était, samedi à Toulouse, devant la gare Matabiau, parmi les manifestants qui ont protesté contre la décision de la mairie d'appeler le pont Bayard pont du 19 mars 1962.

(1) Date de la proclamation de l'indépendance de l'Algérie.

Guerre d'Algérie En ce cinquantième anniversaire du cessez-le-feu en Algérie qu'instaurèrent les accords d'Evian, les acteurs de ce drame restent profondément divisés quant au bien-fondé de la date du 19 mars (1962) qui commémore la fin des combats. Pieds-noirs et harkis s'accordent à considérer qu'elle est malvenue. Car le pire était à venir : le massacre à grande échelle des harkis et les assassinats de Français d'Algérie

« Il nous faut refonder un modèle »

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Publié le 18/03/2012 par Emmanuelle Fère

L'organisation échange ses idées à Bayonne-Anglet du 19 au 24 mars.

Franz Valli, responsable de la communauté d'Emmaüs à Tarnos (Landes), qui compte 45 compagnons. (Jean-Daniel Chopin)

«Une goutte d'eau dans la mer, comme disait l'abbé Pierre, mais une goutte qui change la vie. » À quelques heures de l'arrivée de 400 participants d'une quarantaine de pays pour l'assemblée mondiale d'Emmaüs International, Franz Valli, responsable de la communauté de Tarnos, a la rencontre internationale modeste. « Vous ne voulez pas interroger quelqu'un d'autre ? » Car ils sont 45 compagnons, œuvrant du mardi au samedi à la récupération, réparation et vente d'objets de seconde main, soit la mission traditionnelle des compagnons.

Des tâches qui font vivre la communauté « sans subvention de quelque collectivité », insiste-t-il. « Des entreprises ferment car les actionnaires retirent des bénéfices insuffisants, et nous parvenons à faire vivre 45 personnes avec des objets de récupération », avance Franz Valli. « Cela ne résout pas tous les problèmes, mais cela montre que l'on peut travailler autrement. Il faut refonder un modèle, réinventer des lieux de travail », selon l'évolution de la population des laissés pour compte, car, « parmi ceux de la rue, beaucoup désormais n'ont jamais travaillé. On bascule vite dans l'exclusion. »

Vie civile « un peu fade »

Le travail avec les assistantes sociales, les municipalités, le comité de probation du tribunal de grande instance de Bayonne et les associations qui répondent à l'urgence, voilà aussi la pierre que Franz Valli apportera aux débats de cette semaine. « Chaque groupe de chaque pays a sa sensibilité, correspondant aux besoins locaux. » Mais des axes de travail ont été déterminés : l'accès à l'eau, les sans-papiers, l'éducation, la santé.

Franz Valli est un homme d'engagement. Douze ans dans la Légion étrangère après avoir quitté son canton du Tessin (Suisse) natal. Il ne le savait pas encore, mais il avait signé pour « apprendre que rien n'est impossible. La partie organisationnelle, notamment. » Le retour à la vie civile lui parut « un peu fade » et, pour tout dire, « difficile ». La nostalgie de la vie en communauté, et du voyage au pied levé. Franz Valli resigna, en quelque sorte, mais cette fois pour une communauté Emmaüs, à Norges-la-Ville, près de Dijon. Sans l'avoir vraiment voulu, assure le responsable. « Un ami m'en a parlé. Je ne connaissais pas du tout Emmaüs. Cela s'est fait par hasard, comme ce que j'ai fait dans ma vie. » C'était en 1985. En 1986, Franz Valli croisa celui qui allait être responsable de la communauté d'Emmaüs de Bayonne, dans la zone industrielle des Pontots. Il lui emboîta le pas et découvrit le Pays basque. Un an plus tard, la communauté déménageait sur l'ancien site des Missions africaines, à Tarnos.

Évolution de la pauvreté

En 1987, Franz Valli était déjà reparti pour assurer la responsabilité d'une communauté à Bourg-en-Bresse. Après plusieurs étapes, et quinze ans de missions pour la communauté d'Emmaüs en France, il revint à Tarnos. Le principe n'a pas changé : « On accueille pour se refaire une santé, et pour retourner à la vie civile. On peut rester un jour ou toute la vie. » À condition de respecter la règle de vie de la communauté. Travail, sociabilité, pas de consommation d'alcool ou de stupéfiants dans son enceinte. « La drogue a changé les choses », assure Franz Valli. La pauvreté aussi a évolué, encore. « Elle glisse tout le temps, comme le disait l'abbé Pierre, c'est un éternel combat. L'écart ne cesse de se creuser. » La seule chose qui ne change pas est l'éternelle nécessité d'Emmaüs de s'y adapter.


Algérie : que reste-t-il de la France ?

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Publié le 18/03/2012

Sur l'ancien boulevard des Arcades, le café bar de Bordeaux a disparu. Mais reste l'architecture et la beauté d'Alger sous le soleil, un lieu de promenade agréable le matin face au port.

Malheureusement, à deux pas de là, la Casbah, elle, est menacée.

Ils vivent là-haut, dans la Casbah. Ils ont à peine 20 ans. S'appellent Mohamed, Maani, Morad… L'un porte un maillot d'Arsenal. L'autre une casquette du Barça. Le troisième une veste fripée frappée du croco. Et dans leur monde, Lacoste n'évoque rien d'autre que la quintessence du chic, en survêtement. Car pour ce qui est de Robert Lacoste, gouverneur général d'Algérie en 1956, ils n'en ont jamais entendu parler.

Pourtant, ils traînent à deux pas du 5 rue des Abdérames où les paras firent sauter Ali la Pointe le 8 octobre 1957, lors de la bataille d'Alger. Mais c'était il y a longtemps. Indépendante, l'Algérie l'est depuis 50 ans. Maintenant leur génération attend sa libération, l'émergence sans cesse repoussée d'une société qui les prendra enfin en compte…

Sur 35,5 millions d'Algériens, plus de la moitié a comme eux moins de 25 ans et 500 000 jeunes quittent chaque année l'école sans formation. Leurs grands frères étaient de la génération des « hittistes », chômeurs qui tenaient les murs, vivier des islamistes. Ils appartiennent désormais à celle des « Harraga », clandestins prêts à défier la mer pour n'importe quel avenir. Ailleurs. « Passeport biométrique pour partir à la France, je peux faire tous les travails ! », s'enthousiasme l'un d'eux. Tandis que le vieux monsieur de la Casbah au français impeccable secoue tristement la tête. « Nos généraux incultes ont fabriqué des illettrés multilingues. »

Mais à Alger, il y a aussi la jeunesse qui étudie, use du foulard comme d'un camouflage et se découvre enfin un espace intime pour flirter dans cette société de la promiscuité, grâce à la révolution silencieuse du portable. Et puis il y a les parents. Les grands-parents. Qui lisent une presse libre. Et qui en ont marre de l'instrumentalisation de la guerre d'Algérie, des deux côtés de la Méditerranée. « Parce que 50 ans après, elle sert encore à régler des questions de politique intérieure, à récupérer des voix les veilles d'élection alors que le problème est entre les gouvernements, pas entre les peuples», témoigne Khelifa, 77 ans.

Nicolas Sarkozy choque. Et fait la une avec sa politique anti-immigrés. Mais plus personne n'est dupe non plus du vieux discours FLN sur la seule culpabilité de la France « pour masquer son propre échec ».

Chacun connaît ses cadavres dans les placards. Au péril de leurs vies, écrivains et journalistes ont ouvert les portes, raconté les luttes fratricides, la corruption. Raconté aussi les frères musulmans égyptiens venus alphabétiser en arabe leurs « frères algériens » dans les années 70 à la demande d'un Boumedienne nataliste… Ces « frères égyptiens » ont engendré les « barbus » et la guerre civile entre pouvoir et intégristes : plus de 100 000 morts durant la « décennie noire ».

La France, 50 ans après ? En 2012, les Algériens ont d'autres urgences que le passé. Leur présent suffit. Fatigués des violences, ils veulent la paix. Le SMIC est à 180 €, les loyers hors de prix. La manne pétrolière sert plus à l'achat de clientèles électorales qu'à améliorer leur quotidien. La seule angoisse du pouvoir ? « La participation aux prochaines législatives, en mai », disent tous les interlocuteurs. Sans illusions. Ni nostalgie française. Les vieux n'ont pas oublié les « ratonnades ». Les mines de la ligne Morice tuent encore. Les radiations de Reggane aussi… Mais reste l'architecture d'Haussmann, l'aura de la mode et un rêve de réussite, tandis qu'Ahmed le « taxieur » prend « la rue Michelet », inconsolable d'avoir perdu « ses » six chaînes françaises depuis le passage au numérique. « Elles étaient indispensables pour bosser mon français »


50 ans après, il reste le français

Boulevard Mustapha Ben Boulaïd, Khelifa attend son avocat. L'hiver joue les prolongations sur Alger. Mars lâche de longues et glaciales giboulées… Alors, à 77 ans, Khelifa sort bien couvert. Avec son pardessus, son écharpe et surtout… son béret. « Authentique ! », souligne-t-il, étiquette basque à l'appui. Une pointe d'accent parisien sur son phrasé algérois. Oui, autrefois il a travaillé à Saint-Ouen. Mais son téléphone portable sonne. Il s'excuse. Décroche.

« Salam alekoum »… La conversation s'engage en arabe. Puis Khelifa enchaîne « je suis boulevard Bugeaud », écoute son interlocuteur. Commente en arabe. Et conclut : « Eh bien on ira au procureur ! ». Il raccroche. On en était où, déjà ? Ah oui. À causer de ce qui restait de la France en Algérie, 50 ans après la fin de la guerre. Ce à quoi cette conversation au téléphone vient de répondre. Restent bien sûr pour l'ancienne génération les rues d'Alger. Mais reste surtout… le français.

Vivant, lardant chaque conversation à chaque coin de rue. « Butin de guerre » selon l'expression du poète Kateb Yacine. Langue que retient d'abord l'oreille comme symbole d'un sillon encore fertile tandis que l'œil ne peut ignorer l'état du reste…

Alger la Blanche ? Une timide éclaircie la révèle, bordant sa baie agitée par le vent. Allongée sur son port, elle arbore sur ses élégances d'autrefois les stigmates d'une femme répudiée et le bleu de ses fenêtres lui coule aux paupières. Berbère secrète et ottomane en sa Casbah ou fille cartésienne du baron Haussmann, Alger n'a visiblement plus grand monde pour prendre soin d'elle. Chancelante sur ses cariatides exténuées, elle porte ses façades flétries et froissées, vérolées de paraboles. Et s'endort tristement dès la nuit tombée. Mais conserve pourtant un charme d'exilée russe, en français…

La grenouille

Français en lettres dorées des plaques de médecins, de juristes ; français souvent cinglant des journalistes, des écrivains, français roulant des « taxieurs » qui vous baladent « rue Michelet », « tunnel des facultés », « rue des Pyrénées », « aux Trois Horloges » de Bab el Oued ou « rue Clauzel, la rue de Monsieur le sculpteur Paul Belmondo ». Sans oublier, bien sûr le français des menus de restaurants, de « La Grenouille » au « Béarnais »… Au déjeuner, un « Château Tellagh » de Médéa arrose ainsi le veau Marengo aux accents de Radio Nostalgie, dans la grande salle de l'hôtel Albert 1er… tandis qu'une tablée voisine de professeurs de maths coupe sa conversation arabe de « calcul intégral » et d'« équations du second degré ». Entrant soudain en résonance avec cet article du journal « El Watan » sur le 3e congrès des mathématiciens algériens. Lesquels s'inquiètent du net recul de leur filière, pourtant stratégique, dans les universités. Le souci ? Le manque de maîtrise qu'ont désormais les jeunes matheux des langues de Molière et Shakespeare, « deux langues incontournables

[…] pour les études de mathématiques. Car tout simplement, il n'existe pas d'ouvrage mathématique en arabe », souligne le quotidien. Le français, 50 ans après ? « Vital quand on veut s'en sortir en Algérie : il y a ceux qui le parlent et les autres », résument alors Elias Meziani, Hakim Rezaoui et Zoubir Mammou, trois habitués de l'Institut français d'Alger. Tous trois coiffés d'une galette noire. Et qui revendiquent leur béret et leur casquette de titi - « car c'est une façon discrète de résister aux islamistes », sourit Elias. La culture et la langue, lieux de résistance et enjeux de pouvoir ? ça ne date pas d'hier pour Zoubir, 70 ans passés, qui explique dans son français parfait : « Je ne voulais pas avoir l'accent pied-noir. Car voyez-vous, lorsqu'un Pied-Noir arrogant me parlait mal, moi, je lui répondais en bon français et il fermait sa gueule. »

Le butin de la langue

Seulement voilà, si Kateb Yacine écrivait aussi en français « pour dire aux Français qu'

[il n'était] pas Français », la France « civilisatrice » est partie en laissant derrière elle 80 à 90 % d'analphabètes. « Et il faut saluer l'effort colossal qu'a fait l'Algérie pour instruire sa population en 50 ans », souligne cet ingénieur polytechnicien, qui, né français a opté pour la nationalité algérienne en 1962 et veut « rester anonyme ». Mais « le « butin de guerre » de la langue française a été confisqué par le seul pouvoir algérien », dénonce Zoubir ajoutant : « Le pouvoir a conservé le français pour lui et imposé un mauvais arabe au peuple pour le garder inculte ». Avant de faire marche arrière au milieu des années 2000. Car le français est redevenu un enjeu. Au Centre culturel français d'Alger, l'un des espaces de liberté prisé des jeunes dans la capitale, le service « Campus France » ne chôme pas : plus de 15 000 bacheliers se sont inscrits en 2011 pour passer le test de connaissance du français, indispensable pour d'éventuelles études en France et 2 220 étudiants ont passé un diplôme de langue française. « Pour nous le français est un outil, un moyen de se cultiver, de lire et un sésame pour accéder aux bons jobs d'Alger », explique également Naciba, 24 ans, diplômée d'une école supérieure de gestion, tandis que Sénia, 23 ans, étudiante aux Beaux-Arts, vient pour « la bibliothèque bien achalandée. Tout notre cursus est en français et nous sommes imprégnés de culture française. » Dans son taxi, Ahmed se souvient de son père disparu, victime d'une bombe islamiste au marché lors de la guerre civile. « Lorsqu'un de mes frères avait voulu lui offrir le pèlerinage à La Mecque, il avait répondu : d'accord, mais demande à l'avion de faire un détour par la France ! » Alger aussi avait sa rue Voltaire.

Des Pieds-Noirs se font toujours enterrer au cimetière Saint-Eugène

La tombe est encore fraîche. Elle n'a pas reçu sa dalle. Et ne porte pas de nom. Juste des fleurs et une couronne à même le sol, dédiée au « camarade du Parti communiste algérien » enterré là. Finalement, cette sépulture semble bien la seule « trace de vie » dans ce cimetière. Car ici… c'est Saint-Eugène, vaste fantôme du « cimetière chrétien » collé à Bab El Oued, entre l'avenue Malakoff et le boulevard des Flandres, selon l'ancien plan d'Alger… Lieu où les « regrets éternels » prennent une dimension particulière. 8 000 tombes sont alignées là qui gardent une partie de la mémoire des Français d'Alger dans leur dernière demeure, face à la mer.

Témoin le petit mausolée de la famille Schiaffino pas très loin de l'entrée, armateurs qui transportaient le vin algérien vers la France. Familles de la Roche, Larousse, Guibert, Charles, Gauthier… mais aussi Maya et Blasco, Cabanellas ou Wurstersen… au gré des carrés revit alors la diversité de ceux qui peuplèrent le pays, à partir de la conquête d'Alger. Français, Alsaciens, Suisses, Espagnols, Italiens, Maltais… « Les Maltais, on les aimait bien, ils venaient avec leurs chèvres et distribuaient leur lait, c'était les plus proches de nous », commente l'ami algérois, tandis qu'on cherche des tombes singulières, telle celle d'Édouard Cat.

« Bien penser, bien dire, bien faire » : ce maçon avait ainsi érigé la Maison du Peuple à Alger et créé « L'Algérie nouvelle ». Mais il paraît qu'ici est aussi enterrée la veuve Breuil, née Garcin en 1 810 et dont la gloire fut d'épouser en 1 831 Libéral Breuil, maître cordonnier des zouaves, lors du premier mariage européen célébré à Alger. Le zouave : figure emblématique des colonies dont la statue veille sur le carré militaire et ses croix blanches alignées devant le cimetière juif.

Marbres attaqués par les mousses, calcaires rongées par les embruns, fleurs de céramiques aux corolles fracturées en tessons, portraits s'évanouissant progressivement… Les gardiens ont beau veiller contre le vandalisme, ils ne peuvent rien face au temps qui applique sa loi d'airain quelle que soit la perpétuité de la concession. Et comme au cimetière romain de Tipasa, les tombes de Saint-Eugène invitent alors les vivants à méditer sur la vanité des civilisations et sur l'attachement à une terre. « Une dizaine de familles de Pieds-Noirs passe chaque année, pendant les vacances, mais il y a très peu de demandes d'exhumations. Au contraire, il y a surtout des demandes de renouvellement de concessions, à 300 € pour les 30 ans », indique ainsi Aissaoui Brahim, conservateur du cimetière Saint-Eugène. Et certains exilés veulent toujours y être enterrés, une manière d'ultime retour au pays natal : « Ces dernières années nous avons inhumé un Pied-Noir qui était parti en Amérique, un autre en Suisse et on a encore des demandes régulières ».


regard

« Nostalgérie »

Le temps passe en Algérie comme en France. Mais il suffit d'une date, d'une émotion, d'une photographie, d'une parole, pour que le temps rebrousse l'Histoire et que revienne la mémoire des mauvais jours. Aujourd'hui, 18 mars 2012. Il y a cinquante ans, un cessez-le-feu, signé dans la confusion et au nom de la raison d'État, mettait fin à une guerre qui, forcément, n'avait que trop duré - trop de morts, trop de blessés, trop d'exactions, trop de tortures, trop de barbarie.

Pour les jeunes appelés du contingent - un million et demi, dont les familles, en France, vivaient dans l'angoisse -, le cessez-le-feu voulait d'abord dire qu'ils rentreraient chez eux, que c'en serait terminé d'une aventure qui, pour la plupart, ne les concernait pas. D'ailleurs, cette paix annoncée, la France, dans son écrasante majorité, l'appelait de ses vœux. Pour les Français de métropole, l'Algérie qu'ils ne connaissaient pas ressemblait déjà à des départements du bout du monde. Ils attendront trente-sept ans pour que leurs députés admettent que c'était bel et bien une guerre et non plus des « opérations de maintien de l'ordre ». Drôle d'histoire.

Mais l'histoire n'est pas la même pour ceux qui sont nés sous ce soleil-là - le soleil de leur jeunesse. Le 18 mars leur est une souffrance qu'ils ne veulent surtout pas célébrer, parce qu'ils ont vécu, dans leur chair et dans la chair de leurs amis, la grande trahison du pouvoir. Les accords de cessez-le-feu avaient tout simplement oublié la valeur de la vie humaine - et de Gaulle n'en sera jamais pardonné. Militaires perdus dans le cours de l'Histoire. Pieds-Noirs qui durent choisir la valise et juste un dernier regard sur les choses de leur vie. Harkis, désarmés, abandonnés, scandaleusement livrés à la haine. Algériens, enfin, qui, par fierté, choisirent un régime autoritaire, rigoureux, encore prisonnier de ses dernières raideurs. Enfin, une république française qui préfère refouler ses années sales. Rien, absolument rien, ne peut faire de cette date heureuse le symbole d'une réconciliation. Il y faudra encore trop de temps et beaucoup de sagesse.

Il reste donc pour quelques anciens, en pèlerinage là-bas, le bonheur des retrouvailles, l'émotion de revoir une maison, les larmes de qui repasse par sa jeunesse. Et pour tous la « Nostalgérie » - le culte d'une histoire ancienne qui date à peine de cinquante ans.


Tipasa : des Noces de Camus aux amours clandestines

Sur la pierre dressée droite face à la mer et à l'extrémité des ruines romaines, quelques mots : « Je comprends ici ce qu'on appelle Gloire. Le droit d'aimer sans mesure ». Albert Camus.

Tipasa… Un petit port côtier à l'ouest d'Alger. Mais surtout le site qui a inspiré au jeune écrivain et futur prix Nobel l'un de ses plus beaux textes : les « Noces à Tipasa », célébration lyrique du soleil, de la Méditerranée, des « noces de l'homme et du monde » aux couleurs éclatantes, aux odeurs puissantes, hymne à l'hédonisme et à la liberté des sens… Aujourd'hui ? à part quelques universitaires, plus personne ne lit Camus en Algérie. Et Tipasa accueille désormais d'autres noces, les amours clandestines des couples éphémères qui viennent y échanger un baiser, s'y tenir par la main et s'enlacer timidement dans les encoignures des vestiges. En essayant de déjouer la vigilance des gardiens. Lesquels veillent autant sur le respect de la morale que des vieilles pierres. « Le monde finit toujours par vaincre l'histoire », avait aussi écrit Camus, à Djemila.


Une barquette de viande à 5,95 € conduit Vido devant le tribunal

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17/03/2012

Hier, Vidosav s’est présenté tout de blanc vêtu, "la couleur de l’innocence". (Photo FABRICE ANDRÈS)

Il a contesté et refusé de se soumettre au contrôle signalétique. Hier, le tribunal correctionnel a relaxé ce Beaucairois. Vido - c’est son surnom - est arrivé tout de blanc vêtu hier au palais de justice. Vido pour Vidosav, un sacré personnage qui ne s’en laisse pas conter. "Le blanc, c’est la couleur de l’innocence", a déclaré ce Beaucairois, convoqué devant le tribunal correctionnel. À l’audience, cet ancien légionnaire d’origine yougoslave porte ses décorations militaires sur la poitrine et arbore un petit bouquet d’anémones de couleur violette. Le 12 septembre dernier, le quadragénaire, qui vit de ses rentes locatives et affirme être "contre le travail", s’est présenté aux caisses du magasin U express à Beaucaire. Selon le directeur du magasin, Vido, constatant l’attente à la caisse, aurait fait preuve d’agressivité. Le responsable de l’établissement a alors refusé d’encaisser les marchandises que Vido souhaitait acheter. Le ton est monté entre les deux hommes. Le client se serait jeté sur la barquette de côtes de porc qui est tombée à terre. Le responsable du magasin a fini par prévenir la police. Les images vidéo du magasin ont été saisies.

Le parquet a décidé de poursuivre Vido pour dégradation volontaire du bien d’autrui. En l’occurrence, il s’agit de la barquette de côtes de porc. Vido qui n’a pas voulu donner ses empreintes devait aussi s’expliquer pour avoir refusé de se soumettre aux opérations de relevés signalétiques intégrés dans un fichier de police. "Mes empreintes ? La préfecture les a pour ma carte de séjour", a déclaré hier Vido aux magistrats.

Son avocat, Me Gandini, a, lui, porté plainte en son nom pour refus de vente. Il a plaidé la relaxe assurant que la barquette de côtes de porc était tombée accidentellement à terre.

"J’ai attendu une dizaine de minutes à une caisse du magasin, déclare Vido. En France, cette enseigne fait 2 milliards d’euros de bénéfices par an. Ils pourraient embaucher plus de personnels, des chômeurs. Avec ces supermarchés, on a détruit le petit commerce de proximité et les emplois." Et à la barre, Vido poursuit en s’étonnant : "Il y a plusieurs mois, les magistrats étaient en grève et réclamaient plus de moyens. Et là, vous me convoquez devant le tribunal pour cette affaire !"

Le parquet a réclamé une amende de 6 € avec sursis. Soit 5 centimes de plus que le prix de la barquette. Vido a été relaxé.


Pierre Schoendoerffer, l’adieu aux armes

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Créé le 14-03-2012

L’auteur du «Crabe-Tambour», grande référence du prix Goncourt 2011, est mort à 83 ans.

Le cinéaste et romancier Pierre Schoendoerffer est décédé ce mercredi 14 mars à l'âge de 83 ans des suites d'une opération à l'hôpital Percy de Clamart (Sipa)

L’homme qui vient de mourir, ce mercredi 14 mars à l’âge de 83 ans, tenait le XXe siècle pour «le plus cruel, le plus meurtrier de tous les temps». Il savait un peu de quoi il parlait.

Parce qu’il n’était né qu’en 1928, à Chamalières dans le Puy-de-Dôme, il avait manqué le grand massacre de 1914-1918, et n’était qu’un adolescent pendant la Seconde Guerre mondiale. Mais à l’école de la barbarie humaine, il s’était bien rattrapé depuis: après avoir embarqué comme matelot sur un navire suédois à 19 ans et passé dix-huit mois en mer, ce grand lecteur de Conrad s’était engagé, dès 1952, au service cinématographique des armées.

Expédié en Indochine, il part avec cette phrase en tête: «Adieu vieille Europe, que le Diable t'emporte!» Il lui reste à apprendre que le Diable est partout, et que Goethe avait raison de «mettre en garde les jeunes gens rêveurs» en disant: «Méfie-toi de ce que tu souhaites dans ton adolescence, parce que tu l'obtiendras dans ta maturité...»

Car la guerre d’Indochine est un roman d’aventures particulièrement violent: il la filme pendant trois ans, tombe entre les mains du Viêt Minh à Dien Bien Phu en 1954, n’est relâché que quatre mois plus tard. Comment revenir à un métier normal quand on a vécu une chose pareille? Schoendoerffer n’a plus qu’à devenir journaliste.

Le voilà grand reporter de guerre pour «Life», pour «Paris-Match», pour l’ORTF. Il raconte ce qui se passe au Viet-Nâm, travaille avec Jean Lartéguy en Algérie. Réalise un rêve de gamin, en 1958, en portant à l’écran «la Passe du diable» de Kessel, qu’il a rencontré à Hong-Kong. Récidive en adaptant «Pêcheur d’Islande», de Pierre Loti. Se met à faire du cinéma comme il a fait la guerre, en partant tourner «la 317e Section» dans la jungle en 1963. Un succès confirmé par ceux de «la Section Anderson» en 1967, puis du « Crabe-Tambour » en 1977, qu’il a adapté de son propre roman.

«Mon maître Joseph Conrad»

Son goût pour la caméra ne doit pas, en effet, faire oublier l’homme de plume: sa «317e Section» est d’abord un roman inspiré par ses souvenirs d’Indochine, «l’Adieu au roi» lui vaut le prix Interallié 1969, et «le Crabe-tambour», le Grand prix de l’Académie française en 1976. On y retrouvait ses obsessions les plus sûres: la fraternité virile face à la mort, et des soldats livrés à eux-mêmes, condamnés à se dépasser sans toujours très bien savoir pourquoi.

Etait-ce pour lui une façon de courir après sa jeunesse perdue?  Les durs à cuire cacheraient-ils une âme mélancolique? Ce président de l’Académie des Beaux-Arts aimait à citer celui qu’il appelait «mon maître Joseph Conrad», et dont il espérait adapter un jour le formidable «Typhon»:

C'est le privilège de la jeunesse que de vivre en avance de ses jours, dans une magnifique et constante espérance... On pénètre dans un jardin enchanté. Chaque détour du sentier a sa séduction. Ce n'est pas la découverte d'un pays inconnu. On sait bien que par-là a passé le flot de l'humanité toute entière. C'est le charme d'une expérience universelle dont on attend une sensation unique et personnelle - la révélation d'un peu de soi-même... On marche en retrouvant les traces de ses prédécesseurs... On marche et le temps marche aussi, jusqu'au jour où l'on découvre devant soi une ligne d'ombre qui vous avertit qu'il va falloir, à son tour, laisser derrière soi la contrée de sa prime jeunesse.»

Dans «l’Aile du papillon», son dernier roman, Schoendoerffer rendait une nouvelle fois hommage à l’auteur de «Lord Jim», à Kipling et à Melville, en s’interrogeant sur «l'inexplicable et court passage de l'homme, sur la terre, aussi éphémère que la vie d'un papillon». C’était en 2003, déjà. Mais l’ancien légionnaire qui y racontait son passé au bistrot n’a pas parlé complètement dans le vide. Car toute ressemblance avec le Victorien Salagnon de «l’Art français de la guerre» d’Alexis Jenni n’est pas fortuite. Le nom de Pierre Schoendoerffer était l’une des principales références brandies, à l’automne dernier, par le lauréat du Goncourt 2011.

Grégoire Leménager




Le dernier roman de Pierre Schoendoerffer

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Créé le 14-03-2012

Pierre Schoendoerffer vient de mourir, ce mercredi 14 mars, à l'âge de 83 ans. En 2003, il publiait son dernier roman, en hommage à Conrad et Melville.

Dans le petit port breton où il vit retiré, on l'appelle commandant car il a autrefois servi la République. L'ancien légionnaire est devenu écrivain, mais il lui arrive de ressasser ses aventures passées au bistrot du coin ?

Toute ressemblance entre Schoendoerffer et son héros serait bien évidemment fortuite. Toutefois, le baroudeur de Diên Biên Phu, qui revient à la littérature après vingt-deux ans d'absence, ne s'étendra pas - ou si peu - sur des aventures largement évoquées dans des ouvrages salués, couronnés et portés à l'écran. Il met cette fois en scène un combat d'une autre nature. Celui d'un écrivain contre lui-même.

Roscanvel, le filleul du narrateur, un jeune ingénieur bon genre, l'a chargé de mettre en forme le récit du naufrage de la course en solitaire dont il est rescapé. Mais, très vite, le ton monte entre les deux. Le navigateur ne se reconnaît pas dans les élucubrations apocalyptiques de son parrain. Il tente bien de tempérer ses excès lyriques: «N'exagère pas la tempête, c'était un coup de chien force8, pas un typhon. Et ton coup de poignard! J'avais deux côtes fêlées, c'est tout.»

Trop tard, son expérience ne lui appartient plus. Sa formation scientifique doit l'aider à admettre que la présence d'un observateur modifie le cours d'un événement. Surtout lorsque l'observateur en question est une sorte de personnage à la Blondin, flottant entre euphorie éthylique et désespoir, «singe en hiver» échoué sur un zinc.

«Et comment va s'appeler votre livre?», demande Jenny, la patronne du café qui fait mine de s'intéresser. «L'Aile du papillon», répond le Commandant. Il raconte alors la légende de l'insecte ailé au pays du Matin-Calme. Par un simple battement d'ailes, il peut créer un imperceptible zéphyr capable par la force des choses de s'amplifier en ouragan déchaîné à l'autre bout du monde.

C'est ainsi que le naufrage du trimaran, non loin de Terre-Neuve, fera chavirer le destin de trois hommes. Celui du sinistré d'abord. Monté à bord d'un cargo poubelle, Roscanvel passe vite de l'autre côté du miroir. Le capitaine de ce rafiot, Profieffke, une brute qui exerce un pouvoir régalien sur sa «canaille», ne tardera pas à l'y suivre. Enfin, le narrateur à son tour va perdre pied.

La mise en abyme de cette fable épique permet à Schoendoerffer une célébration explicite des grands romanciers de l'aventure dont il est nourri: Conrad, Kipling, Stevenson. Loin d'entraver le cours du récit, le procédé narratif crée un suspens déroutant.

Les péripéties dramatiques de Roscanvel n'y prennent leur sens que dans les dernières pages en un saisissant épilogue. Le roman du roman n'en est pas moins prenant. Où l'on assiste aux affres d'un écrivain, hanté par le mal, tenaillé par des angoisses métaphysiques, interroger les abysses de la nature humaine et «l'inexplicable et court passage de l'homme, sur la terre, aussi éphémère que la vie d'un papillon».

Avec ce roman magistral, le père du «Crabe-Tambour» opère un retour en force. Cette grande figure atypique et quasi légendaire du monde des lettres y donne la quintessence de son art. Dédié à l'auteur de «Moby Dick», le livre semble faire écho à cet aveu de Melville dans son journal: «J'aime tous les hommes qui plongent.»

Claire Julliard





Castelnaudary. Bon anniversaire « madame »

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Publié le 11/03/2012

C'était hier l'anniversaire d'une vieille mais très grande dame, la légion étrangère. Castelnaudary, c'est bien connu, vit bien souvent à l'heure de son prestigieux régiment, le 4e régiment étranger, et donc à l'heure de la légion. Celle-ci est née le 10 mars 1831. Le 9 mars, la loi était votée et le 10, l'ordonnance royale était signée par Louis Philippe. Le calcul est vite fait, la « vieille dame » à 181 ans. Presque deux siècles de traditions, et pourtant l'une des armes les plus modernes du monde. Bon anniversaire « madame ».


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